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même été épargnées : voilà pour quelle scène on avait choisi le vendredi saint. La rédaction définitive du décret fut adoptée le 28 avril.

On savait bien que le roi ne souscrirait pas à un pareil décret; mais cette considération fut une raison de plus pour le rendre. On avait besoin d'un nouveau veto pour l'accomplissement des desseins qu'on méditait alors; mais, comme nous l'avons déjà vu, on n'avait pas besoin de l'approbation du roi pour agir. Le décret fut exécuté ponctuellement dans les départements et les communes où le parti jacobin était maître. Bien des départements l'avaient devancé : ils avaient dissous les congrégations, dispersé leurs membres. Le directoire du Morbihan avait mis à la porte du séminaire les lazaristes de Vannes, au cœur de l'hiver (janvier), à huit heures du soir, sans leur indiquer aucun asile (1). L'Assemblée législative, pour faire sa loi, semblait avoir pris modèle sur les arrêtés des directoires et des municipalités de certains départements. Le décret du 6 avril leur donna un nouvel élan. Les congrégations qui restaient encore debout furent en grande partie dissoutes, leurs membres dispersés, et les enfants des pauvres abandonnés au vice et à l'ignorance; et c'est ce qu'on appelait le bienfait de la révolution et le temps des lumières!

Restait encore l'ancien clergé, dont il n'était pas aussi facile de se défaire; mais sa perte était irrévocablement résolue, parce qu'on voulait détruire le christianisme. On commença donc par lui ôter tous ses appuis; ce qu'il était facile de faire, car, à force

(1) Tresvaux, Hist. de la Pers. révol., t. I, p. 340.

de représenter le clergé comme ennemi de la constitution, comme instigateur de troubles et de guerre civile, on avait excité contre lui toute la populace des villes et des campagnes. Pour les honnêtes gens qui étaient attachés à leurs anciens pasteurs, on ne les craignait pas, parce qu'on pensait qu'ils finiraient par céder, ou qu'ils seraient contenus par la force des

armes.

Le seul obstacle qui restait encore à vaincre était l'opposition du roi aux décrets que pouvait faire l'Assemblée contre le clergé. On résolut de le renverser, pour faire crouler le trône et l'autel à la fois, et l'on se mit immédiatement à l'œuvre.

On commença par renverser les faibles barrières qui entouraient et protégeaient le trône. Pour attaquer le roi, on attaqua ses ministres. C'est la tactique des hommes d'opposition de tous les temps: on sait fort bien que les traits qu'on lance contre un ministre arrivent toujours au chef de l'État. On portait des plaintes tantôt contre l'un, tantôt contre l'autre; on les citait à la barre, pour leur faire rendre compte de leur gestion. Delessart, ministre des affaires étrangères, fut décrété d'accusation, renvoyé devant la haute cour d'Orléans; et cinq mois après il devait périr dans les massacres de Versailles. Le procès que lui fit l'Assemblée, sous prétexte qu'il avait compromis la dignité de la nation dans la question de la guerre, est le premier procès fait à Louis XVI. Les accusateurs attaquaient moins le ministre que le roi : les paroles de Vergniaud en sont une preuve bien frappante.

<<< De cette tribune où je vous parle, dit-il, on aperçoit le palais où des conseillers pervers égarent et

trompent le roi que la constitution nous a donné; je vois les fenêtres du palais où l'on trame la contrerévolution, où l'on combine les moyens de nous replonger dans l'esclavage..... La terreur est souvent sortie dans les temps antiques, et au nom du despotisme, de ce palais fameux qu'elle y rentre aujourd'hui au nom de la loi; qu'elle y pénètre tous les cœurs; que tous ceux qui l'habitent sachent que notre constitution n'accorde l'inviolabilité qu'au roi. Qu'ils sachent que la loi atteindra sans distinction tous les coupables, et qu'il n'y aura pas une seule téte convaincue d'être criminelle qui puisse échapper à son glaive (1)! »

Vergniaud parlait le langage des halles, le langage du faubourg Saint-Antoine; car une députation de ce faubourg s'était présentée le 12 février (1792) à la barre, pour dire à l'Assemblée :

« Nous vous prions de surveiller le château des Tuileries, où il existe encore plus d'un noble audacieux et plus d'un cardinal de Lorraine... Le réveil du lion (du peuple) n'est pas loin. Nous sommes prêts à purger la terre des amis du roi, et à le contraindre lui-même à ne plus nous tromper (2). »

Le roi, ne sachant plus de quels hommes s'entourer, se jeta dans le parti ennemi, et choisit son ministère parmi les girondins, dans l'espérance, soit de les gagner, soit de diminuer leur influence en les opposant aux jacobins; mais il n'obtint ni l'un ni l'autre avantage. Dumouriez fut placé aux affaires étrangères, Lacoste à la marine, Clavière aux finances, Duranthon à la jus

(1) Moniteur, séance du 10 mars 1792.
(2) Moniteur, séance du 12 février 1792.

tice, Servan à la guerre, Roland à l'intérieur. Parmi ces ministres, deux seulement sont célèbres: Dumouriez et Roland.

Dumouriez était un général actif, plein d'intelligence et de courage. Il se rendit agréable à tous les partis en faisant déclarer la guerre à l'Autriche (le 20 avril). Cette question avait été débattue dans les clubs et à l'Assemblée nationale. Le général ne pensait guère qu'il allait ouvrir une lutte de vingt-trois ans entre la France nouvelle et les diverses puissances de l'Europe; lutte qui, après de grandes batailles et de brillantes victoires, devait nous conduire au point d'où nous étions partis.

On a tout dit sur Roland et sur sa femme, qui était plus ministre que lui; mais on n'a pas encore dit tout le mal que ces deux êtres ont fait à la religion. Roland appartenait à la société des jacobins, il en partageait la haine contre le christianisme, et la fureur contre les prêtres fidèles. Sa femme, qui à l'âge de neuf ans lisait Plutarque, après s'être livrée à une piété sincère qu'elle avait puisée au couvent et dans les ouvrages de Bossuet, s'était laissé aveugler par la lecture des philosophes, et entre autres de J.-J. Rousseau, et s'était jetée à corps perdu dans le parti révolutionnaire. Elle soufflait la haine de la royauté à son mari, et ne rêvait que république. « Les nations ne peuvent rétrograder, disait-elle; la chute des trônes est dans la destinée des empires... La sécurité est le tombeau de la liberté, les troubles nous seraient moins funestes; il nous faudrait une nouvelle insurrection: la guerre civile, tout horrible qu'elle est, avancerait la régénération de notre caractère et de nos mœurs. L'esprit général est pour

la liberté; il faudra bien que nous arrivions à cette liberté, fût-ce à travers une mer de sang (1). » Elle rêvait également la destruction du christianisme qui avait fait autrefois ses délices, mais dont elle était l'ennemie d'autant plus acharnée qu'elle avait apostasié. Elle voulait donc la république, avec un peuple sans frein et sans religion. La Providence semblait lui dire : Eh bien, vous l'aurez cette république; mais ́votre tête roulera sur l'échafaud!... Mme Roland recevait chez elle, plusieurs fois par semaine, les plus fameux révolutionnaires de l'époque, tels que Brissot, Buzot, Péthion, Robespierre, etc., au-dessus desquels elle s'élevait par son génie et ses brillantes qualités.

Les nouveaux ministres ne peuvent pas s'empêcher d'estimer Louis XVI. Dumouriez veut servir franchement son pays, et protéger le roi contre toute attaque. personnelle. Ami de l'ordre, il s'oppose à tout ce qui tend à l'anarchie. Lacoste et Duranthon s'attachent aussi au roi; mais Servan, Clavière et Roland sont inflexibles dans leur système de république. Mme Roland soufflait le feu. Ces ministres sont d'accord avec Péthion, maire de Paris, avec la majorité de l'Assemblée, avec les clubs et leur armée. Tous agissent de concert pour renverser le trône et ôter tout appui au sacerdoce catholique; chacun apporte sa hache et son instrument de démolition.

On augmente autant que possible le nombre des ennemis du trône, en même temps qu'on diminue celui de ses amis. Déjà on avait amnistié l'horrible Jourdan Coupe-tête, et les autres brigands complices avec lui des

(1) Lettres de M. Roland.

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