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peine d'amende; le salut du saint-sacrement est puni comme un crime. Ces faits paraissent incroyables; cependant ils ne sont malheureusement que trop vrais. Cinq départements entre autres, ceux de la Haute-Garonne, de la Loire-Inférieure, d'Ille-et-Vilaine, de Maine-et-Loire, de la Mayenne, nous en fournissent des exemples.

A Toulouse, on commença par les moines, dont on ferma les cloîtres, et à qui l'on défendit de porter leur costume. Un arrêté du département suivit de près, et éloigna tous les prêtres destitués à quatre lieues de leur domicile on les appela à Toulouse. Là, les réfugiés se consolaient avec les prêtres résidents; aussitôt un nouvel arrêté éloigna ceux-ci, et exila avec eux les religieux. Il fallait peu de chose pour être mis en prison. Au mois de février, on comptait à Toulouse plus de douze prêtres incarcérés à qui on offrit ensuite la liberté, moyennant une consignation de 3,000 livres (1).

Le directoire de Nantes donna le même ordre le 24 janvier; on dit que ce fut à l'instigation du clergé constitutionnel. Les prêtres qui s'y étaient rendus ou qu'on y avait emmenés de force faisaient des excursions dans les environs pour y exercer quelques fonctions du ministère, ce que les schismatiques ne pouvaient souffrir. Ceux-ci obtinrent du directoire un nouvel arrêté qui prescrivait aux prêtres catholiques de se présenter à l'appel nominal jusqu'à deux fois par jour, et de ne point s'écarter à plus d'une demi

(1) Nouveau compte rendu au Roi, p. 17.

lieue de la cathédrale, ce qui fut ponctuellement suivi (1).

Dans le département d'Ille-et-Vilaine, on leur prescrivit le serment civique, sous peine d'avoir la ville de Rennes pour prison. On leur donna quinze jours pour y réfléchir, après l'expiration desquels ils devaient se rendre au chef-lieu du département, s'ils ne l'avaient pas prêté. Tous se refusèrent à ce nouveau serment, qui ne différait guère du premier. Les quinze jours n'étaient pas encore expirés, et déjà les gendarmes étaient en route pour arrêter les généreux confesseurs de la foi. On les voyait arriver à Rennes sans argent, à peine vêtus; car on les avait enlevés avec tant de précipitation qu'ils n'avaient pas eu le temps de prendre leurs effets. Ils eurent la consolation d'être accueillis par des familles chrétiennes, pour lesquelles ils devinrent une espèce de providence; car les prêtres de la ville avaient été éloignés à trois lieues de distance, et ne pouvaient plus administrer les sacrements. Les nouveaux venus les remplaçaient auprès d'eux, et disaient la messe dans leurs maisons. Le but du clergé constitutionnel n'était pas atteint. En faisant éloigner les prêtres de leurs paroisses, ils avaient espéré leur interdire tout exercice du ministère et forcer les peuples à recourir à eux. Se voyant trompés dans leur attente, ils s'adressèrent aux clubistes, et par eux au directoire du département, pour demander l'incarcération de tous les prêtres réfractaires : c'était le seul moyen de les empêcher d'exercer leur ministère. Mais le directoire recula devant cette mesure d'iniquité. Il permit seulement à la municipa

(1) Tresvaux, Hist. de la Persécut. révol., t. I, p. 381.

lité de prendre des mesures répressives contre ceux des prêtres qui troubleraient l'ordre public. C'était assez, car tous ceux qui disaient la messe étaient censés troubler l'ordre public. Les dénonciations qu'on envoyait à l'Assemblée législative n'avaient pas d'autre fondement. La municipalité de Rennes eut l'infamie d'interdire la messe, sous peine d'une amende de 30 francs contre le prêtre et de 12 francs contre chaque assistant. De là de nombreuses visites inquisitoriales. Ceux qui étaient surpris, soit à dire la messe, soit à y assister, étaient obligés de payer l'amende. La ville de Rennes en offrit plusieurs exemples. Un jour on mit à l'amende de nombreux assistants au salut du saint sacrement. De plus, comme les prêtres avaient l'habitude de se réunir plusieurs ensemble, soit pour se promener, soit pour manger à la même table, le directoire, à l'instigation des clubs, fit l'arrêté sui

vant :

« Les prêtres réfractaires qui se réuniront, soit dans les rues, soit dans les maisons, au nombre de plus de trois, seront incarcérés. Tous les ecclésiastiques se présenteront deux fois par jour à l'hôtel de ville, le matin pour y inscrire leur nom, le soir pour y répondre à l'appel nominal. Les commissaires iront dans les maisons prendre les noms des infirmes et des malades (1). »

L'arrêté fut ponctuellement exécuté. Les prêtres furent obligés de se présenter deux fois par jour à l'hôtel de ville, où, sous le moindre prétexte, on les

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(1) Barruel, t. I, p. 230. Tresvaux, Hist. de la Perséc. révol., t. I, p. 355.

faisait attendre des heures entières; et ils ne s'y rendaient presque jamais sans être insultés dans la rue. Teile fut la position de deux cent cinquante prêtres pendant l'espace de quatre mois, au bout desquels, comme nous le verrons, ils furent mis en prison pour être transportés (1).

Même histoire à Angers. En vertu d'un arrêté du département, trois cents prêtres furent dirigés sur cette ville, et soumis à un appel nominal qui ne se faisait jamais sans les injures de la multitude. Ils restèrent dans cette position jusqu'au 17 juin, où ils furent tous incarcérés. Nous ne devons pas passer sous silence la belle conduite des habitants d'Angers lorsqu'ils virent arriver ces prêtres. Les familles chrétiennes se disputaient l'honneur de les avoir, de les loger dans leurs maisons, de les faire manger à leur table. Le nombre de trois cents ne les avait pas effrayées la charité chrétienne trouva des ressources pour tous (2).

:

Mais le plus beau trait de charité en ce genre appartient à la ville de Laval; il est digne d'être inscrit sur les murs de cette ville en lettres d'or : les premiers siècles du christianisme n'offrent pas de spectacle plus beau. La religion avait conservé dans cette ville, alors de dix mille âmes, malgré les efforts des révolutionnaires, de profondes racines : le clergé y était trèsnombreux, et avait vu peu de défections dans ses rangs.

Le directoire du département (Mayenne) porta, en date du 23 mars, un arrêté ordonnant à tous les prêtres

(1) Tresvaux, Hist. de la Persécut. révol. en Bretagne, t. I, p. 354.

(2) Barruel, Hist. du Clergé, t. I, p. 201.

non assermentés de son ressort de se rendre à Laval, chef-lieu, de s'y faire inscrire, de ne pas s'écarter de la ville à plus d'une heure de chemin; le tout sous peine d'être déclarés rebelles à la loi et conduits en prison. Cet arrêté fit arriver à Laval plus de quatre cents ecclésiastiques: Barruel dit six cents. L'évêque de Dol, M. de Hercé, qui avait été obligé de s'éloigner de sa ville épiscopale, s'était retiré dans la Mayenne au château de son frère; il était à dîner lorsqu'il apprit l'arrêté du département : sa famille, ses amis, le pressèrent de s'y soustraire. «< A Dieu ne plaise, répondit-il, que je laisse échapper une si belle occasion de confesser le nom de Jésus-Christ! Je dois l'exemple aux prêtres; je serai trop heureux de me voir à leur tête dans la captivité. » Il partit le même jour avec l'abbé de Hercé, son frère, et Desvaux-Ponts, ses vicaires généraux, ainsi que plusieurs autres ecclésiastiques, chanoines et dignitaires. Déjà le clergé était arrivé; la plupart étaient sans connaissances dans la ville; ils ne savaient où se loger leur embarras ne fut pas long. Les habitants de Laval ouvrirent leurs maisons à ces généreux confesseurs de la foi, et se firent une joie de partager leur table avec eux. Plus de trois cents de ces malheureux étaient sans ressources, réduits à l'indigence: des souscriptions, des quêtes abondantes, suppléèrent à tout; les catholiques de Laval ouvraient leur bourse comme ils avaient ouvert leur maison : leur zèle et leur charité étaient au delà de toute expression. Les courageux défenseurs de la foi eurent d'abord la ville pour prison; mais ils furent soumis à l'appel nominal, qui se faisait à dix heures du matin; personne n'en était dispensé. M. de Hercé s'y rendait exactement, à la tête des autres

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