صور الصفحة
PDF
النشر الإلكتروني

on doit cfpérer qu'il fera à même dé réfifter à l'attaque, du moins pendant quelque tems «. On demande encore fi ces renforts, envoyés par Washington à Sullivan, ne font pas un artifice? fi le Général Américain n'a pas concerté fon plan d'opérations & de rufes avec le Vice-Amiral François ? Il paroit, d'après ces lettres, ou du moins d'après ce qu'on en publie, que le Général & l'Amiral Anglois donnent tête baiffée dans le piége qu'on leur tend. L'incertitude où ils font en Amérique des deffeins de M. le Comte d'Eftaing, donne de juftes inquiétudes au Ministère, qui ne peut pas de fi loin effayer de les deviner, & qui à fon tour, examinant les points qui peuvent être menacés, craint beaucoup pour Terre-Neuve, & fe hâte de prendre des mesures pour défendre cette ifle. Il a expédié des ordres pour faire partir au plutôt 3 vaiffeaux ligne, qui iront renforcer l'Amiral Montagu; mais à fuppofer que fes craintes foient fondées, de quelle reffources feront ces vaiffeaux? & s'il fait attention au long tems qu'a mis l'Amiral Byron dans fon voyage défaftreux qui n'eft pas encore fini, peutil fe flatter que ces vaiffeaux arrivent affez tôt ?

Toutes les lettres particulières préfentent les troupes à New-Yorck dans une fituation très-déplorable; elles manquent de tout ; & les lettres du Général contiennent, dit-on, des demandes de toute efpèce, en vivres & en hardes, dont elles ont befoin, fur-tout à l'approche de l'hiver. On ne croit pas qu'elles puiffent le paffer dans les ifles de New-Yorck & de LongInland. Il leur faut abfolument des quartiers plus étendus. Si les derniers états de revue font exacts, elles montent à 30,000 hommes qu'il faut néceffairement loger. Auffi fuppofe-t-on au Général Clinton le projet de paffer dans le Continent avec une partie de fon armée, auffi-tôt que les Commiffaires pacificateurs feront partis Ces derniers ont perdu toute efpérance de fuccès. L'un d'eux, le Gouverneur Johnftone, au moment de l'apparition de l'efcadre de Tou

lon, s'empreffa de remplacer par l'épée l'olive de' paix dont il étoit chargé; il demanda de fervir comme volontaire à bord du vaiffeau Amiral.

Malgré la fituation critique des affaires, le Gouvernement ne paroît pas encore disposé à renoncer à fes projets de conquête en Amérique. On affure qu'il y fera une nouvelle campagne; mais on ne conçoit pas quelles efpérances de fuccès il peut avoir, après en avoir obtenu fi peu, lorfqu'il n'avoit affaire qu'à l'Amérique feule. Aujourd'hui, il a à combattre une Puiffance redoutable, contre laquelle il n'aura pas trop de toutes les forces. La guerre menace d'embrâfer l'Europe entière, & c'eft dans l'incendie général que nous pouvons trouver les reffources de quelques diverfions. On paroît perdre tout espoir de voir rétablir la paix entre l'Empereur & le Roi de Pruffe; fi on ne parvient pas à les réconcilier dans le cours de l'hiver, la guerre au printems prochain recommencera avec plus de fureur, & deviendra peut-être plus générale; nous ferons peut-être obligés d'y pren dre part, ce qui entraîneroit des dépenfes énormes, dont la Nation redoute la charge, & qu'elle fera obligée de fupporter, fi le Ministère peut réuffir par ce moyen à engager la France dans la querelle, & à divifer les forces. Nous ne nous flattons point de voir terminer nos démêlés particuliers avec cette Puiffance. On compte moins que jamais fur le fuccès de la médiation de l'Espagne, & on s'attend à la voir au premier moment prendre le parti que lui prefcrit le pacte de famille. Depuis quelque-tems les couriers ne ceffent d'aller & venir de cette Cour à celle de Madrid; en moins de cinq jours nous en avons expédié 4 au commencement de ce mois. Cette activité prouve la chaleur qu'on met dans les négocia tions, mais elle n'en prouve pas de même le fuccès. On s'épuife en conjectures fur leurs effets, mais ce ne font que des conjectures, & le plus fage eft de laiffer à l'évènement qui ne peut pas être éloigné,

l'éclairciffement de ces mystères politiques. Il ne faut. peut-être pas fe flatter de la paix avant une action im portante pour rendre le vaincu plus docile fur les propofitions. On elpéroit depuis le départ de l'Amiral Keppel, que cet évènement décifif ne pouvoit pas tarder; on doute aujourd'hui que cet Amiral ait reçu ordre de fe battre; on préfume auffi que le Comte d'Orvilliers ne l'a pas reçu, & que les deux efcadres ne font forties que pour protéger les flottes marchandes que chacune des deux Puillances attend dans fes ports. Ce but a du moins été rempli. Notre flotte marchande de la Jamaïque, celle des ifles fous le Vent & celles que nous attendions d'Espagne, de Portugal & de la Méditerranée, font arrivées heureufement, à l'exception de quelques bâtimens qui font reftés derrière, & pour lesquels on n'eft pas fans inquiétude.

Au milieu de nos procédés hoftiles contre la France, on remarque avec raison comme une fingularité que la communication entre Douvres & Calais refte ouverte comme en pleine paix; il est vraisemblable qu'elle ne fera fermée que lorfque la guerre aura été formellement déclarée. Jufqu'à préfent les évènemens fe réduisent à la petite guerre fur mer; nos papiers publics ne font remplis que d'annonces de prifes faites par nos Coriaires; mais dans ces calculs toujours exagérés, on compte beaucoup de bâtimens neutres, que nos Armateurs prétendent chargés pour le compte des François. Il en résulte des plaintes trèsgraves; le Comte de Suffolck a reçu au sujet de quel ques vaifleaux pris fur les Hollandois, un Mémoire très-preffant, & qui a embarraffé le Ministère. En effet, quard on feroit convenu de la légalité de ces prifes en cas de guerre, cette légalité exifte t-elle aujourd'hui qu'il n'y a point de déclaration formelle. Tant qu'il n'y en aura point, les navigateurs des peuples neutres ne font-ils pas autorifés à commercer par-tout où ils voudront, pour les Nation qu'ils

&

voudront, & doit-on les punir de leur confiance au droit des gens? Ce Mémoire a produit son effet, 3 bâtimens Hollandois pris par des vaisseaux du Roi ont été relâchés ; on attend à préfent ce que prononcera l'Amirauté fur ceux que nos Armateurs ont pris & conduit dans nos ports.

Les Armateurs François & Américains n'épargnent pas davantage nos vaiffeaux ; il fe paffe peu de jours que nous ne recevions des lettres allarmantes. L'Armateur Américain, le Général Mifflin, a établi sa croifière fur la route du commerce de la mer Baltique, & dans le cours du mois dernier, il a pris 23 bâtimens venant d'Archangel, de Pétersbourg, de Narva, de Norwège &c. Comme la plupart étoient chargés de matériaux pour les chantiers de l'Amirauté, & que pendant l'hiver la Baltique & la mer Blanche ne font point navigables, on fent quels embarras il en peut réfulter, dans un moment où les ports de l'Amérique, qui Fourniffoient notre marine, nous font fermés. Les Armateurs ennemis pouffent la hardieffe jufqu'à s'approcher de nos côtes, & y tenter des defcentes; des lettres de Dublin nous apprennent qu'ils en ont fait dernièrement une fur les côtes feptentrionales de l'Irlande; ils ne le font pas rembarqués fans avoir laillé des traces de leur expédition, & actuellement les habitans veillent avec beaucoup de foin à empêcher toute entreprise de cette elpèce.

Le tort que notre commerce éprouve depuis fi long-tems, a diminué les reffources de la Nation, & a rendu plus difficile la levée de nouveaux subsides que le Gouvernement ne tardera pas à lui demander; il s'attache à lui promettre des alliances puiffantes; mais ces alliés exigeront fans doute de gros fubfides; nous favons que nous n'en manquerons pas dès que nous pourrons les payer; mais ferons-nous en état de le faire? La Pruffe & la Ruffie nous fourniront-elles les fecours que nous en attendons, en

hommes & en vaiffeaux, dans le moment où elles ont befoin elles-mêmes de toutes leurs forces? & dans le cas où elles le pourront & le voudront, les fourniront-elles gratuitement? Toutes ces promeffes flatteufes que le Gouvernement nous fait, ne paroiffent à bien des perfonnes que des mots.

On arme actuellement une nouvelle flotte qui doit fe raffembler à Spithead; elle fera, dit-on, d'un vaiffeau de 100 canons, de 2 de 90, de 10 de 74, & de 2 de 64. On prétend qu'elle eft deftinée pour la Méditerranée, où notre commerce exige de la protection, & où Minorque en a besoin pour fa défenfe. On affure ici que fi cette ifte venoit a être attaquée, elle feroit hors d'état de réfifter, n'y ayant aucun. vaiffeau en mer pour la fecourir, & les troupes de terre qui la défendent ne confiftant que dans le régiment de Manchester de 1200 hommes de nouvelle levée, peu propres au fervice, & en 600 Hanovriens.

On a parlé pendant quelque tems d'un changement dans le Ministère; on ajoute qu'il a été proposé au Lord Rockingham & à fes amis de rentrer dans le Ministère; mais on a excepté le Duc de Richemont

que

[ocr errors]

le Roi a réfolu de ne jamais admettre dans fes Confeils. On affure que cette exception a fait avorter la négociation. C'eft la feconde fois que le Marquis de Rockingham donne cet exemple de défintéressement; en 1767, il refufa de reprendre dans l'Adminiftration la place qu'il avoit quittée l'année précé-). dente, à moins que le Général Conway ne confervâc fa place de Secrétaire d'Etat. On dit aujourd'hui que' le Roi eft décidé à garder le Ministère actuel fur le pied où il eft, & qu'il a défendu à chacun de ceux qui le compofent, de fonger à fa démiffion dans les circonftances préfentes.

Le Général Carleton, arrivé du Canada le 12 de ce mois, a eu le 14 une audience du Roi; elle a été très-longue, & rien n'en a tranfpiré; il lui a fans. doute rendu compte de l'état de cette Province, où il

« السابقةمتابعة »