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sonne qui n'est pas nommée, et qui était probablement un des évêques de l'Assemblée, et de lui communiquer le résultat de leur conférence. L'archevêque, qui avait, comme le roi, un extrême désir de préserver la France des maux du schisme, s'empressa d'entrer dans ses vues. Le digne prélat a dépassé encore une fois les limites de ce qu'on pouvait espérer de Rome.

« Votre Majesté, dit-il, a la bonté de sentir mon embarras, et je dois l'oublier moi-même pour ne songer qu'à l'intérêt de Votre Majesté... Il faut subir la loi des circonstances, et chercher les moyens possibles. Je n'ai pu répondre dans le moment; j'ai voulu voir celui auquel Votre Majesté m'ordonne de communiquer ma lettre. Nous avons relu les discussions de l'Assemblée, et cette sage et vertueuse réponse qui devait attirer toute sa confiance; il semble qu'on lui refuse jusqu'au droit de prévenir les troubles, en exécutant les décrets.

« Il paraît, par la lettre que Votre Majesté m'adresse, qu'elle compte donner sa réponse signée; c'est ensuite qu'elle craint qu'on ne revienne à la charge. On m'a dit les motifs des chefs: ils ne veulent point reconnaítre le recours à Rome. On annonce le retour du courrier pour le 27, ils veulent le prévenir... Voilà ce que j'ai toujours craint. Le principe de la cour de Rome devait être de faire tout ce qu'elle pouvait faire, et de ne différer que ce qui pouvait être moins pressant et plus difficile. Quand il ne manque que des formes canoniques, le pape peut les remplir; il le peut, il le doit; et tels sont les articles que Votre Majesté lui avait proposés.

« Les évêques sages seront forcés, en dépit d'euxmêmes, de refuser le serment, si les formes ne sont

pas remplies; chaque évêque dispensé ne peut pas y suppléer, et M. Malouet semble avoir confondu ce que l'Église peut faire et ce qu'on veut faire sans l'Église.

« Si l'on était assuré du concours du pape et de la promptitude de sa réponse, Votre Majesté pourrait sanctionner d'avance le décret sans inconvénient. Les départements exécuteraient le décret, quand les évêques se conformeraient à la réponse du pape; mais on ne peut pas combiner les circonstances sur lesquelles on est dans le doute et l'incertitude.

<< Si Votre Majesté ne peut pas se défendre des instances renouvelées, si vos ministres ne les préviennent pas, il importe sans doute, pour elle et pour la chose publique, que son acceptation paraisse un acte forcé. Votre Majesté fait une réflexion bien intéressante pour la position de la reine; son intérêt en est un pour l'État comme pour Votre Majesté ; et c'est pourquoi il ne faut pas attendre que les chefs recourent encore à des attroupements. Il ne faut pas céder à des émeutes: s'il faut céder, ce doit être pour les prévenir; et l'insistance opiniâtre de l'Assemblée devient, pour le moment, la loi de la contrainte. Que deviendraient cependant les évêques destitués? Que deviendraient les diocèses livrés à des intrus qu'aucune forme canonique n'aurait légitimés ?

« C'est alors, sire, qu'un second courrier doit arracher au pape un consentement forcé; c'est alors qu'instruit par les tristes effets dont son refus serait la cause, il se presserait sans doute de les réparer. Il se passerait quelque temps entre la destitution des évêques et l'élection de ceux qu'on voudrait leur substituer, et, dans cet intervalle, on pourrait recevoir la

réponse de Rome. Voilà, sire, le résultat de notre conférence (1). »

Le roi reçut la deuxième députation décrétée par l'Assemblée; mais, comme il l'avait résolu, il ne fit que signer, pour toute réponse, sa première lettre.

Les membres du côté gauche étaient furieux de savoir que le roi ne différait que parce qu'il attendait des nouvelles de Rome. Comme leur but secret était de séparer la France de l'unité catholique, ils se récrièrent sur l'inconvenance de faire dépendre des caprices d'un souverain étranger les destinées d'une grande nation. Camus demanda et obtint de l'Assemblée que le président retournerait une troisième fois chez le roi pour exiger son acceptation, et pour lui signifier que s'il n'acceptait pas, le décret du serment n'en serait pas moins exécuté (2).

Les discours violents de la tribune avaient produit leur effet sur le peuple de Paris, qu'on faisait mouvoir chaque fois que le roi voulait faire quelque résistance. La ville était dans une effervescence extrême, une sédition était imminente. Les rassemblements tumultueux en offraient tous les symptômes. La foule venait jusque sous les fenêtres du roi crier : La sanction (3)! Les ministres n'osaient engager leur responsabilité, et la famille royale redoutait un 6 octobre. Le garde des sceaux vint trouver le roi, et lui fit entendre que les faubourgs pourraient s'insurger, s'il refusait de satisfaire l'Assemblée : « Peu m'importe, répliqua le roi, si « l'on en veut à ma vie! j'en suis bien lás. » Ces pa

(1) Armoire de fer, no 71.

(2) Moniteur, séance du 23 décembre. (3) Hist. parlem., t. IV, p. 254.

roles nous font voir les angoisses du roi et les remords de sa conscience. « Vos jours, répliqua le ministre, ne « sont pas en danger; mais ce sont ceux de tout le « clergé, que votre hésitation va livrer à la fureur populaire. » A la crainte de voir couler le sang du clergé, le roi n'offrit plus de résistance. Il accepta le décret par ces mots, qui étaient contresignés par un ministre responsable:

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« En déférant aux vœux de l'Assemblée, je suis bien aise de m'expliquer sur les motifs qui m'avaient déterminé à retarder cette acceptation, et sur ceux qui me décident à la donner en ce moment... Si j'ai différé jusqu'à ce jour, c'est qu'il était dans mon cœur de désirer que les moyens de sévérité pussent être prévenus par ceux de la douceur; c'est qu'en donnant aux esprits le temps de se calmer, j'ai dû croire que l'exécution de ce décret s'effectuerait avec un accord qui ne serait pas moins agréable à l'Assemblée qu'à moi... J'espérais que ces motifs de prudence seraient généralement sentis; mais puisqu'il s'élève sur mes intentions des doutes que la droiture de mon caractère devrait éloigner, je ne balance plus. Ma confiance dans l'Assemblée nationale m'engage à accepter (1). »

L'acceptation du roi ne fut communiquée à l'Assemblée que le 26 décembre; elle fut réçue par le côté gauche avec de bruyants applaudissements qui durèrent pendant plusieurs minutes (2). Le décret était alors revêtu de toutes les formalités, et avait force de

(1) Labaume, Hist. mon. et constit. de la Révol., t. V, p. 47. Ce fut le 23 décembre (1790); le décret du serment était du 27 novembre.

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(2) Moniteur, séance du 26 décembre 1790.

loi dans le royaume. On en était ravi, parce que rien ne s'opposait plus au projet de décatholiser la France. Plusieurs ecclésiastiques de l'Assemblée n'attendirent pas le terme de huit jours que leur accordait le décret pour prêter serment. Dès le lendemain 27 décembre, l'abbé Grégoire monta à la tribune, et débuta par le discours suivant :

« Disposé, ainsi qu'un grand nombre de mes confrères, à prêter le serment civique, permettez qu'en leur nom je développe quelques idées qui ne seront peut-être pas inutiles dans les circonstancès actuelles. On ne peut se dissimuler que beaucoup de pasteurs estimables, et dont le patriotisme n'est point équivoque, éprouvent des anxiétés, parce qu'ils craignent que la constitution française ne soit incompatible avec les principes du catholicisme. Nous sommes aussi irrévocablement attachés aux lois de la religion qu'à celles de la patrie. Revêtus du sacerdoce, nous continuerons de l'honorer par nos mœurs; soumis à cette religion divine, nous en serons constamment les missionnaires : nous en serions, s'il le fallait, les martyrs. Mais, après le plus mûr et le plus sérieux examen, nous déclarons ne rien apercevoir dans la constitution qui puisse blesser les vérités que nous devons croire et enseigner.

<< Ce serait injurier et calomnier l'Assemblée que de lui supposer le projet de mettre la main à l'encensoir. A la face de la France, de l'univers, elle a manifesté solennellement son profond respect pour la religion catholique, apostolique et romaine. Jamais elle n'a voulu priver les fidèles d'aucun moyen de salut; jamais elle n'a voulu porter la moindre atteinte au dogme, à la hiérarchie, à l'autorité spirituelle du chef

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