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ecclésiastiques; il supportait comme eux les huées de la multitude, qui s'adressaient plus particulièrement à lui; souffrait le froid et le chaud, pendant qu'on attendait pour l'appel et l'administrateur civil avait bien soin de l'appeler Hercé, tout court. La patience des confesseurs de la foi lassait les révolutionnaires. M. de Hercé portait toujours sa croix pectorale, marque de sa dignité; les meneurs de la multitude chargèrent une fille publique de la lui arracher; mais les ecclésiastiques qui accompagnaient le prélat ayant été avertis de ce projet, la repoussèrent au premier mouvement qu'elle fit pour l'exécuter : c'est la seule circonstance où ils aient repoussé la violence. Nombre de fois les citoyens honnêtes de Laval offrirent à M. de Hercé, et à ses généreux compagnons, de mettre un terme aux huées et aux injures dont ils étaient journellement abreuvés; mais ils reçurent un refus formel: les confesseurs ne voulaient pas perdre le mérite de leur captivité. «< Laissez-les, disaient-ils; ils ne savent pas le plaisir qu'ils nous font, d'ajouter au mérite de confesseurs de notre foi ! » Rien n'était plus édifiant que la docilité de cet évêque, se rendant tous les jours à l'appel pour s'entendre nommer Hercé. Il était au milieu de ces prêtres comme un père; chaque fois qu'il venait à l'appel, deux cents ecclésiastiques se détachaient pour aller au-devant de lui, ou l'attendaient pour lui faire cortége. Et ce sont ces prêtres qu'on accuse de révolte, de tentatives de troubles! Leur conduite édifiante à Laval répondait d'une manière péremptoire à ces sortes d'accusations.

A côté d'eux était un clergé bien différent; car le nouveau siége de Laval était occupé par un évêque

constitutionnel, nommé Villar, né à Toulouse, et ancien recteur du collége de la Flèche. Il s'était fait sacrer à Paris le 22 mai 1790, et avait pris des grands vicaires dignes de lui. La présence des prêtres fidèles n'était pas faite pour lui attirer des prosélytes. Un de ses vicaires généraux avait beau dire et répéter en chaire que les prêtres non assermentés étaient des sujets dangereux, et les rois des tyrans, les habitants de Laval n'en restèrent pas moins attachés à leurs principes. Villar et les vicaires généraux voulurent se faire des prosélytes au moyen de la violence; quatre cents brigands, excités par les clubs et le clergé constitutionnel, fondirent un jour, dès cinq heures du matin, sur le couvent des Ursulines, et poursuivirent, le sabre à la main, les religieuses, qui se sauvèrent chez les Bénédictines. L'évêque intrus s'y rendit, et dit à ces religieuses effrayées qu'il ne voulait qu'être reconnu par elles : à ce prix, il les assurait de sa protection. Mais la supérieure du couvent lui répondit avec fermeté que les religieuses ne quitteraient jamais la véritable Église pour la sienne. Une compagnie de la garde nationale, qui avait contribué à l'émeute, était prête à se porter aux derniers excès; mais Villar, qui était doux et timide de caractère, n'osa pas pousser les choses plus loin. << Il serait odieux, dit-il au capitaine, cabaretier du lieu, de tourmenter ainsi des personnes pour leur religion et la conscience. » Le capitaine et ses compagnons étaient fort mécontents: Oh! le scélérat! s'écriaient-ils, c'est lui-même qui nous a conseillés et payés pour cela. Ce propos fit connaître le véritable instigateur du désordre (1).

(1) Barruel, Hist. du Clergé, t. I, p. 221.

Cependant les prêtres ne se pressaient pas tous de se soumettre à l'autorité arbitraire des directoires. Un grand nombre n'étaient point obligés de s'y conformer, n'étant pas encore remplacés. Les évêques intrus, malgré leurs efforts et l'empressement qu'ils avaient eu de recevoir sans distinction tous les prêtres jureurs, et d'admettre à l'ordination tous ceux qui se présentaient, quelle que fût d'ailleurs leur instruction ou leur moralité, n'avaient pas encore pu fournir des prêtres à toutes les paroisses. Les anciens pasteurs y restaient donc provisoirement, en vertu de la loi. Dans d'autres paroisses, les municipalités n'obéissaient pas aux directoires, et conservaient leurs anciens pasteurs. Dans les paroisses même envahies par les curés constitutionnels, les fidèles ne manquaient pas de secours spirituels. Des prêtres dévoués, pleins de zèle et de courage, soigneusement déguisés, restèrent cachés en divers lieux. Les fidèles, secrètement avertis, venaient à eux la nuit, ayant soin d'être en petit nombre pour ne pas se faire remarquer. Là, se jetant à leurs pieds et fondant en larmes, ils s'instruisaient, se consolaient, recevaient de leurs mains l'absolution et la sainte eucharistie avec une ferveur et une piété dignes de celles des premiers chrétiens (1).

Mais il était bien difficile, surtout à la campagne, de se tenir caché. Les curés constitutionnels, qui avaient juré la perte du clergé non assermenté, tenaient l'œil continuellement ouvert. Leurs affidés surveillaient les familles chrétiennes qu'on savait ne point négliger leurs devoirs religieux, et être déterminées plutôt à mou

(1) Barruel, Hist. du Clergé, t. I, p. 221.

́rir que d'adhérer au schisme. Sur le moindre soupçon d'un prêtre caché, on violait le domicile des particuliers, on y faisait les recherches les plus minutieuses, jusque dans les caves, les greniers à foin, où l'on enfonçait la baïonnette sans craindre de percer ceux qui pouvaient y être cachés. Sous prétexte de rechercher des armes, on faisait des expéditions à la campagne dans les châteaux; on fouillait partout, et quand on avait découvert un prêtre, on l'emmenait à la ville avec une espèce de triomphe et au milieu des cris sinistres de la populace. De cette sorte, bien des prêtres qui s'étaient dévoués au service des fidèles furent pris et enlevés. Douleur pour les fidèles, triomphe pour les révolutionnaires (1). Voilà le spectacle qu'on voyait dans toutes les parties de la France, et principalement dans les départements de l'ouest.

Celui du Finistère est toujours au premier rang quand il s'agit de persécutions. Il dirigea de nombreuses expéditions contre des communes paisibles qui avaient conservé leurs anciens pasteurs. La commune de Plouguin jouissait d'une parfaite tranquillité, lorsqu'un dimanche, au moment où l'on y chantait vêpres, arriva la force armée envoyée par le département. Les habitants s'étant opposés à la violence, une collision eut lieu. L'administration départementale condamna la commune aux frais de l'expédition, en informa l'Assemblée législative, attribuant aux prêtres réfractaires les troubles qu'elle avait causés (2).

Dans d'autres départements où les patriotes n'avaient

(1) Barruel, Hist. du Clergé, t. I, p. 204, 213.

(2) Tresvaux, Hist. de la Persécut. en Bretagne, t. I, p. 330.

pas obtenu ces dispositions tyranniques de la part des directoires, les municipalités agissaient à leur place. Le 13 février, un officier municipal de la ville de Lyon se présenta à la barre de l'Assemblée, se plaignant des obstacles que le directoire du département opposait sans cesse à la municipalité qui fermait les églises, enlevait et emprisonnait les prêtres et les dévotes. Il rapporta que le directoire avait déclaré vexatoires les démarches des braves municipaux, qu'il les représentait comme l'instrument de la plus affreuse inquisition. Il s'éleva aussi contre le tribunal du district, qui s'était avisé de trouver innocents ceux que la municipalité avait arrêtés comme coupables. L'officier municipal reçut les compliments du président et les honneurs de la séance. Sa plainte fut envoyée à l'examen du comité. A. Auch, la municipalité était aussi en contradiction avec le directoire du département. Elle avait fait fermer les églises des couyents; le directoire s'y opposait, voulant maintenir la liberté des cultes, suivant la constitution. Les municipaux ont déposé alors l'écharpe; les perturbateurs impunis ont insulté, traîné par les cheveux, blessé les membres du directoire, qui avait décidé de transférer ses séances à Mirande (1).

Dans mille endroits les municipalités se constituaient en corps législatif, exerçant en même temps le pouvoir exécutif elles agissaient d'une manière arbitraire et absolue, sans suivre aucune loi. Dans le département de Vaucluse, les habitants des Viens entendaient la messe de leur ancien pasteur dans la chapelle du château. Le

(1) Moniteur, séance du 13 février 1792. (2) Moniteur, séance du 5 février 1792.

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