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pourquoi il fut choisi de préférence. Il célébra la messe assisté de deux cents prêtres vêtus d'aubes, avec une ceinture tricolore. L'abbé Louis remplissait les fonctions de diacre, et l'abbé Gobel celles de prêtre assistant. La plupart de ces officiants feront un peu plus tard, à divers degrés, l'affliction de l'Église.

Après la messe et le Te Deum, la Fayette descendit de son cheval, se dirigea vers l'autel, y déposa son épée, et prononça au nom des troupes et des fédérés le serment de fidélité à la nation, à la loi et au roi. Au même instant tous les bras se levèrent, toutes les voix crièrent: Je le jure! Mais le moment le plus solennel fut celui où le roi, se levant à son tour, prononça les paroles suivantes : Moi, roi des Français, je jure d'employer tout le pouvoir qui m'est délégué par la loi constitutionnelle « de l'État, à maintenir la constitution décrétée par « l'Assemblée nationale et acceptée par moi, et à faire <«< exécuter les lois. » Un tonnerre d'applaudissements éclata aux paroles du roi; des salves d'artillerie se firent entendre dans toute la France, car des canons avaient été disposés de distance en distance et dans toutes les directions, jusqu'aux extrémités du royaume. Les premières décharges faites à Paris donnèrent le signal; chaque pièce de canon le reçut, et le transmit successivement avec rapidité; en sorte qu'au moment où le roi prêta serment, une immense explosion se fit entendre dans toute la France, et manifesta l'allégresse du peuple tout entier. Le roi avait à peine achevé, que la reine, prenant le dauphin entre ses mains, le montra à la foule, en disant : « Voilà mon fils, il se « réunit ainsi que moi dans les mêmes sentiments. >> Alors recommencèrent les cris de Vive le roi! Vive la

nation! Vive la reine! Vive le Dauphin! Ils furent suivis des acclamations de soixante mille fédérés, et de trois cent mille spectateurs qui confondirent leurs voix avec le bruit du canon pour produire l'explosion de joie la plus grandiose qu'on ait jamais entendue. Les réjouissances furent continuées pendant plusieurs jours aux Champs-Élysées et à la Bastille; on lisait sur la place de l'ancienne prison: Ici l'on danse. Toutes les classes se confondaient dans une même joie, dans un même enthousiasme. Les députations des provinces, après avoir assisté à toutes les fêtes et visité le roi, qui leur avait fait de nouveau un accueil tout paternel, s'en retournèrent chez elles, et firent dans leurs familles le récit de la magnificence des fêtes de Paris et de la bonté paternelle du roi.

La fête du 14 juillet semblait avoir rallié toutes les classes autour du trône constitutionnel, et avoir mis le sceau à une conciliation générale. Le roi, après tant de témoignages de respect et d'amour, après tant de serments prononcés dans le plus vif enthousiasme pouvait croire à l'amour et à la fidélité de ses sujets, et concevoir des espérances qu'il avait depuis longtemps perdues la reine devait se croire réconciliée avec le peuple. Cependant il manquait quelque chose à leur joie. Le roi n'avait tenu que le second rang au Champde-Mars; le héros de la fête était la Fayette, dont la popularité était montée ce jour à son apogée: jamais autant d'hommages n'avaient été rendus à un citoyen non couronné; le roi n'était à côté de lui qu'un subordonné. La cour se trouvait donc toujours dans son état d'humiliation, mais il lui était permis d'espérer ; les hommages et les serments qu'elle avait reçus

étaient sincères de la part des députés de la province et du plus grand nombre des Parisiens. La royauté n'était donc pas sans appuis. Mais ces appuis étaient peu solides; l'enthousiasme n'est qu'éphémère; le serment n'est qu'un vain mot lorsqu'il n'a pas sa racine dans la conscience et sa base dans la religion. Si ceux qui avaient juré fidélité au roi constitutionnel avaient regardé leur serment comme une chose sacrée et inviolable, comme une promesse faite à Dieu, dont il n'est jamais permis de s'écarter, oui, alors le trône aurait été bien assuré mais il n'en était pas ainsi. La religion s'était affaiblie dans tous les cœurs; l'Assemblée nationale lui avait donné, il y avait seulement deux jours, un coup mortel par la constitution civile du clergé; l'autel du Champ-de-Mars avait été occupé par des hommes dont le cœur était loin de Dieu. Le serment ne pouvait donc pas avoir une grande valeur.

L'anniversaire du 14 juillet avait été la fête de la bourgeoisie, la fête du parti modéré qui dominait alors par une immense majorité, et qui voulait arrêter la révolution, l'empêcher d'aller plus loin, et la concilier avec le trône constitutionnel. Cette fête ne pouvait convenir au parti jacobin qui voulait seul dominer, et qui, pour parvenir, avait fait les journées des 5 et 6 octobre : aussi étaient-ils furieux contre le parti modéré, et principalement contre ceux qui le dirigeaient. Ils résolurent de l'abattre en lui ôtant toute sa popularité. La Fayette devint le premier objet de leurs attaques. On se moquait de son cheval blanc, des hommages qu'on lui avait rendus; on attaquait également le roi et toutes les autorités constituées. La fête du 14 juillet

leur servit de thème de déclamations. Écoutons Loustalot dans ses Révolutions de Paris:

« Un peuple d'idolâtres, dit-il, qui ne voit dans notre fête que M. de la Fayette et puis le roi, et qui ne se voit point lui-même; ses députés qui dansent pour braver la pluie, d'autres qui tuent à coups d'épée les chiens qui passent dans la rue; des Français qui reçoivent des couleurs blanches, qui souffrent un drapeau blanc sur le trône; un roi qui essuie à la chasse les pluies les plus abondantes, et qui ne marche pas, parce qu'il pleut, au milieu de la nation délibérante et armée; qui ne prend pas la peine d'aller de son trône à l'autel pour donner à un peuple qui lui alloue vingt-cinq millions malgré sa détresse, la satisfaction de l'y voir prêter serment; les sciences, les arts, les métiers, le courage civique, les vertus, sans honneur et sans récompense dans ce beau jour; les vainqueurs de la Bastille ignorés; et pas un mot, pas un seul hommage rendu à la mémoire de ceux qui, à pareil jour, périrent sous les murs de cette horrible forteresse. Ils (les fédérés) ont baisé les bottes de la Fayette. S'il y avait eu alors quelque élection, il eût été à craindre que la folie populaire ne prodiguât à son cheval les honneurs que Caligula avait décernés au sien (1). »

Cet article tenait à l'exécution d'un plan qu'il faut bien remarquer. J'ai dit précédemment quel motif avait poussé les chefs des clubs à transporter, de Versailles à Paris, le siége du gouvernement. Ils voulaient tenir le roi sous leur dépendance, et dominer

(1) Hist. parlem., t. III, p. 273.

l'Assemblée nationale. Ils y étaient parvenus jusqu'à un certain point, comme nous avons eu l'occasion de le voir. Mais là ne s'arrêtaient pas leurs vues : ils avaient formé le projet de dissoudre, aussitôt qu'ils le pourraient, l'Assemblée nationale, de renverser le gouvernement, et de lui en substituer un autre dont ils auraient été les chefs. La Fayette, qui, de concert avec la majorité de l'Assemblée, s'était emparé du pouvoir, avait déjoué leurs desseins et déconcerté leurs efforts. La fête de la Fédération, célébrée avec tant d'éclat et d'enthousiasme, avait donné une espèce de sanction solennelle à la conduite du général et à celle du parti modéré c'est pourquoi cette fête était si odieuse au parti jacobin et anarchique. Loustalot vient de nous donner des preuves de son envie et de son mécontentement. La journée avait été triste pour les chefs des clubs, parce qu'elle semblait opposer une barrière infranchissable à l'exécution de leurs noirs desseins. Mais les anarchistes ne désespéraient de rien; ils avaient à leur disposition de puissants moyens, la presse et les clubs avec ces deux leviers on peut renverser le gouvernement le mieux affermi et bouleverser le monde : comme on peut le penser, ils ne manquèrent pas de les employer. Ils reviennent donc à leur ancien projet, se proposent de renouveler les journées des 5 et 6 octobre, de ramener le roi de SaintCloud à Paris, de le tenir sous bonne garde, de dissoudre l'Assemblée nationale, et de s'emparer du pouvoir. Ils y procédèrent de la même manière qu'avant les 5 et 6 octobre. On sait quel parti ils ont tiré du banquet des gardes du corps, de quelle manière ils ont fait contraster la magnificence de ce banquet avec la

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