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l'être bien plus parfaitement si vous le vouliez: je n'articulerai point ce qu'il faudroit que vous fissiez pour cela; vous le devinez de reste.

Ce que vous me dites de Mr. Sylwin est parfaits; j'y ajoute qu'il n'a que de l'esprit de tête, et pas un brin du cœur; vous définiriez bien mieux que moi ce que je veux dire.

Votre lettre m'a si fort troublée, que je suis comme si j'étois ivre: je semets à demain à continuer celle-ci.

Samedi, ler Novembre, à 4 heures.

C'est un malheur pour moi, et un très grand malheur que l'amitié que j'ai prise pour vous. Ah mon Dieu, qu'elle est loin du roman, et que vous m'avez peu connue quand vous m'en avez soupçonnée! je ne vous aime que parceque je vous estime, et que je crois avoir trouvé en

les

(3) Mr. Walpole had said " De tous "Anglois que vous verrez, c'est Mr. Selwyn qui a "le plus véritablement de l'esprit ; mais il faudra le "démontrer; faites en sorte qu'il vous parle mauvais françois. Il fait tant d'efforts pour parler votre "langue en vrai académicien, qu'il oublie totalement "d'y joindre des idées. C'est un beau vernis pour "faire briller des riens."

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vous des qualités que depuis cinquante ans j'ai cherché vainement dans tout autre; cela m'a si fort charmée, que je n'ai pu me défendre de m'attacher à vous, malgré le bon sens qui me disoit que je faisois une folie et que nous étions séparés par mille obstacles; qu'il étoit impossible que je vous allasse trouver, et que je ne devois pas m'attendre que vous eussiez une amitié assez forte pour quitter votre pays, vos anciens amis, votre Strawberry-hill pour venir chercher, quoi? une vieille sibylle, retirée dans le coin d'un couvent. Ah! je me suis toujours fait justice dans le fond de mon âme. Votre lettre de Chantilly m'avoit donné de l'espérance, mais presque toutes celles qui l'ont suivie l'ont si bien détruite, que votre dernière, (qui est charmante,) ne peut la faire renaître. Non, je ne vous reverrai plus; vous vous annoncez pour le mois de février; mille et mille inconvéniens surviendront de votre part, et puis ne peut-il pas y en avoir un bien grand de la mienne? Ah! mon Tuteur, j'aurois bien désiré, qu'avant le grand voyage que je ne suis pas bien éloignée de faire, vous en eussiez pu faire un en France. Vous voyez à quel point je suis triste; ne m'en

liberté de me montrer à vous telle que je suis; y a-t-il un autre plaisir, un autre bonheur, que d'épancher son cœur avec un ami sur lequel on compte uniquement? Adieu, mon Tuteur; le papier me manque.

LETTRE XVIII.

Paris, 20 Novembre, 1766.

MES numéros (1) vont grand train; ils courent comme un lièvre, tandis que les vôtres marchent à pas de tortue mais cela est dans l'ordre votre intention n'est pas de m'attrapper; vous serez à cinquante quand je serai à cent, et sans lire nos lettres, les dates suffiront, pour faire notre histoire. Vous m'avez demandé votre portrait, j'ai cru que c'étoit la chose impossible, mais comme il faut que je fasse vos volontés, et que je me soumette à toutes vos fantaisies, je viens de vous peindre: c'est une vraie enluminure; vous n'en serez pas content; il est mal écrit, mais comme

(1) Both Mr. Walpole and Mad. du Deffand numbered their letters.

il n'y aura que vous qui le verrez, je ne me soucie pas qu'il soit plus éloquent. Je n'ai ni médité ni réflechi pour le faire; mandez moi naturellement si vous en êtes content; la vérité, la verité est tout ce que je désire et que j'attends de vous; c'est votre langage ordinare, et je m'apperçois dans ce moment que c'est un article que j'ai omis dans votre portrait: c'est pourtant de toutes vos bonnes qualités celle dont je fais le plus de cas, et qui m'attache le plus à vous.

Il faut, mon Tuteur, que vous ayez une complaisance; c'est de faire mon portrait et de n'avoir aucun ménagement pour mon amour-propre; je vous en saurai un gré infini; que ce soit au courant de la plume; cela ne sera point inutile, et nous nous en trouverons peut-être fort bien l'un et l'autre.

3

Mr. de la Chalotais est à la Bastille, ainsi que tous les autres prisonniers : je ne suis point en état de vous rendre compte de tout ce qui

(2) For this portrait see the fourth volume of this collection.

(3) A part of the vengeance of the Duc d'Aiguil.

regarde cette affaire; je ne saurois m'occuper que de ce qui m'intéresse.

Je soupai l'autre jour chez Mad. d'Aiguil Jon; elle nous lut la traduction de la lettre d'Héloïse de Pope, et d'un chant du poëme de Salomon de Prior; elle écrit admirablement bien; j'en étois réellement dans l'enthousiasme : dites le à Miladi Hervey; je ne serois pas fâchée que cela revint à Mad. d'Aiguillon. Je voudrois aussi que vous fissiez de tems en tems quelque mention de moi aux Guerchys 5.—N'approuvez vous pas ce désir de conciliation ?

Votre Duchesse de Northumberland 6 est ici depuis cinq ou six jours; elle ne fait pas encore grand bruit.

(4) Mother to the Duc d'Aiguillon, whose character seems in no respect to have resembled hers.

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(5) The family of the Comte de Guerchy, then Ambassador from France to England.

(6) Elizabeth Seymour, Duchess of Northumberland, mother of the present Duke.

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