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,, l'incertitude de la conduite qu'il devoit tenir à l'égard d'un corps refpectable. La douceur & la vigueur font également ,, dangereufes; & il fe déterminoit pour les partis de vigueur, lorfqu'il fut atta,, qué de la maladie dont il mourut".

Souhaitons pour le bien de l'humanité que ce projet fi utile fe réveille, qu'il ne trouve plus d'obftacles dans les intérêts particuliers, & que ceux qui exercent un art fi néceffaire, concourent d'un commun accord à le rendre le moins dangereux qu'il eft poffible. Il ne le fera encore que trop, même après la réunion des lumieres de tous ceux qui l'ont le mieux exercé; que ferace fi l'on s'oppofé aux effets falutaires cette réunion produiroit infailliblement?

que

Puifqu'il eft queftion de ce fujet impor tant, je crois pouvoir parler ici d'un autre fouhait dont l'exécution feroit fort à dési. rer. Il manque, ce me femble, deux ou, vrages à la Médecine; l'un, Médecine préfervative, qui enfeigneroit le régime qu'il faut fuivre pour fe préferver des maladies, dont on peut être menacé, ou par fa con ftitution, ou par fa faute; l'autre, Médecine negative, qui enfeigneroit ce qu'il faut nepoint faire quand on eft attaqué de telle ou telle maladie, les alimens & les chofes dont cette maladie exige qu'on s'abftienne. L'au

Fois plus de foi à un pareil livre qu'à tous ces recueils de remedes, ordonnés par des Médecins qui n'y croient pas (ou qui n'y croient que par bénéfice d'inventaire) & adoptés par des malades impatiens, qui après avoir forcé & dérangé la nature, veulent enfuite précipiter fon opération dans le réta bliffement de l'economie animale. Quand nous n'aurions pas le malheur d'être convaincus trop fouvent par notre propre expérience du danger de toute cette pharmacie, il fuffiroit, pour nous convaincre au moins de fon peu d'utilité, de confulter féparément des Médecins reconnus pour habiles, fur les remedes dont on doit ufer dans telle ou telle maladie. Il eft affez rare qu'ils ne prefcrivent pas des remedes différens, & fouvent oppofés. Il n'est pas rare même, & je pourrois en citer des exemples dont j'ai été témoin, de voir des Médecins, réputés habiles dans la connoisfance des médicamens, fe tromper grofliérement fur la nature de la maladie dont on eft attaqué, ordonner en conféquence les remedes que prefcrit la Médecine pour la maladie qu'ils fuppofent, & guérir par ces remedes la maladie qu'on avoit réellement; effet merveilleux de la Pharmacie, & qui prouve à quel point les effets en font certains & déterminés. Auffi les plus habiles

& les plus éclairés de nos Médecins fontils de toute cette Pharmacie le cas & l'ufage qu'elle mérite; c'eft fans doute en ce fens qu'on a dit & avec grande raifon que le Médecin le plus digne d'être confulté, étoit celui qui croyoit le moins à la Médecine.

Et comment les Médecins s'accorderoient-ils fur les remedes? Ils ne s'accordent pas fur les faits les plus importans; par exemple fur la queftion, fi on peut a voir deux fois la petite vérole (f), & fur beaucoup d'autres femblables ? Mais en voilà affez fur l'incertitude de cet art ou de cette science, comme on voudra l'appeller.

Si l'art de conjecturer eft la reffource prefque unique de la Médecine, malgré l'importance de l'objet, cet art eft fouvent forcé de s'exercer en Jurifprudence fur des fujets qui ne font guere moins intéreffans, la fortune, l'honneur, l'état, la liberté & quelquefois même la vie des hommes. Cette fcience a pourtant un avantage que la Médecine a rarement, celui d'avoir des principes fixes & décidés, quoique fou vent arbitraires dans leur inftitution. Ces

(f) Voyez plus bas l'Ecrit fur l'application du calcul des grobabilités à l'inoculation.

principes font les lois de chaque état, qui ne peuvent être changées que par une volonté expreffe de ceux qui gouvernent. En Médecine, les deux chofes qu'il importe de connoitre font fouvent incertaines

l'une & l'autre, le mal & le remede; en Jurifprudence le remede est toujours donné par la loi, le genre du mal feul peut être équivoque. L'art de conjecturer fe réduit donc à bien déterminer ce qui tombe dans le cas de la loi: il y a même des Etats, & ce ne font pas les moins fages, où cette queftion eft la feule fur laquelle les Juges prononcent; c'eft la loi qui ordonne le refte, & qui fait l'arrêt.

Le Juge peut rencontrer deux efpeces. de difficultés à fixer ce qui tombe dans le cas de la loi; en premier lieu l'infuffifance des preuves; & en fecond lieu, lors mê me que les preuves font incontestables, la différence réelle ou apparente du cas pro pofé à ceux que la loi a expreffément prévus: car il est évident qu'elle ne fauroit tout prévoir. Quelquefois même les deux difficultés fe réuniffent, & la décision en devient encore plus épineufe. Mais fi leJuge n'eft que trop fouvent obligé d'avoir recours à la conjecture, au moins doit-il être d'autant plus réfervé dans l'ufage qu'il en fait, que l'objet eft plus important,

fur-tout quand il s'agit de l'honneur & de la vie des hommes. J'avouerai à cette occafion que deux chofes m'ont toujours fait peine dans nos lois criminelles fran çoifes. La premiere, qu'il ne faille que deux témoins pour condamner à mort un accufé; cette loi fuppofe, ce me femble, qu'on honnête homme ne peut jamais avoir deux ennemis (g). La feconde, que pour infliger la peine de mort, la pluralité de deux voix feulement foit fuffifante: une pluralité fi peu confidérable n'eft-elle pas une preuve que le crime n'eft pas avé ré? & peut-on fe réfoudre à priver un homme de la vie, quand fon crime n'est pas auffi clair que le jour? Les auteurs d'une Jurifprudence fi févere, auroientils pris pour principe, qu'il eft moins dangereux de punir un innocent que d'épargner un coupable? Principe dont la morale des Etats peut s'accommoder quelquefois, mais qui répugne à la nature, dont la loi parloit aux hommes avant qu'il y eut des Etats.

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Il faut pourtant convenir que malgré cet inconvénient de nos lois, peut-être iné

(g) On prétend que cette loi eft fondée fur le paffage de PEvangile, in ore duorum aut trium teftium ftabit omne ver bum; je fuis perfuadé, pour l'honneur de ceux qui ont préfidé à nos lois, qu'ils n'ont jamais eu en vue cette applica tion fi. forcée,

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