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de proscription, n'a-t-on pas voulu les diriger contre plusieurs députés, contre moi? Ne nous ont-ils pas dénoncés au peuple comme des traîtres? Heureusement, c'était en effet le peuple qui était là; les assassins étaient occupés ailleurs. »

Puis il s'écrie: « Périsse l'Assemblée nationale et sa mémoire, pourvu que la France soit libre!» (Les députés se lèvent par un mouvement unanime, en criant: Oui, oui, périsse notre mémoire, pourvu que la France soit libre! Les tribunes se lèvent en même temps, et répondent par des applaudissements réitérés aux mouvements de l'Assemblée.)

L'orateur continue : « Périsse l'Assemblée nationale et sa mémoire, si elle épargne un crime qui imprimerait une tache au nom français; si elle n'apprend aux nations de l'Europe qu'au sein même de l'anarchie momentanée où quelques brigands nous ont plongés, il est encore dans notre patrie quelques vertus publiques et qu'on y respecte l'humanité. »

Ce sont de belles paroles sans doute, mais plus déclamatoires que solides. L'Assemblée avait toléré bien des crimes. L'Europe n'a pas eu une haute idée de ses vertus publiques ni de son humanité.

L'orateur termine en demandant que les membres de la commune répondent sur leur tête de la sûreté de tous les prisonniers (1). Les applaudissements recommencent et se prolongent. L'Assemblée accepta la proposition; mais c'est le 2 septembre qu'il fallait le faire, et non le 17.

Péthion, qui était présent, vient humblement à la barre confesser son impuissance; il expose la situation honteuse qu'il a acceptée depuis longtemps. « Dans les moments de crise, dit-il, il importerait que les magistrats fussent les premiers avertis : eh bien! je le dis avec douleur, c'est toujours moi qu'on avertit le dernier.» (Mouvement d'indignation dans l'Assemblée.)

Santerre s'excuse aussi et promet de surveiller efficacement un reste d'aristocratie expirante: langage hypocrite comme celui de Péthion.

Enfin, un décret enjoignit à la municipalité de rendre compte de tous les mandats d'arrêt qu'elle avait décernés, de la quantité

(1) Moniteur, séance du 17 septembre 1792.

de personnes arrêtées et de la nature des délits dont elles sont prévenues (1).

Cette mesure tardive n'a plus de signification. L'Assemblée n'avait plus que trois jours devant elle pour faire place à la Convention. Avant de se séparer, elle consigna sa honte et son égoïsme dans une proclamation adressée au peuple français, où, après avoir exprimé sa juste horreur « d'un système d'assassinats et de désordres qui souillerait la révolution et serait une tache ineffaçable au nom français, » elle excuse les crimes commis ou projetés, blâmant seulement ceux qu'on voudrait commettre contre les représentants.

<< Dans les temps d'insurrection, dit-elle, et lorsque le peuple se lève pour opposer à la tyrannie une résistance légitime, il peut quelquefois être entraîné par les hommes passionnés pour la liberté; il peut regarder l'activité des lois comme trop lente; mais l'idée d'attentats contre ses propres représentants ne pouvait être inspirée que par de véritables ennemis de la nation (2). »

Ainsi, on n'est ennemi de la nation qu'autant qu'on attente aux jours de ses représentants. Dans ces paroles se trouve le portrait de l'Assemblée; il n'est pas besoin d'en faire un autre.

Les nouveaux massacres projetés par la commune n'eurent pas lieu; un cri général d'horreur les a empêchés. Mais la pensée exterminatrice resta dans le cœur des promoteurs de septembre et va s'exécuter par le tribunal révolutionnaire et des représentants en mission. La mort de Louis XVI, celle de sa famille presque entière, l'exécution de tant d'autres victimes, ne sont qu'une continuation des massacres de septembre. Mais Dieu, dans sa juste colère, attend les auteurs de tant de crimes. Pour les punir, il les abandonnera à leur propre fureur, et ils s'extermineront les uns les autres, pour s'ensevelir dans la même fosse où ils avaient précipité tant d'innocentes victimes.

(1) Moniteur, séance du 17 septembre 1792.

(2) Ibi., séance du 22 septembre 1792.

LIVRE VINGT ET UNIÈME.

Départ des prêtres pour les pays étrangers.

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dangers qu'ils courent. - Leur réception à l'étranger.

envers eux.

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En - Leur réception à Bologne, à Ferrare, à Ravenne, etc. Espagne. En Portugal.-Dans les Pays-Bas. - En Suisse.-En Angleterre. Générosité des habitants de Jersey. Empressement des Anglais à recevoir les prêtres persécutés. Part des femmes dans cette œuvre de charité. Madame de Silhburne. Soins de M. de la Marche. Témoignage de

Burke en faveur des prêtres français.

française.

un million.

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Son jugement sur le clergé constitutionnel. Sa célèbre discussion avec Fox sur les résultats de la révolution Souscription ouverte en faveur des prêtres français, rapportant Quêtes faites dans les paroisses, produisant autant. tion faite à des religieuses. - Secours annuels accordés par le parlement aux prêtres français. Dons particuliers. Communauté de Manchester. L'abbé Carron et ses établissements. - Erection de chapelles catholiques. Reconnaissance des prêtres français. — Honorable conduite du clergé français. Mission faite aux prisonniers français. Secours accordés aux prêtres transportés à la Guyane. Éclatant Retraite donnée aux ecclésiastiques. témoignage rendu aux prêtres français par le ministre Pitt. Ce témoignage, d'accord avec celui de l'Europe entière. Vues providentielles dans l'émigration du clergé français.

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Les événements de Paris avaient réveillé les ecclésiastiques qui tardaient à se mettre en route pour obéir à la loi de déportation. Les catholiques qui les avaient retenus jusqu'alors, dans l'espérance d'un meilleur avenir, voyaient qu'il ne leur était plus possible de rester en France, où la moindre effervescence populaire pouvait les faire égorger sous leurs yeux. Ils les engagèrent donc eux-mêmes à partir, et se cotisèrent entre eux, du moins dans bien des endroits, pour fournir le nécessaire à ceux qui n'avaient pas de quoi payer les frais de voyage. Le moment était bien triste pour les uns et les autres. Les fidèles perdaient

leurs pasteurs en qui ils avaient confiance; ceux-ci allaient quitter parents et amis pour se transporter en pays étranger, où ils ne savaient pas comment exister. Mais il fallait se résoudre à la séparation, quelque pénible qu'elle fût; le danger pressait de tous côtés. Les ecclésiastiques en eurent des preuves au moment de leur départ; car les révolutionnaires n'avaient pas encore renoncé à leur criminel projet de les exterminer tous, ne se souciant pas de les voir en pays étranger, où ils prévoyaient bien qu'ils ne feraient pas leur éloge. L'exécution de cette sanguinaire mesure était confiée aux commissaires de la commune envoyés dans les départements. Ceux-ci n'ayant pas trouvé accès auprès des autorités administratives pour l'exécution de leurs criminels projets, s'adressèrent au peuple, qu'ils excitèrent de nouveau contre les prêtres; et si la majeure partie n'a pas péri en France, elle le doit à une protection spéciale de Dieu.

Il fallait d'abord, pour sortir de France, être muni d'un passeport. Or, sur ce passe-port on avait bien soin d'exprimer la qualité de l'individu, la cause de sa déportation, c'est-à-dire tout ce qui pouvait le rendre odieux au peuple et exciter sa fureur. Pour obtenir ce passe-port, il fallait attendre, donner des explications, obtenir des audiences. On différait de le livrer tant qu'on pouvait, du moins à Paris et dans bien d'autres localités, dans l'espérance qu'un nouveau bouleversement à Paris susciterait un massacre général en province. Ce bouleversement n'ayant pas eu lieu, il fallait bien donner les passe-ports. Mais que de nouvelles difficultés suscitées aux prêtres avant leur arrivée à la frontière! L'action des commissaires de Paris se faisait sentir partout. Dans bien des endroits, les ecclésiastiques en marche pour obéir à la loi furent poursuivis, chargés d'outrages, frappés, volés, assassinés. En Normandie, quatre ecclésiastiques se rendant au Havre furent arrêtés en route. On leur demanda d'abord leur passe-port, et puis le serment. Ils eurent beau répondre que c'était pour avoir refusé ce serment qu'ils étaient exilés, deux d'entre eux furent assommés, les deux autres jetés dans la rivière, où ils périrent au milieu des flots. Trois autres ecclésiastiques furent égorgés près du même village (1). Dans d'autres endroits, ils sont massacrés au moment où ils

(1) Barruel, Hist. du Clergé, t. II, p. 185.

se présentent pour obtenir leur passe-port (1). Si, sur d'autres points de la France, ils parviennent à avoir leurs papiers et à s'embarquer, ils sont menacés sur leurs vaisseaux, qu'on cherche à couler à fond avec du canon. C'est ce qui est arrivé dans plusieurs ports du Midi. Des ecclésiastiques, forcés par la tempête à rentrer au port de Toulon, furent renfermés dans la cale. Ce ne fut qu'au bout de trois jours qu'on leur permit de respirer et de partir; mais on eut soin de les fouiller et de prendre leur argent; on ne leur laissa à chacun que dix écus, pour la terre étrangère où ils allaient se retirer (2).

Les brigands de Toulon, en laissant à chaque prêtre dix écus, étaient généreux en comparaison de ce qui se passait ailleurs. Le 19 septembre, cinquante-six prêtres des diocèses d'Uzès et d'Avignon sortaient du canal d'Aigues-Mortes sur le bâtiment de l'armateur Pesqui. A onze heures du soir, ils sont abordés par deux chaloupes que montaient des brigands armés de fusils, de sabres, de tridents. Ils fouillent et refouillent les prêtres, ne leur laissant ni une obole, ni le moindre linge. Ils n'étaient pas encore contents; car le lendemain, au lever de l'aurore, ils reviennent attaquer le vaisseau à coups de hache, dans le but de le faire couler. L'armateur à qui appartenait le vaisseau eut beaucoup de peine à empêcher l'exécution de ce projet homicide (3).

Les prêtres ne sont en sûreté nulle part; ils ont à vaincre mille difficultés pour se rendre aux frontières. Leur condition est pire que celle des malfaiteurs, qui étaient alors honorés et regardés comme de bons patriotes. Ils sont obligés de marcher la nuit, d'éviter certaines villes et certains cantons où la fureur révolutionnaire avait été exaltée par la lettre circulaire de la commune de Paris. Le département de la Côte-d'Or avait, sous ce rapport, une bien mauvaise réputation : le traverser sans être immolé passait pour une espèce de prodige (4).

Trente-sept ecclésiastiques partis de Chartres sont conduits à Dreux par des guides perfides. A peine y sont-ils arrivés, qu'ils entendent des menaces de mort: Les voici! criait la populace; nous les tenons, ils n'échapperont pas. Ils auraient infailliblement

(1) Barruel, Hist. du Clergé, t. II, p. 183. — (2) Id., ibid., p. 188.

(3) Id., ibid., p. 189.

(4) Id., ibid., p. 189.

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