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où les intérêts de la Foi étaient compromis. L'âge et les fatigues ne lui avaient rien fait perdre de sa premiè e énergie. C'était, avec Salmeron et Rodriguez, le dernier des dix compagnons d'Ignace. Ce titre d'honneur lui imposait envers la Compagnie des devoirs qu'il remplissait comme dans les beaux jours de sa maturité.

Tant de veilles consacrées à l'administration ne satisfaisaient point l'ardeur de François de Borgia. Ignace de Loyola et Laynès avaient toujours été en correspondance directe avec les rois de l'Europe. Ces princes étaient presque tous alliés à la famille de Borgia: ce fut un double titre pour eux. Ils le consultaient dans les affaires religieuses; ils l'entretenaient de leurs intérêts politiques, et l'ancien duc de Gandie, si détaché des choses de la terre, trouvait sans cesse dans son cœur une nouvelle sollicitude pour de nouveaux besoins. Aux uns, il recommandait la gloire de Dieu; aux autres, il parlait des obligations qu'entraîne le gouvernement des peuples; à tous il donnait des avis appropriés à la nature de leur pouvoir ou de leur caractère. Les monarques lui écrivaient de leur propre main : Borgia devait donc leur répondre de la même manière. Cette vaste correspondance aurait suffi seule à occuper la tête la plus assidue au travail. Pour cet homme, accablé sous le poids des infirmités, elle n'était qu'une distraction. Quant on parcourt toutes ces lettres écrites au courant de la plume par un moribond et pourtant si pleines de la connaissance du cœur humain, on commence à s'apercevoir qu'il n'est rien d'impossible à celui qui veut. Ces correspondances, si variées dans leur multiplicité, ne détournaient pas le Père François de ses fonctions. Ses heures de prières et de surveillance de la Compagnie étaient réglées; il les employait comme elles devaient être employées; mais afin

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de donner satisfaction à chaque œuvre, nait sur son sommeil. Sans s'inquiéter du soin de sa santé, il s'acquittait avec une merveilleuse aptitude de toutes les occupations dont son zèle acceptait la charge.

En 1567, Pie V, cédant à d'anciennes préventions et par respect peut-être pour la mémoire de Paul IV, son protecteur et son ami, renouvelle aux Jésuites la demande de ce Pape; il veut supprimer le règlement qui les dispense des offices du choeur, et l'engagement par lequel ils se lient à l'Institut sans réciprocité. Une commission de Cardinaux était réunie dans ce temps-là pour veiller à la réforme des Ordres monastiques. Les Jésuites présentent un mémoire à la commission. Ce mémoire, véritable traité de politique sacerdotale, renferme des considérations si neuves sur la prière et sur le travail que nous le traduisons en entier, tel qu'il se trouve aux archives du Vatican.

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TRES-ILLUSTRES ET RÉVÉRENDISSIMES SEIGNEURS,

Puisque le Saint-Père, dont on ne peut mettre en doute la prudence et la profonde sagesse, nous a ordonné de parler librement et ouvertement sur deux points de notre Institut, voici ce que nous avons cru devoir proposer à votre examen, disposés toutefois à obéir plutôt qu'à disputer. Il nous paraît d'abord essentiel d'apprécier, lorsqu'il s'agit de modifier des lois, s'il existe ou non un motif suffisant pour le faire. Il faut que la loi soit certaine, constante, et, autant que cela est possible au milieu des vicissitudes de ce monde, éternelle; car si on change facilement, les choses même qui ne demandaient point à être transformées tombent aussi, ce qui entraîne peu à peu, mais inévitablement, une révolution complète dans les affaires publi

ques. C'est pourquoi les sages ont pensé qu'en présence d'un mal il valait mieux le tolérer que de mettre en péril toute la Constitution par le changement d'une seule loi. C'est bien plus important encore lorsqu'il s'agit des lois qui règlent les sociétés religieuses, confirmées par le Siége Apostolique, dans la crainte que les Ordres religieux et l'autorité des Souverains Pontifes, qui doit toujours être inviolable, ne viennent à perdre, au moins dans l'esprit des ignorants, quelque chose de la vénération qui leur est due.

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Notre Compagnie, confirmée par la puissance du Siége Apostolique, sous les pontificats de Paul III et de Jules III, fut tout récemment encore approuvée par le Concile de Trente, après que les Pontifes et les Pères du saint synode eurent étudié avec soin et pénétré tout l'esprit de son Institut. Assurément on ne peut les soupçonner d'avoir agi avec négligence ou défaut d'atten tion; d'où il suit qu'en bouleversant quelque chose dans nos lois, on porte atteinte en même temps et aux légitimes décrets des Souverains Pontifes et au pouvoir du Concile; ce qui ne pourrait se faire sans un grand danger, à moins que l'état des choses ne fût tout à fait diffé rent, ou que l'usage, qui seul est le réformateur des lois, n'en eût, par une longue expérience, rendu la nécessité évidente. Or, notre Compagnie se maintenant telle qu'elle était lorsqu'elle fut approuvée par l'autorité des Souverains Pontifes et du Concile, en se dévouant pour la gloire de Dieu et l'utilité de l'Eglise, a souvent éprouvé les effets merveilleux de la Bonté Divine. Elle a produit des fruits abondants, soit en affermissant les Catholiques dans la Foi, soit en arrachant les Hérétiques à l'erreur, ou même en appelant les Infidèles à la lumière de l'Évangile. Déjà elle compte un grand nombre d'hommes

choisis et d'établissements dans presque toutes les provinces de l'Ancien et du Nouveau Monde. Toujours victorieuse, elle a traversé les tempêtes les plus redoutables, elle a su mériter la faveur de tous les Souverains Pontifes et, ce qui n'est pas moins une preuve de la grâce céleste, la haine profonde des Hérétiques; de sorte que ces témoignages, cette protection et cette faveur perpétuelles dont elle jouit, nous assurent que les décrets qui furent portés sur les vœux par les Pontifes et les Conciles au sujet de la Compagnie, ont été ratifiés dans le ciel.

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Commençons par exposer les causes qui furent alléguées à la naissance de cet Ordre religieux pour le dispenser du choeur; toutes subsistent encore. Comme il a plu à la Divine Sagesse, selon la diversité des temps et des besoins de la Sainte Église, de susciter différents Instituts religieux dans ces derniers temps, si féconds en malheurs; aucune raison nouvelle ne semblait militer en faveur du choeur. Mais comme il fallait repousser les efforts impies des Hérétiques et éteindre les torches infernales qu'ils opposaient à la lumière de la vérité catholique, résister aux barbares ennemis du Christ qui assiégeaient de toutes parts la nation sainte et la minaient. insensiblement, porter la lumière du salut sur les terres nouvelles que Dieu ouvrait devant nous et leur montrer la route du ciel, et, par-dessus tout, redoubler d'efforts pour corriger les moeurs dissolues des Chrétiens, les rappeler à l'usage des sacrements; il lui plut de faire naître cette petite cohorte pour faire face à ces besoins de la république chrétienne et à ceux qui pourraient survenir encore. Afin d'atteindre ce but, il fallait s'y dévouer si complétement, y mettre tant de soins et d'efforts, que notre Père Ignace, de sainte mémoire, bien

qu'en son particulier il éprouvât de l'attrait pour le choeur, fidèle cependant à la lumière qui le guidait dans son œuvre, et voyant que l'Église de Dieu ne manquait pas d'hommes pour chanter l'office divin avec une sainte majesté, décida, sans aucune hésitation, qu'il fallait s'abstenir de ces pieuses occupations; et il persista toujours dans cette opinion. Son but était qu'en faisant concourir toutes ses forces à cette œuvre éminemment sainte et apostolique, la petite armée fût sans cesse sous les armes, et prête à voler dans tous les lieux où l'appellerait le bien général ou particulier de la Religion.

>> Eh quoi! ces causes n'existent-elles plus? L'incendie dévore la France : l'Allemagne en grande partie est consumée; l'Angleterre est réduite tout entière en cendres, la Belgique est en proie à la dévastation; la Pologne fume de toutes parts; la flamme attaque déjà les frontières de l'Italie; et, sans parler ici des peuples innombrables des Indes Orientales, des Indes Occidentales et du Nouveau Monde, qui demandent qu'on leur rompe le pain de la parole; sans parler des progrès journaliers de l'impiété musulmane, que de peuples ensevelis dans leur ignorance en Espagne, en Italie, en Sicile, dans la Sardaigne et dans les autres régions du monde chrẻtien infectées par l'erreur, et non-seulement dans les campagnes et les villages, non-seulement parmi les laïques, mais dans les rangs du clergé, au milieu des villes les plus populeuses! Nuit et jour retentit à nos oreilles la voix gémissante de ces malheureux qui implorent notre secours; et nous irions porter ailleurs nos soins, tandis que c'est pour nous dévouer à ces travaux que, disant un éternel adieu à nos foyers, à nos biens, nous nous sommes enrôlés dans cette milice, nous qui, en face d'aussi pressants besoins, sommes si peu nombreux

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