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ses articles, les nouvelles lois fondamentales du gouvernement français.

« 1° La constitution ne soumet au serment que les hommes appelés à remplir quelque fonction publique. De quel droit veut-on nous l'imposer à nous? Tous les Français ne sont-ils pas égaux aux yeux de la loi? Et puisque la constitution ne nous regarde que comme citoyens, un serment libre pour les autres ne doit-il pas l'être pour nous?

« 2o L'Assemblée nationale n'a pas le droit de lancer une peine contre un individu quelconque. Elle n'est pas tribunal judiciaire, et la constitution lui défend de s'en arroger les fonctions. A-t-elle rendu une loi générale? Là finit son ministère; et c'est aux tribunaux à décerner la peine contre le citoyen convaincu et jugé. Mais jusque-là tous doivent vivre tranquilles, sous la sauvegarde des lois. Pourquoi les articles 4, 5 et 6 du décret nous enveloppent-ils donc d'avance dans un arrêt de proscription, et nous placent-ils entre un serment et l'exil, le cachot et la misère?

a 3o D'après la constitution, nul n'est censé coupable, et encore moins peut-il être privé de sa liberté, s'il n'est atteint et convaincu. Cependant le décret projeté nous déclare suspects, d'après notre seul refus de prestation de serment; coupables, à la seule annonce d'un trouble religieux quelconque, suscité dans le lieu de notre résidence. Où est la justice? disons mieux, où est ici la liberté? On a proscrit les lettres de cachet; nous en appelons, Sire, à votre jugement n'est-ce pas les renouveler sous des formes plus redoutables encore? Ah! si l'on veut nous priver de nos traitements comme titulaires, se débarrasser

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de notre présence comme prêtres fidèles, à quoi bon recourir à des prétextes? Qu'on prononce: on n'a pas besoin de ruser avec des ennemis qui n'ont pour armes que la prière, pour ambition que la paix, et pour maxime que la soumission, même à l'oppression,

« Pourquoi vouloir d'ailleurs nous traiter en ennemis? Nous, ennemis de la patrie! Ah! Sire, depuis le premier moment de notre ministère, nous sommes dévoués à ses besoins, nous inspirons le respect pour ses lois, nous faisons à ses enfants un devoir de verser leur sang pour elle. Nous, ennemis de la patrie! Non : la religion sainte que nous professons ne forina jamais de mauvais citoyens, et ses ministres ont prouvé qu'ils mettent le patriotisme au rang de leurs vertus.

« Mais d'où viennent donc les troubles religieux qui agitent la France? Nous osons le dire, ces troubles ne sont point l'ouvrage des prêtres fidèles; car, à travers cette nuée de dénonciations, pas une seule preuve, pas même une seule vraisemblance (1).

<«< Eh! comment inspirerions-nous la révolte, tandis que l'Évangile commande la soumission, même aux tyrans? Après tout, s'il existe parmi nous des délits, que les tribunaux les punissent; mais loin du règne de la liberté une loi qui confondrait l'innocent et le coupable! Mais non, ces délits n'existent pas; car, de bonne foi, peut-on nous faire un crime de ce que

(1) Cahier, ministre de l'intérieur, du parti des girondins, et par conséquent à l'abri de tout soupçon de partialité, dira le 18 février 1792, dans son rapport à l'Assemblée législative : « Je n'ai eu connaissance d'aucun prêtre puni par les tribunaux comme perturbateur du repos public, quoique certainement plusieurs aient subi des accusations. »

les catholiques sont attachés à la religion de leurs pères, de ce qu'ils se rappellent les services que nous leur avons rendus, de ce qu'ils pleurent sur notre destinée, que nous appellerions malheureuse, si la foi ne nous en faisait un sujet de gloire et d'espérance? Ah! qu'on interroge ces bons catholiques, qu'on voudrait faire passer pour ennemis de l'ordre parce qu'ils ne sont point ingrats; qu'on les interroge : ils répondront que nous leur prêchons la soumission à la volonté de Dieu, l'amour de la paix, la fidélité aux lois politiques de l'État, la circonspection, le support dans le commerce de la vie civile. Que pouvons-nous faire de mieux? Rien, sans doute; et nous sommes cependant suspects, condamnés, proscrits. Et pourquoi? Pour ramener la paix au sein de l'empire, tandis qu'il est un moyen si facile, qu'il suffit de le vouloir pour en ressentir, le jour même, les heureux effets. Oui, que tout citoyen jouisse de la liberté religieuse que lui assure la constitution; qu'on ne donne plus les armes à la main, aux catholiques, des ministres que leur conscience repousse; qu'on cesse toutes ces persécutions qui déshonoreraient une nation sauvage, et tout rentrera dans l'ordre. Mais qu'on profite du moment où les catholiques de toutes les parties de l'empire fuient les temples souillés par le schisme, cherchent au loin des pasteurs fidèles, préfèrent leur foi aux outrages, aux persécutions; d'un moment où la France, de toutes parts abandonnée comme une terre barbare, où les esprits même les plus calmes ne peuvent se garantir d'une certaine impression de lassitude ou de terreur; qu'on profite de ce moment pour renouveler la catastrophe d'un malheureux serment qui a déjà causé tant de

maux à la patrie, compromis si ouvertement l'intérêt même de la constitution: ce n'est pas vouloir gouverner en législateurs, mais vouloir dominer en despotes, et conséquemment faire marcher devant soi le trouble, la guerre civile, la désolation, la mort.

«< Aussi est-ce moins pour nous que pour notre malheureuse patrie que nous aimons, et que nous aimerions encore, quand même nous pourrions lui imputer nos malheurs, que nous portons nos réclamations au pied de vôtre trône. Ah! Sire, c'est ici ce même peuple dont on vous peint l'amour quand on veut vous consoler de vos peines. Il en est temps, prévenez sa ruine; car les justes opprimés ont dans le ciel un vengeur; et si la justice seule fait prospérer les empires, les lois iniques creusent l'abîme où ils vont tôt ou tard s'engloutir.

« Il nous resterait maintenant à fixer les yeux de Votre Majesté sur les desseins perfides du décret; mais la lecture seule du préambule vous le fera connaître. Vous y verrez qu'un voile de tolérance y cache le projet et les mesures d'une persécution atroce; que le législateur y est sans cesse en contradiction avec luimême, et avec les mesures que commande le besoin impérieux des circonstances. Vous y verrez les prêtres convertis indistinctement en factieux, leur culte en délits mystérieux, en complots; et lorsque vous apprendrez, par ce préambule lui-même, que le serment exigé est une étaie fournie à la saine raison et à l'opinion publique pour ouvrir les yeux des habitants des campagnes sur la perfidie intéressée de ceux qui veulent leur faire croire que les législateurs constitutionnels ont touché à la religion de leurs pères, vous comprendrez alors que, loin de vouloir mettre à l'aise

les consciences des prêtres non assermentés, on a voulu, au contraire, leur tendre un piége; que, loin de chercher à finir les guerres de religion, on s'est proposé de les rendre plus actives; en un mot, que tout le secret du décret est de favoriser une spéculation de finance, si les prêtres refusent le serment, ou la cause de l'irréligion et du schisme, s'ils se déterminent à le prêter. Mais non, notre foi triomphera encore une fois du monde; et si la loi nous conduit à l'exil ou même à l'échafaud, nous aurons du moins la consolation de pouvoir, la constitution française à la main, démontrer la tyrannie de nos persécuteurs (1). »

Après que la loi fut rendue, les évêques présents à Paris adressèrent un mémoire au roi, pour l'engager à refuser la sanction. Le roi y était d'autant mieux disposé, qu'il regrettait amèrement d'avoir sanctionné la loi du serment, surtout depuis qu'il a vu la manière dont on en abusait pour persécuter le clergé. La condamnation et les réprimandes qu'il avait reçues du pape à ce sujet étaient encore présentes à son esprit. Il avait d'ailleurs le cœur trop catholique pour souscrire à un décret qui tendait à arracher jusqu'à la dernière racine du catholicisme en France. Aussi, quand il eut lu le mémoire, il fit répondre aux évêques qu'ils pouvaient être tranquilles; que jamais il ne sanctionnerait ce décret (2). Ses ministres, qui étaient honnêtes et sensés, indignés de mesures si injustes contre le clergé et si opposées à la constitution et à l'esprit de liberté, partageaient à peu près son avis. Barnave et Lameth, que

(1) Le 19 novembre 1791.

(2) Mémoires de Bertrand de Molleville. Hist. parlem., t. VI, p. 181.

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