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gne; que c'étoient des femmes époufées moins folemnellement, & non pas des maîtreffes.

Comme les Eccléfiaftiques doivent donner aux autres l'exemple de la pureté des mœurs; le Concubinage eft encore plus fcandaleux chez eux que dans les Laïcs. Cela arrivoit peu dans les premiers fiecles de l'Eglife; les Prêtres étoient long-temps éprouvés avant l'ordination; les clercs inférieurs étoient la plupart mariés.

Mais dans le Xe. fiecle le Concubinage étoit fi commun & fi public, même chez les Prêtres, qu'on le regardoit prefque comme permis, ou au moins toléré.

Dans la fuite on fit plufieurs loix pour réprimer ce défordre. Il fut défendu au peuple d'entendre la meffe d'un Prêtre concubinaire; & on ordonna que les Prêtres qui feroient convaincus de ce crime, feroient déposés.

Le concile Provincial de Cologne, tenu en 1260, dénote pourtant que le Concubinage étoit encore commun parmi les clercs.

Cet abus régnoit pareillement encore parmi ceux d'Espagne, fuivant le concile de Valladolid, tenu en 1322, qui prononce des peines plus grieves contre ceux dont les Concubines n'étoient pas chrétiennes.

Le mal continuant toujours, la rigueur des peines s'eft adoucie.

Suivant le concile de Bafle, les clercs concubinaires doivent d'abord être privés pendant trois mois des fruits de leurs bénéfices, après lequel temps ils doivent être privés des bénéfices mêmes, s'ils ne quittent leurs Concubines; & en cas de rechûte, ils doivent être déclarés incapables de tous offices & bénéfices Eccléfiaftiques pour toujours.

Ce décret du concile de Bafle fut adopté par la Pragmatique-Sanction, & enfuite compris dans le concordat.

Le Concile de Trente a encore adouci la peine des clercs concubinaires; après une premiere monition, ils font feulement privés de la troifieme partie des fruits; après la feconde, ils perdent la totalité des fruits, & font fufpendus de toutes fonctions; après la troifieme, ils font privés de tous leurs bénéfices & offices Eccléfiaftiques, & déclarés incapables d'en pofféder aucun; en cas de rechûte, ils encourent l'excommu

nication.

En France le Concubinage eft auffi regardé comme une débauche contraire à la pureté du Chriftianifme, aux bonnes mœurs, non-feulement par rapport aux clercs, mais auffi pour les Laïcs: c'eft un délit contraire à l'intérêt de l'Etat. Reipublicæ enim intereft legitimâ fobole repleri civitatem. Si les ordonnances n'ont point prononcé directement de peine contre ceux qui vivent en Concubinage, c'eft que ces fortes de conjonctions illicites font le plus fouvent cachées, & que le miniftere public n'a pas coutume d'agir pour réprimer la débauche, à moins qu'elle n'occafionne un scandale public.

Mais les loix du Royaume réprouvent toutes donations faites entre concubinaires c'eft la difpofition des coutumes de Tours, article 246. d'Anjou, 342. du Maine, 354. de Grandperche, article 100, du Lodunois Chapitre XXV, article 10. de Cambrai, titre III, article 7. Celle de Normandie, article 437 & 438, défend même de donner aux bâtards.

La coutume de Paris n'en parle pas mais l'article 282, défendant aux mari & femme de s'avantager, à plus forte raifon ne permet-elle pas de le faire entre concubinaires qui font moins favorifés, & entre lefquels la féduction eft encore plus à craindre.

L'ordonnance du mois de Janvier 1629, article 132, défend toutes donations entre concubinaires.

Conformément à cette ordonnance, toutes donations de cette nature faites entre vifs ou par teftament, font nulles, ou du moins réductibles à de fimples alimens; car on peut donner des alimens à une Concubine, & aux enfans naturels; on accorde même quelquefois, outre les alimens, quelques dommages & intérêts à la Concubine, eu égard aux circonftances: par exemple, fi la fille qui a été féduite eft jeune, de bonne famille; & que fa conduite foit d'ailleurs fans reproché; fi le garçon eft plus âgé qu'elle, & qu'il foit riche, &c.

Ce que le mari donne à fa Concubine ne doit pas fe prendre fur la maffe de la communauté, mais fur la part du mari feulement, ou für fes autres biens; ou fi cela eft pris fur la maffe de la communauté, il en eft dû récompenfe pour moitié à la femme.

Si la Concubine donataire eft une femme mariée ou une fille livrée à une débauche publique, la donation en ce cas ne doit avoir aucun effet; il n'eft dû ni alimens, ni dommages & intérêts.

Les reconnoiffances faites au profit des concubinaires font nulles, auffi bien que les donations; parce que de telles reconnoiffances font toujours réputées fimulées, & que qui non poteft dare non poteft confiteri. Voyez au ff. 25 tit. vij. & au code 5 tit. xxvij. Ricard, des donat. part. I. ch. iij. fect. 8 n. 416. Dumoulin, fur le confeil 296 de Decius. Dupleffis, tr. de la comm. liv. I. chap. iij. Cujas, fur la novelle 28. Louet, lett. D. fomm. 45. Dupineau, nouvelle édition, liv. VI. des arrêts, ch. xiij. Plaid. de Gillet. tom. I. pag. 28o. L'Hift. de la jurifprud. Rom. de Terraffon, pag. 45 & 48. Caufes célébres, tom. VII. pag. 92.

I I.

Nous avons reconnu que le Concubinage étoit permis chez les Ro

mains. Ils avoient de bonnes raifons pour le permettre.

Le luxe appauvriffoit une infinité de perfonnes : les caprices des peres, qui pouvoient à leur fantaisie deshériter leurs enfans, ou ne leur laiffer qu'une très-petite portion de leurs biens, en ruinoient plufieurs autres,

Ces gens-là n'étoient pas en état de fe marier il falloit donc leur laiffer la liberté de prendre des Concubines. Sans cela, ils auroient fatisfait leurs befoins ou leurs paffions, par des voies qui nuifent à la propagation; au fieu que le Concubinage ne donnoit pas moins que le mariage des citoyens à l'Etat, quoiqu'ils fuffent d'un ordre inférieur.

Depuis que la corruption des mœurs eut introduit dans Rome la licence effrénée des divorces, les femmes quittoient leurs maris avec la mênie facilité que ceux-ci renvoyoient leurs femmes. Bien des hommes en concevoient du dégoût pour un autre mariage; & alors, les plus modérés, au lieu de courir après les proftituées, fe choififfoient, parmi les affranchies, ou dans la populace, une honnête Concubine.

Chez les peuples modernes, le luxe, & le droit que les peres ont pref que par-tout de priver leurs enfans de la plus grande partie de leurs biens, produifent les mêmes effets que chez les Romains. Une infinité de gens fe trouvent ruinés par-là; & nous avons outre cela les fidei-commis, les primogénitures, les majorats, & d'autres fortes de fubftitutions, qui réduifent les branches cadettes d'une famille, & fouvent les poffeffeurs mêmes de ces fidei-commis, à la mifere la plus déplorable. Nous aurions donc peut-être de plus fortes raifons de permettre le Concubinage parmi nous, que n'en avoient les Romains.

Dans les pays catholiques, il y en a encore une autre. Les célibataires de profeffion y attaquent la pudicité de toutes les femmes car par-tout où le trouve établi un ordre de perfonnes, qui font vœu de chafteté, c'est une néceffité que la nature l'emporte fur le vœu ; & de-là combien d'enfans adultérins, qui enlevent aux légitimes héritiers les biens qui leur appartiennent! Cet inconvénient affreux feroit moins fréquent, fi le Concubinage étoit permis. L'homme chafferoit la Concubine, qu'il foupçonneroit d'infidélité: il excluroit de fa fucceffion les enfans qu'il foupçonneroit être nés du commerce qu'elle auroit eu avec un autre, & difpoferoit de fes biens en faveur de fes plus proches parens. Rien de tout cela ne peut avoir lieu dans le mariage.

Pourquoi ne tolereroit-on pas le Concubinage? N'a-t-il pas été permis fous les premiers Empereurs chrétiens? voyez Boehemer. Jus ecclef. protes. tom. II. l. 3. tit. 2. Juftinien lui-même ne l'appelle-t-il pas une coûtume licite? Nov. 28. ch. 4. Les peres du Concile de Tolede ne furent-ils pas d'avis qu'on devoit le tolérer en Efpagne? Concil. Tolet. I. ch. 27. Et Ifidore d'Efpagne ne dit-il pas expreffément, qu'un chrétien peut avoir une Concubine, s'il n'eft point marié? Chriftiano non dicam plurimas, fed nec duas fimul habere licitum eft, nifi unam tantùm uxorem aut loco uxoris, fi conjux deeft, Concubinam. Ifid. C. 5. D. 34.

Il faudroit feulement dans ce cas, adopter les fages difpofitions des Romains. Chez eux, il étoit défendu de prendre pour Concubines, les filles de naiffance il falloit les choifir parmi les affranchies, ou dans la popu

lace. L. 49. S. 4. D. de leg. 3. l. 3. D. de Concub. Un homme marié ne pouvoit pas en avoir. Paul. Recep. fent. l. 2. tit. 20. On pouvoit renvoyer la Concubine, quand on en étoit dégoûté : fi elle devenoit infidele, on pouvoit l'accufer d'adultere. L. 13. Pr. D. ad leg. Jul. de adulter. Les enfans qu'elle donnoit, n'étoient point flétris; ils devenoient citoyens : mais ils ne tomboient pas fous la puiffance des peres, comme ceux qui naiffoient d'un véritable mariage. Ils pouvoient fuccéder à leur pere; mais celui-ci pouvoit les exclure de fa fucceffion, par fon teftament.

Après ce que je viens de dire, je ne conçois pas comment ces paroles ont pu échapper à M. de Montefquieu. » On fit peut-être, dit-il, à Ro» me, des difpofitions trop dures contre les bâtards. Mais les inftitutions » anciennes mettant tous les citoyens dans la néceffité de fe marier, les » mariages étant d'ailleurs adoucis, par la permiffion de répudier ou de faire » divorce, il n'y avoit qu'une très-grande corruption de mœurs qui pût » porter au Concubinage, « Efprit des Loix, l. 23. ch. 6. Les Romains n'appelloient point bátards les enfans qui naiffoient du Concubinage : ils les appelloient fils naturels, voyez le titre du Code de liber. natur. Les bâtards étoient ceux qu'ils nommoient fpurii. Il eft vrai que les difpofitions contre les bâtards étoient dures : mais elles ne l'étoient pas contre les enfans nés d'une Concubine; & M. de Montefquieu parle ici du Concubinage. D'ailleurs, pourquoi les Romains auroient-ils févi contre l'effet, puifqu'ils ne féviffoient pas contre la caufe? M. de Montefquieu femble fuppofer ici, , que la légiflation de Rome avoit en horreur le Concubinage; quoiqu'il foit certain qu'elle l'a toujours toléré, & même permis. Après cela, comment auroit-elle fait des difpofitions dures, contre les enfans qui en naiffoient? Il étoit néceffaire de les diftinguer de ceux qui étoient nés d'un véritable mariage: c'eft auffi ce qu'elle a fait, & rien de plus.

Les Empereurs chrétiens porterent, à l'inftigation du Clergé, des coups mortels au mariage. Ils approuverent les vœux de chafteté, ils ôterent les récompenfes accordées, par les anciennes loix, aux gens mariés; ils ftatuerent des peines contre les fecondes noces cela rendit le Concubinage plus commun. Alors ils fe mirent auffi à frapper fur cet ufage; & entr'autres chofes, ils imaginerent d'accorder la légitimation des fils naturels, à ceux qui épouferoient formellement leurs Concubines. Comme les Concubines étoient ordinairement, & devoient être d'une naiffance bien inférieure à celle des maris, cela ne fit qu'avilir les mariages & les familles, fans arrêter le Concubinage. Du refte, ce ne font ici que des doutes hafardés que nous foumettons au jugement des Législateurs plus éclairés que nous; & peut-être la tolérance vaut-elle mieux en cette matiere, qu'une permiffion légale.

I I I.

Si les enfans naturels ont une nation, & s'ils peuvent participer aux effets

du Droit civil?

IL s'éleve ici une queftion intéreffante pour une partie de l'humanité.

Les bâtards ont-ils une nation? C'eft ce que j'examinerai ici par les principes du droit Naturel, du droit Romain, & du droit François, & de celui de quelques autres peuples modernes.

Dans le droit Naturel, il eft certain que la nation du pere eft la nation des enfans, foit qu'ils foient légitimes ou naturels car la nature ne fait aucune diftin&tion entre les uns & les autres.

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L'ancien droit Romain, adouci & tempéré par Justinien, regardoit les bâtards comme étrangers à la République (a); mais ce Légiflateur à l'exemple de quelques-uns de fes prédéceffeurs, corrigea l'amertume & la dureté de cet ancien droit (b). Un fentiment d'humanité fut le motif des nouvelles loix qui d'ailleurs font fondées fur l'inftitution de la nature. Avant que l'ambition eût partagé la terre, tous les hommes naiffoient alors libres & légitimes (c). Juftinien eut raifon de croire qu'il y auroit de la barbarie à rejetter, du fein de la fociété civile, des hommes qui n'étoient pas moins chers à la nature que le refte du genre humain. C'est dans ces vues qu'il confirma & même étendit les loix favorables qui avant lui avoient admis les bâtards à participer aux avantages de la fociété civile. Ces loix leur avoient accordé le droit de fuccéder à leur mere, & même d'intenter la querelle d'inofficiofité contre fon teftament (d). Il étoit permis au pere de donner par teftament la moitié de fon bien à fes enfans naturels lorfqu'il n'avoit point d'enfans légitimes (e). Mais s'il en avoit, la portion des bâtards n'étoit que la douzieme partie de fon bien (f).

Les bâtards participoient donc aux avantages du droit civil, & étoient

(a) Alienum quid à Republicâ.

(b) Vetufta lex ufa eft his (naturalibus liberis ) amarè; nos autem humanè. Nov. 89. Cap. 12.

(c) Natura fi quidem ab initio, dum de filiorum procreatione fanciret, fcriptis nundum pofitis legibus, omnes fimiliter quidem liberos, fimiliter ingenuos produxit. Primis namque parentibus primi filii fimiliter quidem liberi, fimiliter autem legitimi à creaturâ fiebant, Nov. 89. ibid.

(d) De inofficiofo teftamento matris Spurii quoque filii dicere poffunt. Leg. 29. §. 1. ff. de inoff. Teftam.

(e) Humanitatis intuitu, naturalibus patribus indulgemus ut liceat eis, nulla legitimâ fobole exiftente..... Naturales filios ex fex unciis hæredes fcribere.... Ex fupremâ patris voluntate permittitur filiis naturalibus, ufque ad prædictas fex uncias, hæreditatem ejus capere. Leg. 8. Cod. de Naturalib. lib,

(f) Novell. 89. Cap. 12.

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