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S. III.

Eclairciffemens fur ce qui a été dit à la page 35 & 36, concernant les vérités appellés principes.

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Ous avons dit que les vérités que dans chaque fcience on appelle principes, & qu'on regarde comme la bafe des vérités de détail, ne font peut-être ellesmêmes que des conféquences fort éloignées d'autres principes plus généraux que leur fublimité dérobe à nos regards. En effet tous les principes de nos connoiffances, en Phyfique, par exemple, font les propriétés les plus fenfibles que l'obfervation nous découvre dans la matiere; propriétés qui tiennent elles-mêmes à l'effence, & fi je puis m'exprimer ainfi, à la constitution intime de la matiere que nous ne connoisfons nullement, & que nous ne parviendrons jamais à connoître. Les principes de nos connoiffances, en Métaphyfique, font auffi des obfervations fur la maniere dont notre ame conçoit ou dont elle est affectée; obfervations qui tiennent de méme à la nature encore plus ignorée, s'il est poffible, de ce qui penfe & de ce qui fent

en nous. Enfin les principes de la Morale, principes uniquement faits pour les hommes, & non pour les animaux, tiennent à une différence entre l'homme & la brute, que nous connoiffons bien par le fait, mais dont le principe philofophique nous eft inconnu. Nous ne favons, fi je puis m'exprimer de la forte, ni le pourquci ni le comment de rien; c'est néanmoins à ce comment, à ce pourquoi, que nos connoiffances devroient remonter, pour s'élever jufqu'aux vrais principes de toutes les vérités, foit pratiques, foit fpéculatives. Pourquoi y a-t-il quelque chofe? demandoit un Roi des Indes à un Miffionnaire Danois, qui dut fentir par cette queftion combien ce Prince étoit loin encore des vérités que le Miffionnaire lui prêchoit. Pourquoi y at-il quelque chofe? Terrible queftion & dont les Philofophes eux-mêmes ne femblent pas, fi j'ofe parler de la forte, affez effrayés; tant elle eft propre, pour peu qu'ils l'envisagent dans toute fa profondeur, à les décourager dans leurs recherches. Athées & Théiftes, Dogmatiques & Pyrrhoniens, tous font forcés d'admettre au moins un feul être qui exifte, par conféquent un être qui ait exifté toujours, & tous fe perdent dans cet abyme immenfe. Si nous favions pourquoi il y a quelque cho

fe, nous ferions vraisemblablement bien avancés, pour réfoudre la queftion comment telle & telle chofe existe-t-elle ? Car vraisem blablement tout fe tient dans l'univers plus intimément encore que nous ne penfons; & fi nous favions ce premier pourquoi, ce pourquoi fi embaraffant pour nous, nous tiendrions le bout du fil qui forme le fyftême général des êtres, & nous n'aurions plus qu'à le développer, & pour ainsi dire, à le dérouler fans peine pour en connoître toutes les parties, au lieu d'en arracher, comme nous le faifons, quelques parcelles ifolées, qui nous laiffent dans une ignorance entiere fur le tout ensemble, & fur la vraie place qu'elles y occupent. Et ne nous flattons pas de pouvoir fortir de cette ignorance. Toutes les queftions qui ont rapport aux premiers principes des chofes, font auffi peu éclaircies depuis qu'il y a des Philofophes, qu'elles l'étoient avant qu'il y en eut; elles continueront tant qu'il y en aura, à être auffi vivement agitées que profondément obfcures. L'efprit humain, occupé depuis fi long-tems à chercher ces vérités premieres, tentant mille voies pour y parvenir, ne les trouvant pas, & fe fatiguant en pure perte à tourner ainfi fur lui-même, reffemble à un criminel enfermé dans un réduit ténébreux, tour

nant inutilement de tous côtés pour trouver une iffue, & tous au plus entrevoyant une foible lumiere par quelques fentes étroites & tortueufes qu'il s'efforce en vain d'aggrandir. S'il y a dans ces ténebres quelques objets difperfés çà & là qu'il nous foit poffible d'atteindre, ce n'eft qu'à tâtons, & par conféquent affez imparfaitement, que nous pouvons les connoître : encore ne faut-il nous en approcher que pas à pas, & avec une fage & timide circonfpection; en nous précipitant fur ces objets nous rifquerions d'en être bleffés, & de ne les connoître que par le mal qu'il nous feroient fentir. Sadi raconte que quelqu'un demanda au fage Lockman à qui il devoit fa fageffe; aux aveugles, répondit ce Philofophe Indien, qui ne pofent le pied en aucun endroit fans s'être affurés de la folidité du fol.

S. IV.

S. IV.

Eclairciffemens fur ce qui a été dit, à la page 35 & 36, concernant les principes du fecond ordre, comparés à ceux que j'appelle premiers principes (a).

A

FIN de donner une idée nette de ce que j'appelle en matiere de sciences premiers principes, & de ce que j'appelle principes du fecond ordre, je prendrai pour exemple la fcience la plus féconde en vérités, & en vérités qui tiennent les unes aux autres, la Géométrie. J'ai déjà dit ailleurs (b) que les élémens de cette fcience étoient fondés fur. deux principes, celui de la fuperpofition, & celui de la mesure des angles par les arcs de cercle décrits du fommet de ces angles. En effet ces deux principes font la base de tout ce qu'on peut établir fur l'égalité, ou l'inégalité, ou en géné ral le rapport des parties de l'étendue fi gurée; & ce rapport eft, comme l'on fait, Funique objet des élémens de Géométrie. Or je remarque d'abord, que de ces deux

(4) Ceux qui ne font pas initiés dans la Géométrie, doivent paffer ce paragraphe.

(6) Elémens de Philofophie, p. 162,

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