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a été faite, vous l'alimenterez de plus fort. » Mais il fut accueilli par des murmures. L'Assemblée montra, par cette conduite, qu'elle ne respectait plus aucune loi de l'ancienne discipline de l'Église (1). Ainsi, plus de discipline ecclésiastique; la loi la plus importante de cette discipline est enfreinte impunément, et déclarée contraire à la nature. Le clergé constitutionnel ne manquera pas de rétablir toute chose dans son ordre naturel; il y sera encouragé par l'exemple de plusieurs évêques. Et ce sont ces prêtres, ces évêques qui, d'après l'arrêté de la municipalité de Paris, devaient être les surveillants du clergé fidèle! Cela était révoltant; car on savait qu'ils étaient les ennemis mortels de l'Église catholique et de ses ministres; on savait qu'ils étaient les instigateurs secrets de tout ce qui se tramait contre eux. Jaloux de l'estime dont ils jouissaient et du monde qu'ils attiraient, ils faisaient tous leurs efforts pour les éloigner de leurs paroisses. Aussi, les mesures de proscription générale qu'on demandait à l'Assemblée étaient-elles, pour la plupart, provoquées par le clergé constitutionnel.

Le 17 octobre, une nouvelle discussion s'engagea au sujet des prêtres appelés réfractaires, à l'occasion de troubles causés à Montpellier par les fureurs du fanatisme. On les mit, bien entendu, sur le compte du clergé catholique, contre lequel on se permit les déclamations les plus véhémentes. Mais que voit-on quand on examine la dénonciation? Un peuple irrité de n'avoir pas la liberté de conscience accordée par la constitution. En effet, à Montpellier comme ailleurs,

(1) Moniteur, séance du 19 octobre 1791.

on n'entendait au milieu du tumulte qu'un seul cri : Liberté des cultes, ouverture des églises! c'est-à-dire ouverture des églises aux prêtres non jureurs. Voici comment le trouble a commencé, selon le rapport envoyé à l'Assemblée : Un prêtre non assermenté était entré dans une église pour y dire la messe, ce qui lui était permis selon la loi du 7 mai. Des catholiques, hommes et femmes, s'assemblèrent pour y assister. Trois jeunes gens crièrent au scandale; de là du tumulte, c'est-à-dire trois jeunes gens ont insulté les catholiques et troublé leur pieuse réunion. Ceux-ci n'auront pas voulu le souffrir; de là du trouble. Mais le prêtre en est-il la cause? Doit-on le punir plutôt que les trois jeunes gens qui en sont les auteurs? Était-on en droit, à cause de ce trouble, de demander, comme on l'a fait, des mesures de proscription générale? Cette plainte fut suivie de plusieurs autres non moins mal fondées. Un représentant rapporta que, dans la Haute-Loire, les prêtres assermentés étaient assassinés, mis en fuite; que les tribunaux étaient impuissants à les protéger et à réprimer les désordres, parce qu'on ne trouvait pas de témoins ce qui voulait dire que les prêtres constitutionnels n'étaient point tolérés dans leurs paroisses, que tout le monde les repoussait. Un autre représentant vint ajouter à ces accusations, en portant plainte contre l'insubordination des prêtres réfractaires dans le département des Côtes-du-Nord. De tout cela, on conclut qu'il fallait prendre de nouvelles mesures contre les prêtres. La discussion en fut remise au vendredi 21 du mois.

En effet, il y avait irritation et troubles partout, à cause de la question religieuse. Ici, on voit des prêtres

chassés à force ouverte; là, des pasteurs maintenus ou rappelés malgré l'autorité civile. A la campagne, et même dans certaines villes, les constitutionnels sont chassés à coups de pierres; les femmes sont les plus ardentes dans l'attaque. Les grandes villes nous offrent un autre spectacle. Là, les fureurs s'exercent contre les prêtres non assermentés, au mépris des lois et de l'autorité municipale. Souvent les églises sont ouvertes en vertu de la loi, et sont fermées par la multitude. Les personnes du sexe qui les fréquentent sont traitées d'une manière infâme. Ces excès, souvent répétés, restent impunis. Plus de loi, plus de justice, animosités et anarchie partout. Tels sont les événements qui se multiplient dans toutes les parties de la France, et dont les rapports font pleuvoir, de tous côtés, des accusations sans preuves contre les prêtres non assermentés, La position de ces malheureux prêtres est une des plus difficiles. Si des bandits troublent les assemblées où les catholiques viennent entendre la messe ; s'ils se portent à de honteux excès, inconnus mêmẹ chez les peuples barbares, ce sont les prêtres non asser. mentés qui en sont la cause. Si quelque part, à la campagne ou à la ville, les peuples, las de patience, repoussent une insulte, ou si, pleins d'indignation et de mépris pour le nouveau culte, ils chassent à coups de pierres un prêtre apostat, scandaleux, qu'ils ne peuvent supporter, ce sont encore les prêtres fidèles qui en sont les instigateurs. Enfin, ils sont cause de toutes les haines, de toutes les dissensions, et même des troubles et des excès dont ils sont victimes. Tel est le sens de tous les rapports et de toutes les dénonciations qui arrivent de tous côtés à l'Assemblée nationale.

Les législateurs, poussés par leur haine, leur mépris ou leur indifférence, les accueillent avec transport, sans jamais ordonner la moindre enquête. Les journaux s'en emparent, et les publient par les cent bouches de la renommée. Alors plus de doute les prêtres sont coupables, il faut les proscrire et les chasser.

Le vendredi 21 octobre, l'affaire des prêtres appelés réfractaires fut mise à l'ordre du jour, comme on en était convenu. La discussion fut animée, parfois ardente, et la religion n'y trouva aucun défenseur. Les ministres de Dieu sont livrés au mépris, maltraités; et s'ils trouvent encore quelques voix en leur faveur, c'est parmi les hommes modérés qui avaient conservé un reste de tolérance philosophique. Ils sont défendus, non comme prêtres, mais comme citoyens. L'embarras était grand; trois questions difficiles se présentaient : 1° Devait-on refuser aux catholiques, prêtres et fidèles, la liberté de conscience, si solennellement garantie par la constitution? 2° Devait-on faire des lois exceptionnelles pour les prêtres réfractaires, des lois de proscription générale, au lieu de les faire juger, s'ils sont coupables, selon les lois ordinaires du pays? 3o Une mesure de proscription générale était-elle politique? ne ranimerait-elle pas le feu de la guerre civile, au lieu de l'éteindre? Voilà les trois grandes questions qui se présentaient à la délibération de l'Assemblée législative le 21 octobre, et qui donnèrent lieu à de vifs débats.

Si l'Assemblée nationale avait été composée de législateurs sages, prévoyants, et moins prévenus contre la religion catholique et ses ministres, ces questions de haute politique n'auraient pas souffert la moindre difficulté. La liberté de conscience était dans les Droits

de l'homme, dans la constitution: elle devait donc être acceptée par des représentants qui avaient commencé leur législature par l'adoration de cette constitution. D'ailleurs, comment la refuser sous le règne de la liberté? Toutes les opinions sont libres, on peut les publier par la voie de la presse, les déclamer dans les clubs ou sur les bornes de la place publique; et l'on n'osera plus s'assembler dans une maison pour prier Dieu, pour se confesser, et recevoir les sacrements selon l'ancien rit! On peut faire de cette maison un cabaret, une salle de bal, un spectacle, une synagogue, une mosquée; et il ne sera pas permis aux catholiques d'en faire une maison de prière!

La deuxième question ne devait pas présenter plus de difficultés. Dans quel pays proscrit-on une classe entière de citoyens? S'il y a parmi eux des turbulents, des perturbateurs, il y avait des lois, des tribunaux pour les juger. Mais il ne fallait pas les proscrire tous; car on avouait qu'il y avait parmi eux des prêtres paisibles, charitables, éloignés de toute discussion politique; ceux-là, et c'était la grande majorité du clergé, devaient-ils être punis comme les autres ? Pouvait-on le faire sans une criante injustice? Puis, une proscription générale était-elle opportune? Ne présentait-elle pas de grands dangers? car, comme nous l'avons déjà vu, la proscription légale se traduisait dans la rue par l'extermination.

La mesure de proscription était-elle politique? Pouvait-on croire réellement qu'en chassant les prêtres aimés, estimés par leurs paroissiens, on calmerait les populations, qu'on les attacherait au culte officiel, aux prêtres apostats? Il était facile de prévoir le contraire.

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