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tion de suspendre l'autorité royale, on vous a dit dans cette tribune: Nous aurions dû commencer par là; mais nous ne connaissions pas notre force. Ainsi, il ne s'agit pour vos successeurs que de mesurer leur force pour essayer de nouvelles entreprises; et, certes, ce danger m'effraye bien autant que celui des conventions nationales; car, dans la fermentation où sont encore les esprits, d'après le caractère des hommes qui se montrent et le grand nombre de ceux qui se réduisent au silence, je crains autant les essais de la nouvelle législature qu'une convention nationale. »

C'étaient autant de traits de lumière; mais rien ne pouvait plus pénétrer dans l'esprit d'hommes prévenus et aveuglés par les théories philosophiques.

La constitution, malgré tous ces avertissements, fut adoptée; le roi l'accepta par un message du 13 septembre, qu'il terminait par une demande d'amnistie pour tous les délits relatifs à la révolution. Sur la motion de la Fayette, l'amnistie fut décrétée. Ainsi les prêtres, retenus prisonniers depuis plusieurs mois dans divers départements, allaient sortir de leur prison. M. Goupil, voulant profiter de l'enthousiasme qu'avait excité le message du roi, proposa de réintégrer dans leurs fonctions les ecclésiastiques non assermentés qui n'avaient pas encore été remplacés. Martineau, quoique janséniste, ajouta qu'il ne fallait plus leur demander d'autre serment que celui de maintenir la constitution; Duport appuya ce dernier avis, qui était conforme à celui de Malouet, énoncé peu de jours auparavant (1); mais Salles fit observer que ce serait faire

(1) Hist. parlem., t. XI, p. 368, grande édition.

triompher les prêtres réfractaires, et l'inflexible Camus conjura l'Assemblée de se défier du premier mouvement d'enthousiasme, et d'ajourner toute décision à ce sujet (1). On prononça donc l'ordre du jour.

Le lendemain, le roi se rendit à l'Assemblée, prêta serment à la constitution, recouvra sa liberté, et rentra dans tous les droits que la constitution lui accordait l'amnistie fut proclamée. En vertu de cette amnistie, les prêtres recouvrèrent leur liberté. Les directoires des départements avaient de la peine à lâcher leur proie; celui du Finistère, influencé par Expilly, son faux évêque, attendit jusqu'au 24 septembre pour élargir les siens encore ne fut-ce qu'après qu'un commissaire eut invectivé contre eux de la manière la plus grossière, et qu'il leur eut fait les défenses les plus rigoureuses. Ils ne devaient point rentrer dans leur ancien domicile; les curés devaient se tenir éloignés à quatre lieues de leurs anciennes paroisses (2). On conserve donc la rancune contre les ecclésiastiques fidèles; on n'attend que l'occasion de les attaquer de nouveau. Telle était la position de l'ancien clergé à la fin de l'Assemblée constituante, qui termina sa longue session le 30 septembre 1791, pour faire place à l'Assemblée législative, dont les députés déjà élus étaient prêts à entrer en fonctions.

Le côté droit, qui était plus éclairé parce qu'il avait plus de religion, n'a point quitté Paris sans avoir protesté de nouveau dans une déclaration étendue, qui est un chef-d'œuvre de sagesse et de raisonnement, con

(1) Moniteur, séance du 13 septembre 1791.

(2) Tresvaux, Hist. de la Persécut. révol., t. I, p. 306.

tre les atteintes portées à la religion, à l'autorité royale, à la propriété, et aux principes constitutionnels de la monarchie. Nous en extrayons le passage suivant, qui regarde l'Église :

<< Ils (les députés) ont usurpé les droits spirituels de l'Église, comme ils avaient envahi les biens temporels du clergé. Ils ont établi le schisme en France; ils ont décerné des honneurs publics à la mémoire du chef des apôtres de l'irréligion (Voltaire).

« Et pour joindre, en faveur de leur système déplorable, la force de l'opinion et de l'éducation à celle de la loi, ils ont placé le libre exercice de tous les cultes religieux au nombre de leurs dispositions fondamentales, et ils n'ont pas fait entrer l'enseignement du christianisme dans leur instruction commune à tous les hommes. >>

Ils jugent ensuite sévèrement les persécutions exercées contre le clergé catholique, et surtout contre les religieuses des couvents.

« Ils ont fait plus en tolérant, en protégeant, en invitant toutes les sectes, toutes les religions, ils ont réservé la misère, l'opprobre, les exils, les emprisonnements, les peines infamantes, les persécutions de tous les genres, aux prêtres de la communion romaine; et ce qui surpasse toutes les horreurs pratiquées jusqu'à nos jours, ce que la postérité, quoique avertie par tant d'autres exemples, aura peine à croire, ces filles respectables qui sont dévouées au soulagement des malades, ces anges de bonté sur la terre, ces modèles si touchants d'un courage surnaturel, que la profane antiquité ne pouvait pas connaître, que la religion chrétienne peut seule inspirer et soutenir, en un mot,

les sœurs de la Charité, dont tout le crime était de n'avoir pas juré, contre leur conscience, la constitution civile du clergé, ils les ont vues tranquillement entre les mains d'une populace effrénée, qui prétendait, par d'insolentes punitions, venger ses législateurs; ils les ont en quelque sorte abandonnées, désignées par leur silence à cette abominable et nouvelle justice, féconde en outrages plus difficiles à supporter que la mort même (1). »

Le clergé, tout en adhérant à cette déclaration, a protesté à part dans un compte-rendu rédigé par l'archevêque d'Aix (2). Se livrant à une discussion approfondie sur ce qui concernait la religion, la monarchie et la liberté, il a fait ressortir les vices de la constitution, et a fait voir qu'elle était contraire au bien du peuple, dont on avait cherché les intérêts.

Nous ne voulons pas contester à l'Assemblée constituante ni la bonne volonté, ni les talents, ni le désir du bien, ni, si l'on veut, les vues désintéressées. Elle renfermait dans son sein de beaux talents et de nobles cœurs la France ne reverra peut-être plus jamais une réunion d'hommes aussi distingués. On y trouvait des talents de tout genre, des hommes profondément politiques, des orateurs du premier ordre, au-dessus desquels s'élevait Mirabeau, qui, comme un autre Démosthène, ne montait presque jamais à la tribune sans exciter l'admiration et sans remporter un triomphe. L'assemblage de si beaux talents faisait honneur à l'ancienne éducation; et, comme on sait, elle était en grande partie entre les mains du clergé.

(1) Mémoires d'Auribeau, t. I, p. 601. ~ (2) Ibid., p. 626.

Les membres de l'Assemblée ont fait un immense travail. Pendant les vingt-huit mois qu'a duré leur session sans discontinuer, ils n'ont pas rendu moins de deux mille cinq cents décrets. Tous ne sont pas des oracles de sagesse, il s'en faut; mais enfin je ne parle encore que de leur travail. Or, quand on pense que presque chaque décret était examiné dans les bureaux, rapporté ensuite à l'Assemblée, et discuté contradictoirement à la tribune; que souvent la discussion a duré plusieurs jours; que certains décrets ont occupé de nombreuses séances (celui qui réunit le comtat d'Avignon à la France, et qui a été adopté dans les derniers jours de l'Assemblée constituante, a été reproduit dans vingt-cinq séances, et chaque fois il a donné lieu aux débats les plus violents, parce qu'on a longtemps hésité avant de procéder à cet acte d'iniquité); quand on pense à tout cela, on peut juger du travail de l'Assemblée.

Dans ces débats, qui remplissent les grandes colonnes du Moniteur de l'époque, on trouve des idées élevées, des sentiments généreux, des documents instructifs que l'homme politique, le législateur et l'historien ne sauraient trop approfondir. La religion reçut aussi des hommages, de généreuses sympathies, surtout dans la première année de la session. Et quand, plus tard, elle fut attaquée, elle trouva d'éloquents défenseurs.

Leur travail n'a pas été inutile. Parmi les décrets rendus, nous trouvons des dispositions sages, utiles et durables. L'égalité de tous les citoyens devant la loi, l'égalité des impôts, l'admissibilité de tous aux emplois publics, l'organisation de la magistrature, des corps municipaux, de l'armée, et tant d'autres choses qui sont parvenues jusqu'à nous, attestent l'utilité de leurs

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