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en tribune populaire; tels sont MM. Torné et Fauchet. A Nancy, à Sedan, à Cambrai, à Oleron, à Agen, on a nommé des moines. Strasbourg, Colmar, Dijon, Langres, Saint-Claude, Reims, Tarbes, Nimes, ont reçu pour évêques des professeurs ou des directeurs de collége, qui n'avaient d'autre mérite que d'avoir inspiré à leurs élèves l'amour de la révolution. A Nantes, l'élection de l'évêque fut une affaire d'argent. Minée, qui y était entièrement inconnu, y fut élu par les efforts du président de l'assemblée électorale, nommé Coustard, à qui on avait fait remise d'une somme de six mille francs qu'il devait au beau-frère de l'élu (1).

Les évêques, qui voyaient envahir leurs siéges, se récrièrent de nouveau dans des mandements et des lettres pastorales; ils déclarèrent les élections nulles et sacriléges. C'était un devoir de leur charge de parler, d'écrire, de crier et de protester. Mais, en criant et en protestant, ils avaient contre eux la tourbe des clubs, qui les dénonçait à l'Assemblée nationale comme des conspirateurs, comme des artisans de troubles. Pendant les trois premiers mois de l'année 1791, on n'ouvrait presque pas une séance de l'Assemblée sans la lecture de pareilles dénonciations. Bien des auteurs y ont ajouté foi: s'ils s'étaient donné la peine d'examiner d'où elles venaient et quel en était le but, ils en auraient porté un autre jugement. Ces dénonciations étaient l'ouvrage des clubs, l'effet de la haine et de la calomnie, et avaient pour but d'exciter le peuple et l'Assemblée nationale contre les évêques, afin de les forcer à

(1) Tresvaux, Hist. de la Persécut. révol., t. I, p. 227.

quitter leurs diocèses et leur patrie. C'est par les évêques que la persécution a commencé, parce qu'ils étaient les premières colonnes d'un édifice qu'on voulait abattre. Mais remarquons du moins la manière injuste dont on a procédé contre eux. Les évêques ont renfermé constamment leur discussion dans le cercle d'objets religieux. Bien loin d'avoir poussé à l'insurrection, ils ont employé tous leurs efforts pour en détourner les pasteurs et les fidèles. Toujours ils ont recommandé de n'opposer aux lois injustes et antichrétiennes qu'une résistance passive. « Nous sommes << tous également, disait l'évêque de Langres, et les << enfants de l'Église, et les enfants de la patrie. Pas<< teurs et troupeaux, nous devons à l'une de lui << obéir constamment; à l'autre, de ne la troublerja« mais (1). » Tels étaient le principe et la ligne de conduite de tous les évêques. On ne trouve pas dans leurs lettres pastorales un seul mot qui tendit plus ou moins à provoquer les peuples à l'insurrection. Dans les pays même où le peuple catholique s'est révolté, le clergé y est resté étranger. L'impulsion ne venait pas de lui; mais l'Assemblée nationale, séduite par les rapports des révolutionnaires de province, en a toujours accusé les évêques. Elle ne pouvait comprendre que les peuples, si profondément blessés dans leurs devoirs de conscience, pussent se révolter d'eux-mêmes, sans y être excités par personne, et même contre l'avis des pasteurs. L'Assemblée, au lieu de jeter la pierre aux autres, devait s'en accuser elle-même; car c'est elle qui a excité à la ré

(1) Instruction pastorale, t. I, p. 12.

volte en attaquant la liberté des cultes, qu'elle avait si solennellement garantie. C'est elle qui a mis les armes aux mains du peuple, en voulant le forcer, contrairement à la loi, à pratiquer un culte que repoussait sa conscience. C'est elle encore qui a provoqué au désordre, en autorisant tous les crimes pour empêcher l'exercice du culte catholique. Quant aux évêques, ils n'y sont pour rien, sinon qu'ils en deviennent victimes. Les accusations portées contre eux sont vagues, et ne reposent sur aucun fait. Malgré les poursuites judiciaires, malgré l'inquisition qu'on exerçait autour d'eux, on n'a jamais pu découvrir aucune trame, ni aucun coupable; c'est un fait acquis à l'histoire. Ils protestaient sans doute; mais ils en avaient le droit et le devoir.

<< On peut, disait M. de Hercé, évêque de Dol, << dans une lettre pastorale; on peut nous ôter nos << biens, nous chasser de nos siéges, nous priver de «< la liberté et même de la vie; mais on ne peut ja<< mais nous ôter le droit que nous avons de vous « instruire. >>

Écoutons à ce sujet un membre de l'Assemblée qu'on n'accusera certainement pas d'être trop favorable au clergé : c'est Robespierre. Des troubles suivis de meurtres avaient eu lieu à Douai, à l'occasion du chargement d'un bateau de blé destiné pour Dunkerque; on les attribuait aux écrits fanatiques du clergé, qui y était entièrement étranger: mais il n'y avait plus de trouble nulle part, sans qu'on en accusât les prêtres. On demanda donc un décret sur les peines à infliger aux ecclésiastiques qui, soit par leurs discours, soit par leurs écrits, excitent le peuple à la

révolte (1). Robespierre, qui, à cette époque, avait encore conservé quelques règles de justice, s'exprima ainsi :

« Le décret qu'on demande serait du plus grand danger pour la liberté publique : il serait contraire à tous les principes. On ne peut exercer de rigueur contre personne pour les discours, on ne peut infliger aucune peine pour des écrits (Murmures) : rien n'est si vague que les mots de discours, écrits excitant à la révolte. Il est impossible que l'Assemblée décrète que des discours tenus par un citoyen quelconque puissent être l'objet d'une procédure criminelle. Il n'y a point ici de distinction à faire entre un ecclésiastique et un autre citoyen. Il est absurde de vouloir porter contre les ecclésiastiques une loi qu'on n'a pas encore osé porter contre tous les citoyens. Des considérations particulières ne doivent jamais l'emporter sur les principes de la justice et de la liberté. Un ecclésiastique est un citoyen, et aucun citoyen ne peut être soumis à des peines pour ses discours; et il est absurde de faire une loi unique et dirigée contre les discours des ecclésiastiques...J'entends des murmures, et je ne fais qu'exposer l'opinion des membres qui sont les plus zélés partisans de la liberté; et ils appuieraient eux-mêmes mes observations, s'il n'était pas question des affaires ecclésiastiques.» (Murmures au côté gauche) (2).

On a pu murmurer à ce discours, mais on n'a pas essayé de le réfuter. Chapelier a avoué au contraire franchement << qu'on ne pouvait prononcer isolément

(1) Moniteur, 21 mars 1791.

(2) Ibid.

<«< aucune peine contre les discours, et encore moins <«< contre les discours des ecclésiastiques (1). »

Et en effet, que pouvait-on reprocher aux évêques dénoncés à la tribune nationale et poursuivis pour crime de lèse-nation? C'était de s'être servis de la voie de la presse, ouverte à tout le monde, pour détourner les électeurs de procéder à de nouveaux choix, pour les prier et les supplier de ne point participer à un acte qui allait diviser l'Église et le royaume, pour leur faire connaître la vraie constitution de l'Église, la nullité des nouvelles élections, et le schisme qu'elles allaient causer. Voilà tout leur crime, et tous les évêques en étaient coupables. Ils ont obéi à un devoir impérieux, mais ils se sont abstenus de toute discussion politique, pour se renfermer rigoureusement dans le cercle de la théologie. M. de Marbeuf, archevêque de Lyon, avait adressé le 8 février, aux électeurs du département de Rhône-et-Loire, et à tous les fidèles de son diocèse, un avertissement pastoral touchant l'élection qu'on se préparait à faire d'un évêque métropolitain de Lyon. Il s'était borné à y montrer la nullité et le crime de cette prétendue élection, l'intrusion de celui qui serait nommé, et l'invalidité de tous les actes de juridiction qu'il oserait faire. Il avait fini par faire sentir aux électeurs la faute grave dont ils se chargeraient devant Dieu, en participant à cet acte schismatique et sacrilége (2).

Les évêques de la Bretagne, qui étaient le plus inculpés, n'avaient fait que remplir le même devoir.

(1) Moniteur, 21 mars 1791.

(2) Tresvaux, Hist. de la Persécut. révol. en Bretagne, t. I, p. 181.

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