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fon métier, ne doit point céder, par foibleffe ou par complaisance, une prérogative que le droit univerfel des gens donne à fon Maître.

La feconde conférence eft ordinairement deftinée à faire un Réglement fur le Cérémonial, qui doit s'observer non-feulement entre les Plénipotentiaires pendant la tenue du Congrès, mais auffi à la fignature des traités qu'on efpere y conclure. On adopte prefque toujours, à cet égard, la regle qui a été fuivie dans les Congrès & autres traités antérieurs; à moins que des circonftances particulieres n'obligent à changer de principes. On procede enfuite à dreffer un fecond Réglement pour la Police du Congrès, qui comprend, 1°. comment les Plénipotentiaires viendront aux conférences, & de quel cortege ils pourront être accompagnés ; 2°. dans quel ordre ils s'affeieront; 3°. comment les carroffes fe rangeront; 4°. la regle que chaque Miniftre preferira à fes gens de livrée & autres domeftiques; 5°. le paffage que les cochers des Ambaffadeurs donneront, lorfque leurs carroffes fe rencontrent dans des lieux étroits; 6°. le rang que les Plénipotentiaires tiendront entr'eux à la promenade, aux fpectacles, dans les rues & chemins publics; 7. que l'on ne permettra ni aux Pages, ni aux gens de livrée, de porter des armes à feu, épées ou cannes; 8°. comment les domeftiques des Plénipotentiaires, qui ont commis quelque crime ou infolence, feront jugés & punis; 9°. de quelle maniere on évitera les querelles entre les domestiques des Plénipotentiaires, & comment on les empêchera de commettre du défordre dans la ville. 10°. Qu'aucun Miniftre ne tâchera de débaucher les domeftiques d'un autre, ni ne prendra à fon fervice ceux qui auront été chaffés, & mille chofes pareilles que les circonftances rendent néceffaires.

Tous ces objets préalables étant ainfi réglés, on entre en matiere pour les affaires effentielles; la négociation commence. Les Plénipotentiaires déploient, à l'envi l'un de l'autre, leur art & leur habileté. On ne voit & n'entend que conférences publiques, conférences particulieres, vifites réciproques, grands & petits repas donnés & rendus, confidences, fauffes ou vraies, faites mutuellement, pourparlers particuliers, entretiens aux promenades & autres occafions favorables, émiffaires mis en campagne, efpions employés, entrevues fecretes, femmes & maîtreffes gagnées pour faire des infinuations, couriers dépêchés, poftes expédiées, &c. Les Cavaliers, les Secrétaires de légation & autres fubalternes, fe répandent dans les cercles différens, & vont à la pourfuite des nouvelles. Chacun s'intrigue, chacun chipotte, chacun ouvre des yeux de lynx fur les démarches de fon rival; enfin le plus adroit négociateur profite de tout, pour obtenir, en faveur de fon maître, les meilleures conditions qu'il peut efpérer, & à force de négociations, on parvient à dreffer les préliminaires des traités.

Quant à la correfpondance, on ne fauroit mieux faire que de fuivre le confeil que donne M. de Callieres lorfqu'il dit. » Il eft bon, en ces occafions, de pratiquer ce qui fut établi durant la négociation de MunfTome XIII.

V v v

»ter, entre le Duc de Longueville, qui étant le Chef de l'Ambaffade, & » Meffieurs d'Avaux & Servien, fes collegues, qui fut de ne faire qu'une » feule dépêche pour les trois, afin de conferver de l'uniformité dans le >> récit des faits, qui auroient pu être mandés différemment, fi chacun » d'eux avoit écrit à part à la Cour; & à l'égard de leurs fentimens fur <«< chaque affaire dont ils rendoient compte, lorfqu'ils étoient différens, ils' » le marquoient dans leur dépêche commune en difant: Moi, Duc de » Longueville, fuis d'un tel avis, & le fentiment de moi d'Avaux, ou de » moi Servien, eft tel; ce que chacun appuyoit de fes raifons; fur quoi » la Cour décidoit par fa reponse, qui étoit auffi commune à tous les >> trois. « Cette méthode eft admirable, en ce qu'elle oblige tous les trois Ambaffadeurs à agir ouvertement, & fans une réserve préjudiciable aux intérêts du Souverain, les uns vis-à-vis des autres, & que la Cour n'eft pas dans le cas de recevoir, à chaque ordinaire, des relations différentes fur les mêmes affaires, qui fouvent fe croifent fi fort, & préfentent les objets fous un afpect fi différent, que le Cabinet ne fait jamais quel parti prendre.

Des Préliminaires, qu'on ne peut envifager que comme la premiere ébauche du traité, contiennent les articles effentiels defquels on est tombé d'accord. Les Plénipotentiaires les fignent fur le champ en vertu de leurs pleins-pouvoirs, & conformément à leurs inftructions, fans en demander une permiffion expreffe à leurs Souverains, & fans en envoyer la minute avant la fignature. On ne parviendroit jamais à aucune conclusion, fi on étoit obligé de fufpendre cette fignature jufqu'à ce que chaque Miniftre eût envoyé les articles à fa Cour, & reçu la réponse; fans compter que cette réponse pourroit être accompagnée de beaucoup de remarques frivoles, & de chicanes fur les expreffions, qui donneroient lieu à de nouvelles conteftations, & traineroient le Congrès dans une longueur à l'infini. Un Plénipotentiaire doit favoir, par fes inftructions & les dépêches de fon maître, jufqu'où il peut aller pour les conditions effentielles; & tout ce qui n'eft qu'acceffoire peut être changé ou rectifié, dans la confection du traité même. Enfin, les parties contractantes fe réfervent toujours la ratification qui les met à même de prendre un dernier parti.

On verra à l'article TRAITÉ, comment les traités doivent être faits, dreffés, mis au net, échangés & ratifiés. Nous dirons fimplement ici que les traités faits dans un Congrès ont befoin fur-tout d'être foigneufement examinés & conçus avec toute la netteté poffible, parce que chaque article doit s'entendre à la rigueur, qu'un pareil traité devient, pour ainfi dire, une loi du droit des gens qui oblige les principales Puiffances de l'Europe, & que chaque partie contractante doit connoître diftin&tement l'étendue de fes engagemens & de ce qu'elle peut attendre dans les cas exitans ou prévus. Le préambule, qui explique le motif du traité, eft proprement un récit hiftorique, qui doit être fidele, afin de bien fixer & de

bien définir l'intention des contractans, & de déterminer les principes fur lefquels on a négocié. L'ordre des articles n'eft pas une chofe indifférente, & la diftinction des matieres doit être faite avec fcrupule, pour que des engagemens d'une étendue différente ne puiffent pas être cenfés porter fur un même objet. Dans ces traités, comme dans tous les autres, les engagemens généraux doivent précéder les engagemens particuliers, & l'on place enfuite le détail des moyens que l'on convient d'employer pour l'exécution actuelle ou à venir. (a) Dès que les ratifications font arrivées (& même quelquefois avant) on indique la derniere conférence qui fe paffe, comme la premiere, en difcours & complimens mutuels fur l'heureux fuccès de la négociation, en proteftations de bonne amitié, & en témoigna ges des regrets de fe féparer de la part des Plénipotentiaires. Après que les Ambaffadeurs fe font vifités réciproquement, le Congrès eft fini, & chacun retourne à fa Cour.

On peut encore regarder comme une espece de Congrès la diete pour l'élection d'un Empereur des Romains, parce que non-feulement les Electeurs, qui ont droit de fouveraineté, mais aufli les principales Puiffances de l'Europe, y envoient des Ambaffadeurs, & que l'élévation à cette premiere dignité du monde eft un objet très-intéreffant pour tous les Princes, Républiques & Etats de l'Europe. Nous verrons à l'article DIETE D'ÉLECTION quels font les objets les plus effentiels à obferver dans cette affemblée extraordinaire. Les dietes pour l'élection d'un Roi de Pologne attirent auffi l'attention de plufieurs Puiffances au point qu'elles y envoient des Ambaffadeurs ou Envoyés extraordinaires, qui s'efforcent de faire tomber le choix fur un Candidat à leur dévotion. Il faut de l'adreffe & de l'argent pour réuffir dans ce deffein, & l'on y obferve plufieurs maximes ufitées dans un Congrès en particulier.

Voyez DIETE.

(4) Voyez Pequet, Art de négocier, &c. pag. 85.

CONJUGAL, CONJUGALE, adj.

De l'Amour Conjugal.

De la Fidélité Conjugate.

S. I.

UN amant, dupe de lui-même, peut croire aimer fans aimer en effet :

un mari fait au jufte s'il aime. Il a joui: or la jouiffance est la pierre de touche de l'amour; le véritable y puife de nouveaux feux, mais le frivole s'y éteint.

L'épreuve faite, fi l'on connoît qu'on s'eft mépris, je ne fais de remede à ce mal, que la patience. S'il eft poffible, fubftituez l'amitié à l'amour : mais je n'ofe même vous flatter que cette reffource vous refte. L'amitié entre deux époux eft le fruit d'un long amour, dont la jouiffance & le temps ont calmé les bouillans transports. Pour l'ordinaire, fous le joug de l'Hymen, quand on ne s'aime point, on fe hait, ou, tout au plus, les génies de la meilleure trempe fe renferment dans l'indifférence.

Voyez Alcippe & Célimene unis enfemble depuis fix mois : quoique leurs appartemens foient fort éloignés l'un de l'autre, ils fe vifitent tous les jours, ils vont même jusqu'à s'embraffer; le fait eft fûr, jamais il n'eft arrivé que devant des témoins croyables. Vous ne verrez point entr'eux de ces careffes enfantines, de ces agaceries folâtres qu'on reproche aux jeunes époux; mais des politeffes, des foins, des égards, des attentions, & fur-tout des bienféances. Ils n'ont point fait d'accord exprès pour vivre ensemble fur ce pied-là : une heureuse sympathie leur en a infpiré l'idée.

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On eft bien plus furpris du froid qui regne entre Lifandre & Daphné; après mille témoignages apparens de la paffion la plus forte. Jamais amour ne parut plus ardent: mille obftacles les traverfoient; leur courage en a triomphé. Des verroux, des grilles, des murs, tenoient la belle étroitement emprisonnée, trois ou quatre prudes géolieres d'un ton nafillard & dévot, l'exhortoient à la continence, en fe propofant pour exemple, & l'invitant à ne soupirer, comme elles, que pour l'Époux du cantique : une échelle la délivra de la clôture & des fermons. Lifandre, que fon pere à l'heure même travailloit à déshériter, préférant aux intérêts de fa fortune ceux de fon cœur; aux tendreffes du fang, la poffeffion de Daphné; Lifandre, voloit avec elle, pour lui jurer aux pieds des autels un amour à jamais durable. L'année n'eft pas révolue déja Lifandre eft infidele.

Daphné pleure, gémit & fe plaint : elle a des confolateurs, qui peut-être l'aideront un jour à fe venger pleinement du perfide. Quelle peut donc être la caufe de ce brufque changement? La même qui a refroidi Alcipe & Célimene. Lifandre & Daphné avoient pris pour de l'amour, les puiffans aiguillons de leur tempérament voluptueux les voilà détrompés; & comme ils font tous deux impatiens & emportés, leurs regrets font auffi vifs que l'étoit leur entêtement.

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Ce feroit entrer dans une carriere trop vafte, que de vouloir tracer ici ce nombre infini de tableaux différens, qu'offriroit l'état du mariage, fi fes fecrets, qui cachent de mystérieufes ténébres, étoient tout-à-coup éclairés. Quelle variété d'humeurs, de caprices, de boutades & de travers, fourniroient tant d'époux défunis, qui, différens de ceux qu'une fauffe lueur d'amour a trompés, n'ont pas même imaginé que ce fentiment dût entrer pour quelque chofe dans leur engagement.

Les belles & les coquettes ont fait naître dans tous les fiecles tant de folles paffions, tant de troubles, de divifions & de guerres, que les génies fuperficiels, fans faire grace au véritable amour, à l'amour fondé fur l'eftime, l'ont condamné fur l'étiquette, comme une foibleffe impardon-nable. Le vil intérêt trouvant, dans cette bizarre opinion, de quoi flatter fes partifans, ne manqua pas de la répandre & d'y donner la vogue. Par fon fecours elle fit tant de progrès, que bientôt ce fut un dogme reçu. Il fut ftatué qu'à l'avenir on ne prendroit plus de femme, que dans une condition égale à la fienne : & l'on étendit même l'égalité de condition jufqu'à celle des biens. L'amour fut profcrit des mariages, & relégué dans les Romans. Et fi quelqu'un, foit par foibleffe, ou par goût, s'étoit laiffé enflammer, il devoit au moins, de crainte de fcandale, s'en cacher de fon mieux, ne faire en public à fon époufe, que des politeffes froides; & où il fe trouveroit d'autres femmes, les fêter toutes plus que la fienne; le tout à peine d'encourir le blâme & les brocards du beau monde.

Et, attendu que le parti des époux mal affortis, comme de beaucoup le plus nombreux, eft celui qui donne le ton, ce réglement conforme à leur fyftême a été fcrupuleufement maintenu; & les chofes font encore aujourd'hui fur ce pied, fauf aux époux qui fe haïffent fincérement, de faire pis dans le particulier.

Je n'ai rien à prescrire à cette derniere claffe d'époux, fur les devoirs de l'Hymenée. Ils manquent au plus effentiel, en manquant d'amour : comment rempliroient-ils les autres?

C'est une espece de rapt qu'un mariage contracté fans tendreffe. La perfonne n'appartient, fuivant l'inftin&t naturel, qu'à celui qui'en poffede le cœur. On ne devroit recevoir les dons de l'Hymen, que des mains de l'Amour les acquérir autrement, c'eft proprement les ufurper.

Confeillerai-je à ces raviffeurs téméraires de réparer, au moins après coup, Leur usurpation, en s'excitant à l'amour, & de faire après l'engagement ce

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