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gens de bien. Quand je paroîtrai me fervir des idées d'autrui, on voudra bien penfer que j'ai lu, avec affez de mémoire, pour profiter de tout, & trop peu pour citer perfonne. Quand on me trouvera des vues nouvelles, je prie de fuppofer d'abord qu'elles font réfléchies; & enfuite de les rejetter, pourvu qu'on

rencontre mieux.

Pour mettre un ordre aifé dans la foule des idées qui fouvent fe compliquent, je partagerai cet Ouvrage en trois parties.

Après quelques obfervations fur l'Education en gé néral, j'offrirai :

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1o. Un tableau méthodique des connoiffances hu

maines.

De-là viendra de foi-même,

2o. La diftribution graduelle des études fcholafti ques.

Enfin, cherchant les moyens d'étendre & d'assurer P'Education publique, j'établirai,

3°. L'ordre & la difcipline des Ecoles.

Je préviens que cette partie eft prefque toute de projets. Mais, fi l'on ne vouloit refaire que ce qui eft, se ne feroit pas la peine de projetter.

S. 2.

Objet de l'Education en général.

Il s'agit d'un enfant. Il faut en faire un homme & il faut que cet homme foit Chrétien & Citoven Magiftrat, Evêque, Général d'Armée, Miniftre d'Etat, un homme univerfel, s'il fe peut, & parfait en tout. Point de petit plan; point de vues bornées. La jeuneffe eft l'âge d'apprendre; l'Education eft le noviciat de la vie; & dans la vie les états font divers. Pourquoi ne feroit-on pas préparé à fervir la fociété dans tous les emplois ? Ofera-t-on décider d'avance

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un fujet dont les talens font inconnus ? & comment les talens fe manifefteront-ils, s'ils n'ont été effayés dans tous les genres? Sait-on les deffeins de la Providence, ou peut on rifquer de s'y oppofer? Tous ne peuvent pas etre Magiftrats, ou Evêques. Il y aura encore moins de Généraux & de Miniftres mais il y aura plus de gens capables de l'être. Et ne faut-il pas des Maitres qui les forment, & des Subalternes qui les aident? Des hommes de génie, qui conçoivent des projets; des Grands inftruits qui les protégent & des Riches généreux qui tentent de les réalifer? Auroit-on peur qu'il n'y eût trop d'excellens Citoyens, ou trop de grands hommes ? Le premier moyen d'élever l'ame, c'eft d'étendre les idées.

Il y a un ame & un corps à former, & ces deux objets n'en font qu'un, auquel il faut que tout concoure. Un corps bien conftitué fe prête aux opérations de l'ame; & une ame bien réglée facilite les fonctions du corps. D'une part, fanté & gaieté adreffe & vigueur, propreté mâle, & graces foutenues; de l'autre, connoiffances étendues & jugement ferme, religion fage & fentimens nobles, bonté vraie & politeffe aifee... Voilà où il faut diriger fes vues & fes foins; ouvrage grand, d'un détail long & pé. nible, où fouvent l'on veut plus qu'on ne peut, parce que les fujets s'y refufent, où il est toujours permis d'efpérer, & quelquefois très-injufte de prétendre : mais quand on trouve des difpofitions favorables, méthode fait tout: l'on feme à propos, l'on cultive avec patience; le tems amene les fruits.

la

On formera le corps par un régime modéré, & des exercices convenables. Les alimens fimples font les corps fains; le mouvement & le grand air les rendent vigoureux; & l'adreffe acquife, en donnant un air d'agilité & d'élégance, augmente la force, ou y fupplée. Les hommes font trop mous, parce qu'on éle

ve trop délicatement les enfans. L'expérience devroit corriger; & l'on s'obftine contre l'expérience. Pourquoi autrefois la Nobleffe étoit-elle plus robufte qu'au jourd'hui ? Elle vivoit à la campagne, dormoit la nuit, chaffoit le jour au Soleil & à la pluie, se baignoit fouvent, & mangeoit beaucoup; non à force de ragoûts, qui brûlent le fang, & émouent les organes, mais de fatigue, & à force d'appétit. Pourquoi les pay fans font-ils moins fluxionaires, moins cacochymes que les habitans des Villes? Ils vont mal vêtus, fouvent nuds pieds, s'enferment peu, travaillent fort, & digerent bien leur malheur n'eft que d'être trop pauvres. Pourquoi dans les Villes mêmes les enfans des petits font-ils plus forts, plus adroits, plus alertes que ceux des grands? Ils fe donnent plus de mouvement; ils s'exercent. Ce n'eft pas de s'échauffer, qui eft à craindre; il faut agir & transpirer, pour diffoudre les humeurs, & fortifier les fibres; mais de fe refroidir, quand on a chaud; & l'on peut y obvier. Endurcir la peau à tous les tems; affouplir les mufcles à tous les exercices; accoutumer l'eftomac à tous les mêts fimples; voilà ce qui donnera aux enfans. une fanté ferme; & c'eft ce que les peres négligent, & ce que les meres n'entendent point. Les études rendent l'éducation affez fédentaire; il faut les couper par des délaffemens actifs. Le corps ne peut être fans fe mouvoir, non plus que l'ame fans penfer.

On formera l'ame à force de bons exemples & d'infiructions ménagées: il eft impoffible de féparer ces deux chofes. La conduite des hommes, & encore plus des enfans, va naturellement par imitation. Il eft plus commode de faire comme les autres, que d'examiner s'ils font bien; & plus ils ont d'autorité, plus on eft tenté de les fuivre. Un caractere heureux fe pervertira parmi des méchans, ou fera, au moins, femblant de leur reffembler; ce qui eft une lâcheté honteuse.

Et un efprit bas ou méchant, qui ne verroit que de la groffiereté & des vertus, s'il ne pouvoit changer, fe. contraindroit à les contrefaire; & c'est quelque chofe pour la fociété. L'exemple domeftique eft donc la premiere leçon, & la plus puiffante fur un jeune cœur. Mais cet enfant fera homme; il est destiné à marcher feul, & peut-être à conduire les autres : il lui faut des principes à l'épreuve des circonftances. Or, un difcernement éclairé eft le meilleur guide de l'ame. Les paffions font moins de mal que la nonchalance, la fottife & l'erreur.

L'étude eft donc le grand point: & tout doit étre étude. Mais que ce mot n'effarouche pas; toute étude peut être une occupation douce, animée par le plaifir, ou par la gloire. La gêne eft, fans doute, une des premieres chofes qu'on doive apprendre ; parce qu'il n'eft ni rang ni état dans la vie où il ne faille fe gêner: mais c'est une extrémité terrible que l'on en foit réduit à pouffer la gêne jufqu'au tourment. C'eft le cas de ces malheureux que l'on écrafe par la rigueur des Loix, parce qu'on défefpere de les corriger. Les moyens durs & violens ne peuvene étre admis que quand tous les autres ont été éprouvés en vain, & qu'il n'y a qu'un feul parti à prendre.

L'étude eft le grand point: mais l'étude n'eft qu'un travail illufoire & ftérile, fi elle n'eft dirigée par un favoir plus judicieux que profond, adoucie par une patience attentive, foutenue par les appas de l'émulation, &, ce qui eft bien important, toujours affortie aux facultés actuelles des fujets; car il y a differentes fortes d'études, comme il y a différentes fortes de connoiffances: les confondre, ou fe méprendre à la valeur de chacune, ce feroit s'égarer dès le premier pas. Il faut donc voir d'abord ce que l'homme peut favoir, pour examiner enfuite ce que l'éducation doit lui apprendre.

TABLEAV

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