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ils contractent l'étroite obligation de conserver leur troupeau, même au péril de leur vie, et de le préserver de toute contagion du vice et de l'erreur. Les évêques de France ont rempli fidèlement ce devoir sacré : ils ont répandu dans le public une foule de mandements et de lettres pastorales, contre les innovations de l'Assemblée et les erreurs du jour. Barruel et d'autres pieux ecclésiastiques en ont fait un recueil qui forme jusqu'à quatorze volumes; encore la collection n'est-elle pas complète. C'est un beau monument du zèle et de la science de l'épiscopat français. Nous regrettons que les bornes d'un ouvrage historique ne nous permettent pas d'en tirer des extraits pour l'édification du lecteur. "Ces savants écrits s'attachaient à quatre points principaux qui ont été éclaircis d'une manière à ne laisser rien à désirer ces points sont le bouleversement des diocèses, l'élection des évêques et des curés sans le concours de l'autorité ecclésiastique, l'institution canonique des évêques accordée par la nouvelle constitution aux métropolitains sans le concours du pape. La primauté de saint Pierre, primauté d'honneur et de juridiction sur l'Église universelle, l'autorité des évêques sur les pasteurs et les fidèles, y trouvaient aussi une large place. Le zèle des évêques eut des imitateurs dans le clergé du second ordre. On vit sortir du sein des chapitres, et même de l'obscurité de la maison de cure, des écrits solides, pleins de savoir et de logique.. De tous côtés arrivaient à Paris des protestations énergiques contre les décrets de l'Assemblée. La partie de l'ouest se distinguait déjà par une opposition plus vive et plus prononcée. Les chapitres de Rennes, de Vannes, de Saint-Brieuc, de Saint-Pol-de-Léon et de Tréguier

protestèrent avec force contre la suppression de leurs corps et de leur juridiction. Les curés de ces diocèses firent aussi entendre leurs réclamations. L'évêque de Quimper venait de mourir les membres du chapitre et les vicaires généraux déclarèrent aussitôt qu'ils ne reconnaîtraient d'autre volonté que celle transmise par leur pasteur, et qu'ils étaient fermement résolus de s'opposer à toute innovation. Le diocèse de Nantes envoya une masse de protestations; on en compta jusqu'à cent trois signées par le clergé du diocèse (1).

Ce qui couronna l'œuvre, c'est la protestation collective des évêques de l'Assemblée; car c'est ainsi que l'on peut appeler la réponse qu'ils firent au pape le 10 octobre, et qu'ils publièrent le 30 du même mois, sous le titre Exposition des principes sur la constitution civile du clergé. M. de Boisgelin, archevêque d'Aix, en est le rédacteur. Il y mit un ton de modération qui prouve combien lui et ses collègues avaient le désir de préserver l'Église de France du schisme. L'auteur commence par exposer les principes admis dans la constitution civile, entre ensuite dans les détails, passe en revue article par article, et montre leur opposition avec les principes constitutifs de l'Église et les règles de la discipline ecclésiastique. Ainsi il défend successivement les évêques qui ne veulent pas donner leur démission, ou étendre leurs droits hors des limites de leurs diocèses. Il attaque les élections populaires, et montre combien elles sont différentes de

(1) Labaume, Hist. monarc. et const. de la Révol., t. V, p. 28. Tresvaux, Hist. de la Persécut., t. I, p. 97-138.—Moniteur, séance du 26 novembre 1790. — Discours de Voidel.

celles de la primitive Église. Il réclame en faveur des chapitres, des ordres religieux, des fondations et des vœux monastiques.

« Tels sont, dit-il, les principes que nous avons exposés dans l'Assemblée nationale, que nous ont transmis nos prédécesseurs par une tradition dont la source est dans les institutions de Jésus-Christ et des apôtres, et qui forment le dépôt commun de l'Église gallicane et de toutes les Églises. La puissance civile ne peut pas exiger que les évêques établis pour recueillir les traditions, pour maintenir la pureté de la doctrine, et pour exercer l'autorité de l'Église, abjurent les principes de la juridiction qu'elle leur a confiée; elle ne peut pas leur interdire l'exercice de leur pouvoir dans l'ordre de la religion; elle ne peut pas assurer le repos des consciences, en altérant les formes canoniques qui doivent légitimer les actes du ministère ecclésiastique. Les pasteurs des paroisses n'enseigneront pas des maximes contraires à celles que l'Église a toujours enseignées par la bouche de ses premiers pasteurs. Les fidèles ne croiront pas pouvoir préférer, dans l'ordre du salut, les commandements d'une autorité purement civile, aux préceptes de l'Église. Faut-il que la puissance civile s'expose à la déplorable nécessité de multiplier les commandements et les contraintes? >>

L'archevêque insiste sur l'incompétence de l'autorité civile en toutes ces réformes, et demande la tenue d'un concile national ou le recours au saint-siége. Il termine son exposition par renouveler son ardent désir et celui de ses collègues, d'éviter le schisme.

« Nous voulons l'éviter, dit-il, nous voulons employer

tous les moyens de la sagesse et de la charité pour prévenir les troubles, dont une déplorable scission peut devenir l'ouvrage. » Il conclut par dire qu'il n'y a pas de meilleur parti à prendre que d'attendre la réponse du saint-siége (1).

Trente membres de l'épiscopat, tous appartenant à l'Assemblée, signèrent cet acte délibéré en commun. Successivement cent dix évêques français, ou ayant des extensions de leurs diocèses en France, se joignirent à l'Assemblée; de sorte que l'Exposition des principes devint un jugement doctrinal de toute l'Église gallicane.

L'Assemblée nationale pouvait se tenir pour avertie d'une résistance invincible qu'elle allait rencontrer dans le clergé et dans les fidèles catholiques. La sagesse, le bon sens et l'amour de la paix lui conseillaient de laisser tomber ses décrets en désuétude, ou de les faire sanctionner par l'autorité compétente : l'intérêt du royaume le demandait impérieusement. L'agitation et la révolte se manifestaient de toutes parts, et l'on allait lui donner un nouvel aliment en faisant exécuter la constitution civile du clergé. Puis, la loi civile était méprisée, et n'était plus suffisante pour arrêter les passions populaires; la force de la loi divine devenait plus que jamais nécessaire; il fallait lui donner plus de vigueur, au lieu de l'anéantir. Il y avait sans doute plus d'un député disposé à prendre ce parti; mais l'orgueil des autres, l'impiété voltairienne du côté gauche, qui voulait la destruction de toute religion, le firent rejeter. D'ailleurs l'Assem

(1) Voir les Pièces complémentaires.

blée était poussée par certaines municipalités de province, qui employaient la violence pour faire exécuter la constitution civile du clergé. L'évêque de Toulon avait déjà été obligé de fuir devant l'émeute. Son mandement, traité d'incendiaire, fut dénoncé à l'Assemblée nationale, qui, par un décret du 17 août, l'envoya aux juges des lieux, avec ordre d'informer contre l'auteur, et de suivre la procédure jusqu'à jugement définitif. Les revenus de l'évêque furent mis sous le séquestre par le même décret (1).

Mais l'évêque qui fut le plus persécuté à cette époque, c'est M. de la Laurancie, évêque de Nantes. On avait répandu le bruit qu'il avait mandé tous ses prêtres, et qu'il leur avait fait prêter le serment d'employer tous les moyens en leur pouvoir pour s'opposer à l'établissement de la constitution. Ce bruit mal fondé, mais grossi par le club des jacobins de Nantes, excita le peuple contre lui, à tel point que ses amis lui conseillèrent de se retirer (2). Le directoire du département envoya une députation à l'Assemblée nationale, pour lui demander l'autorisation d'arrêter l'évêque et de procéder à l'élection d'un nouveau, selon les dispositions des décrets du 12 juillet. « Nous lui avons envoyé, dit l'orateur à l'Assemblée, une députation, qui lui a parlé avec tous les égards convenables; il << nous a répondu qu'il ne reconnaissait pas l'autorité « de l'Assemblée en matière ecclésiastique, mais qu'il << la respectait en tout ce qui concernait les choses

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(1) Moniteur, séance du 17 août 1790.

(2) Tresvaux, Histoire de la Persécution révolutionnaire, t. I, p. 126.

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