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nés. Certes, quels que soient les ordres du Saint Père, et fallût-il mille fois sacrifier notre vie, nous espérons ne jamais donner un si funeste exemple. Mais, avec tout le respect et le zèle dont nous sommes capables, nous supplions le protecteur commun de l'Église, et plus encore notre protecteur et notre père, de ne pas offrir aux ennemis de Dieu et aux nôtres une occasion si favorable pour insulter et blasphémer contre nous la Sainte Église."

François de Borgia et Polanque ont une entrevue avec le Pape; ils commentent de vive voix le mémoire dont il a pris connaissance. Pie V avait un invincible attrait pour le chœur, et il disait aux Pères : « Ne mettez pas de lenteur à chanter, contentez-vous de prononcer distinctement; mais il est juste qu'au milieu des affaires vous vous réserviez un peu de temps pour vaquer propres besoins spirituels. Il ne faut pas, ajoutait-il souriant lui-même de sa pensée si poétiquement vulgaire, que vous ressembliez aux ramoneurs, qui, en nettoyant les cheminées, se couvrent de toute la suie qu'ils en retirent. »

à vos

Les deux Jésuites tenaient ferme; le Pape comprenait leurs raisons: aussi, à chaque argument, s'ingéniait-il à trouver un expédient. Dans son idée première, la Compagnie devait être astreinte à l'Office en commun; il en exempta les colléges; puis, sur de nouvelles observations, il consentit à ce que deux Pères seulement y assistassent. Borgia cependant finit par triompher de ses derniers scrupules; il était si convaincu, qu'il porta la conviction dans son esprit. Il n'en fut pas de même pour les voeux simples: le Pape lutta long-temps, et, le 16 mai 1567, le cardinal Alciat intima aux Jésuites l'ordre du Souverain. Cet ordre disait que les Pères ne pour

raient être admis au Sacerdoce qu'après leur profession des quatre vœux.

On bouleversait l'économie de l'Institut en détruisant le grade de coadjuteur spirituel; mais ce différend, qui aurait eu des suites sérieuses pour la Compagnie, s'accommoda par une transaction qui ne préjudiciait ni à la substance de l'Institut ni à l'autorité du Saint-Siége.

Cet éclair sans orage ne laissa point de traces entre Pie V et la Compagnie de Jésus; car, peu d'années après, en 1570, le Pape chargeait les Jésuites de la Pénitencerie de Rome.

La Chrétienté était en péril; l'union devenait donc plus nécessaire que jamais. En effet, les Turcs, que le Grand-Maître et les Chevaliers de Malte avaient repoussés des rivages européens, parlaient d'envahir les États de l'Église et le territoire vénitien. La mésintelligence régnait parmi les princes catholiques; leurs passions turbulentes, leur ambition, les guerres civiles que fomentaient les Hérétiques dans le dessein avoué de passer le niveau révolutionnaire sur la Religion du Christ et sur les monarchies; tout cela avait réveillé dans le cœur de Sélim II, fils et successeur de Soliman, un désir de vengeance et de prosélytisme mahométan. En 1570, ses vastes projets lui semblèrent mûrs; il espéra pouvoir les mettre à exécution. Prince guerrier et politique habile, il comptait autant sur la bravoure de fatalisme de ses troupes que sur les divisions dont l'Europe était le théâtre. Il la voyait sans lien d'unité; il débordait sur elle, et, ne laissant pas aux Catholiques le temps de concerter leur défense ou même de faire la paix entre eux pour se coaliser dans une guerre sainte, il s'emparait d'une partie de l'île de Chypre et menaçait l'Italie.

Pie V n'était pas homme à reculer en face d'un pareil

danger. Il y avait de la foi dans son cœur, de l'exalta11 tion dans sa tête, dans sa volonté une persistance qui souvent est du génie. Les monarques de la Catholicité étaient en désaccord; afin de triompher du Turc, le Pape conçoit la généreuse idée de les rallier autour de la bannière de l'Église. Le cardinal Alexandrini, son neveu, et le cardinal Commendon sont par lui nommés Légats a latere. Alexandrini va partir pour l'Espague, le Portugal et la France; Commendon se rendra auprès des cours d'Allemagne et de Pologne. Ce Cardinal était un diplomate dont le nom faisait autorité dans les négociations; mais il sentait lui-même si bien l'importance de son ambassade qu'il ne voulut s'en charger qu'à la condition d'avoir auprès de lui comme conseiller le jésuite Tolet i l'obtint. Alors le cardinal Alexandrini, qui avait à sa suite un nombreux cortège de prélats, demanda au Pontife de lui adjoindre François de Borgia en qualité de tuteur. Le Pape fit part au Général des Jésuites du désir de son neveu et de sa volonté souveraine. « Je connais votre état de souffrance, lui dit-il, mais votre crédit auprès des Rois d'Espagne et de Portugal, votre ascendant sur leurs ministres sont nécessaires au Saint-Siége dans ce moment solennel. Il s'agit des intérêts les plus chers de l'Église, du maintien de la Foi peut-être; et si votre santé altérée vous permet ce voyage, je souhaite bien vivement que vous l'entrepreniez.

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C'était la mort pour Borgia; mais la mort venant dans l'accomplissement d'un devoir; le Père François n'hésita point. Le 30 juin 1571, il se mit en route avec la brillante ambassade d'Alexandrini.

Le Cardinal Commendon et le Père Tolet partaient à la même époque pour le Nord. Les Jésuites avaient ad

mirablement préparé l'Allemagne à recevoir le principe d'union dont les envoyés du Saint-Siége allaient dévelople Canisius avait donné à leurs travaux aposper germe. toliques une direction et un ensemble qui promettaient enfin d'heureux fruits. La Pologne, en 1565, ouvrait ses provinces à la Compagnie; le Roi Sigismond lui accordait tous les priviléges dont jouissaient les autres Ordres religieux. Maximilien d'Autriche prenait la défense des Jésuites, que, dans une réunion des Électeurs de l'Empire, quelques princes, secrètement hérétiques, proposaient d'expulser. A cette déclaration Maximilien répondit : « Mon devoir est de battre les Turcs et non pas de persécuter les Jésuites. » Dans une assemblée des nobles de Bohême le Burgrave Jean de Lobkowitz s'écriait': « Ah! si la Compagnie de Jésus eût été instituée deux siècles plus tôt, et si elle eût pénétré dans notre Bohême, nous ne saurions pas aujourd'hui ce que c'est que l'Hérésie. »

Ces témoignages, rendus par les grands de la terre et sanctionnés par la confiance des peuples, portaient un rude coup aux sectaires; mais, sans pouvoir atteindre à la puissance de la Société de Jésus, ils ne se contentaient pas de l'envier. Des Colléges s'élevaient jusque dans la Lithuanie; il fallait arrêter cet essor; l'imposture servit encore une fois d'auxiliaire à la haine. La modestie dans le regard et dans la démarche, la chasteté si pleine de réserve des jeunes gens formés à l'école des Jésuites contrastaient d'une façon si tranchée avec les mœurs dépravées du siècle et avec la conduite dissipée des hommes de leur âge, que, dans l'Allemagne, il n'y eut qu'une voix pour accuser les maîtres et pour déplorer

Historia Societatis Jesu, provinciæ Bohemiæ, a Joanne Schmidt, tome 1, livre 111, page 19 (édit. de Prague, 1747).

le sort des élèves. L'imputation prenait sa source dans les dires de Jean Kessell, qui, après son expulsion de la Maison de Munich, avait déclaré que les Jésuites soumettaient leurs écoliers à une horrible mutilation. Co bruit fut accueilli et propagé dans l'Allemagne ; il donnait aux Hérétiques la clef de cette continence que le vice leur empêchait de comprendre. Albert, duc de Bavière, crut sage de ne pas laisser ainsi incriminer par d'outrageants soupçons une Compagnie à laquelle il était sincèrement attaché. On reprochait un crime. aux Jésuites; leur accusateur était dans la capitale de ses États. Albert ordonne une enquête : l'enquête a lieu en présence de tous les médecins de Munich, qui en dressèrent procès-verbal; elle est la justification la plus complète de tous les membres de la Société1.

Boileau a dit :

Le latin dans les mots brave l'honnêteté,
Mais le lecteur français veut être respecté.

Nous nous contentons donc de reproduire le texte de la calomnie et les résultats de cette affaire,

« Verum non multo post persimili in genere exoritur in Bavaria magno cum murmure infestus rumor, et latissime septentrione toto, impressis quoque libellis, vulga tur : Jesuitas, ut pueros ad castitatem sanctam compellant, eos eunuchos facere. Fœdiorem alii commentabantur causam. Res merito videbatur omnibus pro indigna, bonis atque sapientibus incredibilis: sed enim certum compertumque facinus nou affirmabatur modo, sed et palam demonstrabatur. Ipsemet, ad fidem faciendam cum obsignatis chirurgorum, qui inspexerant testimoniis, circumducebatur puer. Libet totius fabulæ seriem redordiri. Puer annorum quatuordecim, Joannes Kesselius nomine, qui Monachiensis Collegii scholas aliquandiu frequentarat, et ob mores haud bonos fuerat ejectus, ea erat natura, ut, quoties liberet, introrsum testes revocatos apparere non sineret. Inde nequam procaci joco, ut famulos hæretici Comitis falleret, excisos sibi a Gedefrido Hanatz, quem Collegii Monachiensis Economum vocabat, affirmavit. Religiosus erat ex adjutorum ordine modestus, ac pius, qui Collegio opsonia, el quæ alia quotidianus postulat usus, emptitabat. Ubi decepti illi, reque prodita irrisi sunt, visum Hæreticis fundamentum est ad superstruendam infamiam mire factum : donis ac promissis puerum implent, idem affirmare ut pergat, edocentque quemadmodum pertentatus in judicio quam proxime ad veri speciem constanterque respondeat. Tum ad chirurgos sistitur Volfangi Palatini hæretici principis. Sine cunctacione illi pronuntiant eviratum puerum. Concinnatur et scribitur fabula, prælo mandatur, circum omnes Dynastas Germaniæ sacros popularesque disseminatur. Albertum Bavariæ Ducem, qui Societatem usque eo complectebatur, ea fama commovit, præsertim

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