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» fecond Acte avec Aaron? Celle de ce » même Amoraffan, au quatrième Acte, entre fon père qui veut l'entraîner aux pieds du Trône, & Sémire qui l'appelle » à fon armée ? S'il peut y avoir quelque » mérite à trouver aujourd'hui des fitua» tions neuves, fi ce mérite demande grâ»ce pour les défauts, je ne fuis pas fur» pris que l'envie le contefte; mais quand » on veut être jufte, eft-ce bien elle qu'il » faut confulter?,

On peut ajouter à cette réponse une réHexion générale. C'eft qu'il faut foigneufement diftinguer entre les moyens de l'art & fes effets. Parmi les premiers, il y en a, qui, depuis qu'on fait des Tragédies, font devenus communs & appartiennent à tout le monde; mais les combinaifons nouvelles de ces mêmes moyens appartiennent au talent, & les réfultats, les effets qu'ils produifent font vraiment fon ouvrage. Ainfi les confpirations tramées par l'amour ou par la vengeance, les rivalités, les jaloulies font des refforts généraux que chacun peut mettre en œuvre, & fi nos Tragé dies étoient examinées fous ce point de vue, on les trouveroit prefque toutes femblables les unes aux autres ; & ce fophifme n'eft pas échappé à la mauvaise foi des détracteurs de notre Théâtre. Mais c'eft furtout par leurs effets qu'il faut juger les ou

vrages d'imagination : & alors ces prétendues reffemblances difparoiffent. Des exemples feront mieux fentir ce principe. Je fuppofe qu'un critique de mauvaise foi (comme il y en a tant) veuille déprécier Radamifte. Voici comme il raifonnera: Rhadamiste n'est autre chofe que Mitridate; car dans l'une & l'autre pièce c'eft un père qui eft le rival de fes deux fils, & Zénobie eft aimée de Pharafmane, de Rhadamiste & d'Arfame, comme Monime eft aimée de Mitridate, de Xipharès, & de Pharnace. Cet expofé feroit vrai, & cependant le critique auroit tort, & Rhadamifte ne reffemble point du tout à Mitridate, parce que cette rivalité du père & des deux fils, qui eft la même dans les deux pièces, produit des effets très-différens, nés de la différence des fituations & des caractères. Voici un exemple encore plus frappant. En raisonnant comme raisonnent nos Critiques d'aujourd'hui, il fe trouveroit que Polieucte, Alzire & Rhadamifte feroient la même chofe; cat (pourroient-ils dire) Alzire en présence de Gufman avoue fon amour pour Zamore, comme Zénobie en présence de Rhadamifte déclare fa paffion pour Arfame, & Alzire demande à Gufman la grâce de Zamore, comme Pauline implore le fecours de fon mari pour fauver la vie à fon amant. Ces faits font vrais, & cependant pour tout

homme de bonne foi, Polieucte, Alzire & Rhadamiste font trois Ouvrages trèsdifférens. Mais la bonne foi en fait de critique eft aujourd'hui ce qu'il y a de plus rare. On n'ajoutera rien fur cette Tragédie. C'est au Public qui l'a applaudie au Théâtre à la juger à la lecture, & tout Écrivain qui a beaucoup d'ennemis ne peut rien attendre que du temps.

Hiftoire de l'Académie Royale des Sciences année 1774, avec les Mémoires de Mathématique & de Phyfique pour la même année. A Paris, de l'Imprimerie Royale, & fe trouve à l'Hôtel de Thou, rue des Po.tevins, 1 vol. in-4o. L'ILLUSTRE Fontenelle, fi décrié dans fa jeuneffe par des Littérateurs célèbres *, trèsfupérieurs à lui comme Ecrivains, très-inférieurs comme Philofophes, & fi respecté dans fa vieillesse par tous fes contemporains, parce qu'il eut le bonheur de furvivre à fes ennemis, doit à l'Hiftoire de l'Académie des Sciences, qu'il a faite pendant quarante ans, la partie la plus réelle & la moins conteftée de fa gloire.

La Compagnie Savante, dont il a été fi long-temps le digne organe, doit elle-même à l'Hiftoire que Fontenelle en a faite, une

* Defpréaux & Racine.

partie de fa célébrité; car fi le vrai mérite de cette Compagnie eft fondé fur les excellens Mémoires qui rempliffent fes volumes, fa célébrité eft l'effet du grand nombre de voix qui fe font élevées en fa faveur; & c'eft l'Hiftoire de Fontenelle qui a fait élever toutes ces voix, parce qu'elle a, pour ainfi dire, rendu les Sciences populaires, en mettant les gens du monde à portée de les connoître, ou, ce qu'ils aiment mieux encore, à portée d'en parler fans les avoir apprifes.

Cette Hiftoire, fi généralement & fi juftement eftimée, a pourtant deux grands défauts; elle eft fouvent gâtée dans la partie phyfique par les chimères de la Philofophie Cartéfienne; & dans la partie Mathématique, par une fauffe métaphyfique, qui, malheureufement, fert de bafe à la Géométrie de l'infini du même Auteur.

Mais la plupart des matières qu'il a raitées dans l'Hiftoire de l'Académie, y font exposées avec la plus grande clarté, & même avec tout l'agrément dont la févérité du fujet les rend fufceptibles; les idées des Académiciens y font très-nettement rendues, & fouvent mieux que dans leurs propres Mémoires; les éloges fur-tout font la partie de cette Hiftoire la plus intéreffante, la plus agréable, celle qu'on relit tous les jours & le vrai modèle de la

manière

manière dont on doit écrire l'Hiftoire des Savans, quand on veut à la fois plaire & inftruire. Ces éloges ont d'ailleurs deux avantages précieux, & les plus grands peut-être qu'un vrai Philofophe puiffe defirer à fes écrits. Cette foule d'ignorans, qui eft fi tentée, foit par envie, foit par fottife, de regarder l'étude des Sciences comme une occupation creufe & frivole, apprend en lifant Fontenelle combien elles font intéreffantes & utiles, & combien les fages modeftes qui les cultivent dans le filence, fouvent ignorés ou négligés de leurs contemporains, méritent d'en être refpectés. En même-temps, les génies heureux qui fe fentent appelés par leurs talens à réculer les bornes des connoiffances humaines, font entraînés par cette lecture à marcher fur les traces de ceux qui les ont précédés avec éclat dans cette carrière, Plus d'un jeune homme, que fa famille auroit voulu enlever aux Sciences', mais que la nature leur avoit deftiné, auroit peut-être été perdu pour elles, fi l'éloge des Léibnitz & des Newton ne l'eût forcé de fuivre ces grands Maîtres, & d'obéir à la nature. Elle avoit préparé le terrein, Fontenelle l'a mis en valeur; par-là il eft devenu, peut-être, fans en avoir eu l'am bition, un des bienfaiteurs les plus fignalés de l'efprit humain, en contribuant à faire 5 Septembre 1778.

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