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<< l'accorder, sans se rendre coupable d'un sacrilége horrible, quand une église n'est point privée légiti<< mement de son pasteur, quand l'élection n'a point « été canonique, et la vôtre ne l'est point; et qu'on << ne présente point notre mandat apostolique, principe « de toute mission légitime. Si l'ordination se fait au<< trement, celui qui est ordonné, outre le sacrilége << dont il est flétri, n'a nulle puissance de juridiction, << et tous les actes qu'il se permet sont vains et de « nulle valeur. » Le pape renvoie M. Guegan au bref du 10 mars qu'il avait adressé aux archevêques et évêques de l'Assemblée, où il trouvera les règles de conduite qu'il doit suivre. Le bref est du 30 mars. M. Guegan, à la grande édification des fidèles, profita des conseils paternels du souverain pontife, et refusa définitivement l'évêché qu'on lui offrait. L'année suivante, il eut la gloire d'être au nombre des proscrits et des déportés (1). Mais tels n'étaient pas les sentiments de tous élus la plupart ne se laissèrent pas intimider par de pareils scrupules; ils eurent le triste courage de braver la voix du souverain pontife et les protestations des évêques; ils eurent l'impudence de s'imposer aux populations qui les repoussaient, de s'asseoir à la place d'hommes vivants, et de ceindre leur front téméraire de cette mitre pastorale arrachée à la vieillesse, à la science et à la vertu. Il y avait de la bassesse, de l'ignominie et de l'injustice dans leur conduite. S'emparer de la place d'un autre est aux yeux du monde quelque chose d'avilissant; aux yeux de l'Église, c'est,

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(1) Tresvaux, Hist. de la Persécut. révol. en Bretagne, t. I, p. 222..

comme le dit le pape Pie VI, un acte de schisme et un attentat sacrilége. Pour le commettre, il fallait avoir mis de côté tout sentiment de pudeur et de justice, tout devoir de conscience, toute règle ecclésiastique; et ce sont là des hommes destinés à ramener l'Église de France aux mœurs et aux usages de la primitive Église! Nous verrons comment ils rempliront leur mission. Cependant ils protestaient toujours de leur attachement au principe catholique; mais, comme catholiques, ne devaient-ils pas savoir qu'il n'est point permis de mépriser la voix de l'Église et celle de son chef; que les évêques sont attachés à leurs églises par des liens indissolubles, que le gouvernement ne peut briser? Quoique arrachés de leur siége par la violence et l'injustice, ils sont toujours évêques de leur église, sur laquelle ils conservent leur juridiction, tant qu'ils n'en sont pas dépossédés par un jugement canonique. Les nouveaux évêques ne seront donc jamais que des schismatiques et des intrus; et le peuple, infaillible dans son langage, les regardait comme tels en leur donnant le nom d'évéques constitutionnels.

Le sacre des nouveaux évêques, si difficile à obtenir dans le commencement, devint extrêmement facile après celui d'Expilly et de Marolles. En effet, le 27 février, trois jours après la consécration d'Expilly, Gobel, évêque de Lydda, se réunit aux deux nouveaux évêques pour donner un remplaçant à l'évêque de Dax, dont la conscience n'avait pu se plier aux désirs de l'Assemblée nationale. Ils sacrèrent, à cet effet, le curé ou plutôt l'avocat Saurine, qui plus tard, au commencement de ce siècle, fut nommé évêque de Strasbourg, où il mourut en 1813, laissant une triste mémoire.

Saurine, prêtre interdit du diocèse d'Oleron, était allé en Espagne, où il fit une éducation particulière. De retour en France, il recueillit une riche succession d'un frère mort dans les colonies, non sans quelques difficultés, dit-on, avec le reste de la famille. Comme il était sans emploi et qu'il s'entendait bien dans les affaires, il se fit recevoir avocat. La révolution lui ouvrit une nouvelle carrière : il fut nommé député à l'Assemblée constituante par le clergé de Béarn, et se montra favorable à toutes les nouvelles idées. C'est lui qui, le 27 mai 1790, avait provoqué une consultation d'avocats, pour établir le droit de l'Assemblée sur l'élection et la suppression des évêchés. Les électeurs du département des Landes voulurent récompenser son zèle en le nommant à l'évêché de Dax. L'évêque légitime, M. de la Neuville, eut beau protester contre le successeur qu'on prétendait lui donner : celui-ci prit possession de son siége, et publia des lettres pastorales où il se déclarait en faveur de la révolution, contre la cour de Rome et les anciens évêques. Saurine devint un des plus zélés partisans de l'Église constitutionnelle, et il conserva ses sentiments jusqu'à la fin de ses jours. Dès qu'il eut reçu la consécration épiscopale, il s'empressa de la conférer à d'autres. Le 6 mars (1791), il imposa les mains au curé Massieu, élu évêque à Beauvais, et au curé Lindet, élu à Évreux. Châteauroux et Moulins étant devenus des siéges épiscopaux en vertu de la constitution civile, Saurine les regarda comme légitimement érigés, et sacra les curés Heraudin et Laurent, appelés à la dignité d'évêques par les élections de l'une et de l'autre de ces villes.

Gobel, évêque de Lydda, avait prêté, le 2 janvier,

le serment avec des restrictions qui faisaient espérer qu'il reviendrait de son erreur. Il avait dit : «Persuadé << que l'Assemblée nationale ne veut pas nous obliger, « par ses décrets, à faire quelque chose de contraire à « la juridiction spirituelle en ce qui concerne le salut « des fidèles, je demande à prêter le serment (1). » Mais les constitutionnels lui ayant fait peur, il se hâta de retirer ses restrictions, et de faire le serment pur et simple (2). Dès ce moment, il prit une allure plus franche dans la voie de la perdition. Il assista, comme nous l'avons vu, au sacre d'Expilly, et consacra luimême l'évêque intrus de Dax. En récompense de ses services et de ses sentiments, il fut élu à la fois à trois évêchés à ceux du Haut-Rhin, de Haute-Marne, et de la Seine. Son élection dans ce dernier département s'était faite, comme partout ailleurs, par le parti révolutionnaire en petite minorité; car on n'avait compté à Notre-Dame que six cent soixante-quatre électeurs, dont cinq cents donnèrent leur voix à Gobel. L'abbé Sieyes, qui était le premier sur la liste des candidats, avait refusé par une lettre rendue publique. Ce fut alors seulement qu'on jeta les yeux sur Gobel, qui fut élu le 13 mars 1791. Il opta pour Paris, comme on devait s'y attendre.

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Le 17 du même mois, on se réunit à Notre-Dame. Là M. de Pastoret, président du corps électoral, proclama le nom de l'abbé Gobel. Ensuite il prononça un discours sur les devoirs de l'épiscopat, qui fut fort applaudi. L'abbé Gobel y répondit par une homélie pleine

(1) Moniteur, séance du 2 janvier 1791. (2) Ibid.

de sentiments religieux et de principes constitutionnels (1). Aussitôt une décharge d'artillerie annonça cette nouvelle aux Parisiens; une messe fut célébrée, et un Te Deum exécuté par la musique de la cathédrale. L'on vit ensuite sortir de l'église, croix et bannière en tête, une longue et brillante procession, qui était composée de l'évêque, de prêtres jureurs, d'une grande suite d'hommes revêtus des magnifiques habits en usage dans ces circonstances, et enfin des électeurs. La procession était précédée et suivie de gros détachements de la garde nationale, avec leur musique et leurs drapeaux. Elle fit lentement le tour de l'île au milieu d'une foule de spectateurs, et conduisit le nouvel élu au palais épiscopal, qu'il devait désormais occuper. L'illumination générale commandée pour le soir donna un air de fête à cette journée (2). Ce même soir, Gobel se rendit au club des Jacobins, qui avait beaucoup contribué à son élection, pour le remercier de ses bons offices, en demandant l'apocalypse, c'est-à-dire l'affiliation. Dans sa harangue, qui fut fort applaudie, il informa les jacobins qu'il venait puiser au milieu d'eux des leçons de sagesse, de modération et de civisme (3).

Mais tout n'était pas fini pour le nouvel élu. Il fallait recevoir l'institution canonique, que le club des Jacobins ne pouvait donner. Gobel s'adressa successivement à Loménie de Brienne et à M. de Jarente, évêque d'Orléans; mais il fut refusé par ces deux prélats, quoiqu'ils

(1) Style du Moniteur.

(2) Hist. parlem., t. IV, p. 442.

(3) Hist. du Clergé depuis la convocat. des états généraux, t. III, p. 199. Mémoires d'Auribeau, t. II, p. 808.

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