صور الصفحة
PDF
النشر الإلكتروني

E

nom de Shakspeare et de Molière, s'ils étaient citoyens. L'Assemblée n'osa leur répondre.

A propos des protestants, elle rendit aux non catholiques l'accès des emplois civils.

Les protestants rentrèrent après plus d'un siècle d'exil. Rabaut-Saint-Étienne, fils du vieux docteur des Cévennes, de ce martyr de la foi qui passa cinquante ans à errer proscrit dans les bois, sans autre tcit que la pierre des cavernes ou les feuilles des arbres, rentra lors de ce rappel.

Élu membre de l'Assemblée nationale, puis nommé président de cette même assemblée, il écrivit à son père, octogénaire : « Mon père, le président de l'Assemblée nationale est à vos pieds. »

Ainsi tout reprenait sa place ou allait la reprendre; ainsi les injustices s'effaçaient peu à peu; ainsi l'aube du XIXe siècle commençait à Juire.

Cependant, trébuchant à ces premiers pas qu'elle faisait dans le crépuscule, de temps en temps l'Assemblée tombait dans quelque grave erreur.

Ainsi elle fixe des conditions à l'électorat et à l'éligibilité. Elle décrète que, pour voter aux assemblées primaires et de canton, il faudra être âgé de vingt-cinq ans accomplis, domicilié dans le canton au moins depuis un an, payer une contribution directe de la valeur de trois journées de travail, n'être pas en état de domesticité et être inscrit au rôle de la garde nationale.

IT

Ceux qui réuniront toutes ces conditions seront appelés citoyens actifs.

[ocr errors][merged small]

Ceux qui ne les réuniront pas seront appelés citoyens passifs.

Ce n'est pas tout.

Pour être éligible, il faut d'autres conditions encore que pour être électeur.

Pour être éligible aux assemblées électorales et aux administrations du département et du district, il faut payer une contribution directe de la valeur de dix journées de travail.

Pour être éligible à l'Assemblée nationale, il faut payer un marc d'argent, et, de plus, être propriétaire foncier.

C'était encore de la réaction.

A l'Assemblée nationale, Robespierre et Grégoire soutinrent avec chaleur la cause du peuple.

Les hommes, et non la propriété, sont l'objet de la représentation nationale, dit Robespierre; il ne faut pas considérer les biens, mais les qualités personnelles; la confiance du peuple doit être le seul, le véritable titre à consulter.

-

Substituez la confiance au marc d'argent! ajouta Prieur (de la Marne).

Et, comme le clergé avait appuyé la loi, Camille Des-. moulins s'écrie:

« O prêtres misérables! 6 bonzes fourbes et stupides! ne voyez-vous pas que votre Dieu n'était pas éligible, et que vous venez de reléguer Jésus-Christ parmi la canaille? »

Le marc d argent fut attaqué non-seulement à la tri

bune, non-seulement par les journalistes, mais encore par des caricatures et par ces chansons. On fit le portrait d'un futur député, dont un marc d'argent remplaçait la tête, et au-dessous l'on écrivit les deux vers de Boileau :

Et souvent tel y vient qui sait pour tout secret:
Cinq et quatre font neuf; ôtez deux, reste sept.

Une autre caricature, intitulée la Romaine aristocratique, portait cette légende ou plutôt se carrait au-dessus de ce quatrain:

Le marc d'argent préside en France :
Esprit, talents! dons superflus.
Au diable vertus sans finances!
Beaucoup d'appelés, peu d'élus,

Le 3 novembre, l'Assemblée, pour se repopulariser, décrète que les biens du clergé sont mis à la disposition de la nation. Ce qu'il y a de cu. ieux, c'est que, dès le 10 octobre, la question est posée à l'évêque d'Autun, qui, ainsi que le dit Michelet, se hasarde sur ce terrain glissant et rompt la glace d'un pied boiteux en disant que le clergé n'était pas propriétaire comme les autres propriétaires.

Il est assez curieux que le décret qui dépouille le clergé de ses biens soit daté de l'archevêché.

Le même jour, l'Assemblée nationale décide que, jusqu'à l'époque où elle réglera définitivement l'organisation

du pouvoir judiciaire, les parlements resteront en va

cance.

Et voilà les parlements suspendus.

Nous les avons enterrés tout vifs, dit Lameth après la séance.

Deux caricatures sortirent de ces deux décisions. L'une représentait l'enterrement du très-haut, très-puissant et très-magnifique seigneur Clergé, décédé en la salle de l'Assemblée nationale, le jour des Morts 1789.

« Son corps, disait la lettre de faire part, sera porté au trésor royal, en caisse nationale, par MM. de Mirabeau, Thouret, Chapelier et Alexandre de Lameth.

» Il passera devant la Bourse et la Caisse d'escompte, qui lui jetteront de l'eau bénite.

» L'abbé Sieyes et M. l'abbé Maury suivront le deuil en grandes pleureuses. M. l'abbé de Montesquiou prononcera l'oraison funèbre. Un De profundis sera chanté en faux bourdon par les dames de l'Opéra, revêtues de l'habit de

veuve.

» Enfin le deuil se rendra chez M. Necker, où les créanciers de l'État seront invités à se trouver. »

Quant à la caricature relative aux parlementaires, elle représentait ceux-ci fuyant dans toutes les directions, en butte à un vent de bise qui leur enlevait leurs perruques.

Il fait un vent à décorner des bœufs, disait un passant.

Enfin, le 9 novembre, le local étant achevé, les députés prirent possession de la salle du Manége.

Le lendemain, on lisait à tous les coins de rue l'affiche suivante :

Le Pétulant.

L'Ombrageux.
La Rusée.

La Cabreuse.

La Nonchalante.
La Terrible.
L'Inconstant.
Le Rétif.
Le Mignon.
L'intrépide.
Le Joyeux.
Le Rhinocéros.
La Somnambule.

L'Impayable.
Le Foudroyant.

L'Heureux.

L'Indocile.

Le Bon. L'Intraitable.

Le Sûr.

Le Chancelant.

Le Beau.

Le Superbe. L'Étonnant.

[blocks in formation]

Le lendemain, un journal annonça la séance en ces ter

mes:

« Les grands comédiens de la salle du Manége donneront aujourd'hui le Roi dépouillé, ancienne pièce redemandée. » La seconde pièce sera l'Honnête Criminel, en deux ac

« السابقةمتابعة »