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La plume tombe des mains quand on a à décrire des horreurs semblables. Mais au milieu de ces horreurs mêmes il y a une consolation : c'est la fermeté avec laquelle ces héroïnes chrétiennes rendent témoignage à la foi.

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Déjà la persécution ne s'arrêtait plus aux religieuses et aux prêtres, elle s'étendait jusqu'aux catholiques. Les bandits de la Rochelle, dont je viens de parler, avaient attaqué et maltraité le même jour les catholiques de la ville l'un d'eux eut la tête fendue d'un coup de sabre; deux femmes furent foulées aux pieds, des jeunes filles fustigées avec leurs mères (1). On ne voit pas que la municipalité ait recherché et puni les auteurs de pareils attentats, l'histoire n'en dit rien; mais elle rapporte que deux prêtres furent mis au cachot par ordre de la municipalité pour avoir exercé quelques fonctions ecclésiastiques, et que les autres furent impitoyablement chassés de leur maison et de la ville, malgré l'arrêté du directoire qui leur avait accordé la liberté des cultes (2)

Dans la paroisse d'Yvecique, pays de Caux, le curé constitutionnel ne trouva rien de mieux que d'appeler la garde nationale à son aide, pour contraindre ses paroissiens à venir à ses instructions. Le vicaire de l'endroit, l'abbé Engrand, y fut conduit de force, et un habitant mis en prison pour avoir voulu s'opposer à cette contrainte (3).

Il n'y a pas de violence que n'employassent les in

(1) Barruel, Hist. du Clergé, t. I, p. 187.

(2) Ibid.

(3) Hist. du Clergé pendant la rév., par M. R., t. II, p. 15.

trus pour faire entrer les fidèles dans leur église ici on les entraîne de force, là on les maltraite parce qu'ils ne veulent pas s'y rendre; bien des personnes ont perdu la vie à la suite de ces sortes de violences (1). A Villeneuve près Cordes, en Albigeois, une jeune femme, ayant refusé de faire bénir son mariage par un intrus, fut outragée et livrée à une brutalité qui n'a pas de nom. Ses assassins semblaient être les précurseurs de ceux de la princesse de Lamballe. De leurs ongles ils déchirèrent, arrachèrent les seins de cette malheureuse, les jetèrent épars sur le plancher, et la laissèrent expirante au milieu d'affreux tourments (2). Dans d'autres localités, on voyait des particuliers condamnés à des amendes pour n'avoir pas présenté leurs enfants au baptême dans l'église constitutionnelle; on exerçait même sa fureur jusque sur les cadavres de ceux qui n'avaient pas fréquenté cette église : la bière était ouverte, le cadavre percé avec des piques, traîné dans la rue et jeté à la voirie. Le ministre de l'intérieur cita dans l'Assemblée législative l'exemple d'un homme exhumé et enterré dans la place publique, pour n'avoir pas été à la messe des constitutionnels (3).

Je mets fin au récit de ces horreurs, qui se renouvelèrent pendant les premiers mois de l'année 1792 dans plus de la moitié des départements, et qui sont bien propres à nous faire connaître de quel côté venaient les désordres dont on ne cessait d'accuser les prêtres fidèles. Les exemples que je viens de citer

(1) Barruel, Hist. du Clergé, t. I, p. 173-183.

(2) Ibid.

(3) Moniteur, séance du 18 février 1792.- Barruel, Hist. du Clergé, t. I, p. 198.

sont bien propres à nous éclairer sur ce point. Les révolutionnaires fondaient tout à coup sur une commune paisible et tranquille, ou sur un monastère où régnaient le silence et la paix ; et, après y avoir commis mille désordres, ils écrivaient à l'Assemblée nationale pour en accuser les prêtres réfractaires, et demander des mesures d'expulsion. Telle était la justice du beau règne de la liberté!

Le clergé constitutionnel s'était découvert; il avait montré à la face du monde son caractère. Tous les jours il se déshonorait davantage, jusqu'à dégoûter ses propres partisans. Dans les départements de l'Aube et de la Haute-Vienne, deux curés s'étaient mariés et avaient publié eux-mêmes leurs bans ils furent expulsés par le peuple et les officiers municipaux, tant leur conduite avait inspiré de dégoût (1).

Le mépris dans lequel était tombée l'Église constitutionnelle fit rougir tous les jureurs qui avaient conservé un peu de cœur et de foi. On vit de nouvelles rétractations; on espérait même en voir dans l'épiscopat. On savait que plusieurs évêques de la nouvelle Église avaient le cœur déchiré par des remords de conscience. Je ne parle pas de l'évêque d'Autun, qui avait donné sa démission, ni de Gobel, prétendu évêque de Paris, qui, par l'intermédiaire d'un ambassadeur, celui de Gênes, avait voulu offrir au pape la rétractation de son serment, moyennant une somme de cent mille écus (2); je ne parle pas non plus d'autres

(1) Moniteur, séance du 18 février 1792, Rapport du ministre de l'intérieur.

(2) Biogr. univ., art. Gobel.

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intrus qui, abreuvés de dégoûts, avaient quitté leurs siéges, soit en donnant leur démission, soit en prenant la fuite, mais qui n'en ont pas moins persévéré dans le schisme je ne veux parler que de ceux qui sentaient dans l'intérieur de leur cœur toute l'horreur du schisme et de l'intrusion; ils étaient au nombre de six. Rougissant des vices, de l'ignorance et de la dépravation de ceux qu'ils avaient admis dans le ministère et autour de leurs personnes, ils se mirent secrètement en rapport avec le père commun des fidèles, et en reçurent les réponses les plus paternelles. Leur correspondance, que l'abbé Barruel a eue sous les yeux, doit se trouver encore dans les archives de la cour romaine (1). On espérait chaque jour qu'ils se rétracteraient; le pape lui-même était dans cette espérance. Ce fut sans doute pour les aider et les encourager que Pie VI envoya, en date du 19 mars 1792, un nouveau bref au clergé de France. On aurait de la peine à comprendre la douceur de ce bref envers le clergé constitutionnel, dans un temps où il méritait toute la sévérité du pontife, si l'on ne se rappelait pas cette correspondance avec Rome; car les évêques intrus venaient d'ajouter un nouveau degré à leur perversité par un écrit intitulé Accord des vrais principes, qui, selon Pie VI, n'est qu'un assemblage de sentiments erronés, schismatiques, hérétiques, depuis longtemps réfutés dans l'Église. Il était signé de dix-huit d'entre eux. Le pape use cependant d'indulgence: il donne dans son bref des éloges aux prêtres qui étaient restés fidèles et à ceux qui avaient rétracté leur serment; il félicite les

(1) Barruel, Hist. du Clergé, t. I, p. 233.

professeurs des universités, et ceux de la Sorbonne en particulier, d'être restés inébranlables; il loue les évêques de leur fermeté et de leur courage à supporter l'exil et la persécution; il n'oublie pas même les simples fidèles. Mais il ne peut se dissimuler la douleur que lui cause la persévérance dans le schisme des quatre évêques qui avaient fait le serment; il les exhorte, ainsi que tous les autres intrus, à se reconnaître, et à satisfaire l'Église. Après les avoir longtemps attendus, il ne veut pas les frapper, disait-il, de nouveau; il se contente de leur adresser des monitions. Il n'alla pas plus loin, et ne les déclara pas formellement retranchés de l'Église.

Ce bref, peu répandu en France à cause de la difficulté des temps, n'eut pas le succès désirable. Les nouveaux évêques qui avaient donné l'espérance d'une rétractation publique n'eurent pas le courage de la faire leur foi n'avait pas une force proportionnée aux périls qu'ils avaient à courir. L'Église n'eut donc pas la consolation de les recevoir dans son sein; mais elle fut consolée par le retour de beaucoup de prêtres du second ordre, et par la constance et la fermeté de ceux qui lui étaient toujours restés fidèles.

Le clergé catholique, lorsqu'il se voyait poursuivi et puni pour des crimes qu'il n'avait point commis, ne gardait pas le silence; il se défendit d'une manière noble et chrétienne, sans humeur et sans haine pour ses persécuteurs. D'un côté, il opposait aux accusations sa conduite, qui tendait sans cesse à calmer l'esprit des populations, à faire lever les obstacles qui s'opposaient à la circulation des grains, à la perception de l'impôt. Nous avons des instructions et des exhortations que les prê

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