صور الصفحة
PDF
النشر الإلكتروني
[ocr errors]

deux Puiffances contractantes les paroles que je mets en note (4); On peut néanmoins dire que le Concordat n'a pas abfolument tous les mouvemens qui fe trouvoient dans l'ufage des inveftitures, que c'eft l'Eglife qui, en la perfonne du Pape fon Chef vifible, fait l'élection des Evêques & des Abbés; que le Roi n'en a que la préfentation, laquelle le Pape pourroit rejetter, abfolument parlant, fi celui qui eft préfenté n'avoit pas toutes les qualités requifes par les Canons; que ce choix étant ainfi fait par le Pape, l'élû eft facré avant que le Roi lui donne les régales & reçoive de lui le ferment de fidélité; que ces régales ne fe donnent point par la croffe & par l'anneau, comme il fe pratiquoit dans les inveftitures; qu'ainfi, tout le changement qui eft arrivé, se réduit à ce que le Clergé & le peuple ont déféré au Pape & au Roi, le droit qu'ils avoient dans l'élection des principaux Miniftres de l'Eglife, & que c'eft toujours en un fens le Clergé & le Peuple qui font les élections; le Clergé en la personne du Pape en qui réfide une grande autorité Eccléfiaftique, & le peuple, en la perfonne du Roi qui en eft le Souverain.

Dieu a donné à l'une & à l'autre Puiffance le pouvoir qui étoit néces faire pour l'exécution de fes volontés. Il ne faut pas que l'une entreprenne fur les fonctions de l'autre. Leurs bornes font marquées. Les droits naturels, effentiels & primitifs de la puiffance temporelle, font tous les moyens néceffaires à la confervation de l'Etat, & les droits naturels de l'autorité Eccléfiaftique font tous les moyens néceffaires à l'édifice de Jefus-Chrift autant que la tranquillité publique & l'ordre qui font une loi inviolable le permettent; mais comme l'Etat & l'Eglife font compofés des mêmes perfonnes qui font en même-temps Citoyens & Chrétiens, Sujets du Prince & enfans de l'Eglife, il n'eft pas poffible que ces deux Puiffances qui fe doivent mutuellement maintenir, exercent leur Jurifdiction & exécutent l'ordre de Dieu leur maître commun, fi elles ne font parfaitement d'accord, & fi même dans certaines circonftances elles ne cédent mutuellement l'une à l'autre quelque chofe de leurs droits. C'eft pour cela que le Prince, par conceffion de l'Eglife, a maintenant un droit exclufif à la nomination de plufieurs Bénéfices; & que l'Eglife, par conceffion du Prince, poffede aujourd'hui des biens temporels. Ces fortes de droits ne font point naturels, parce que ce ne font point des fuites néceffaires ou naturelles de l'ordre que ces diverfes Puiffances ont reçu de Dieu, ce font des droits de conceffion qui dépendent d'un accord mutuel dont la fin ne doit être que celle que Dieu a eue dans l'établiffement de l'une & de l'autre Puiffance. Aux efforts qu'on fit en France pour empêcher l'exécution du Concordat, on eût dit que le falut public dépendoit de la Pragmatique; & ce

(a) Partiti funt veftimenta mea & fuper veftem meam miferunt fortem. Pf. 21. L'Archevêque de Vienne fit cette application dans l'Affemblée du Clergé de France de 1585. Voyez le Procès-verbal manufcrit de cette Affemblée,

pendant,

pendant, les gens les mieux inftruits penfoient dès-lors que le Concordat avoit été néceffaire au bien du Royaume, à caufe des abus qui fe gliffoient dans les élections des Evêques, des Abbés, des Prieurs. >> Ceux qui » en étoient chargés (dit un Auteur dont je tranfcris les propres paroles) agiffant fans aucun égard de la fuffifance, le pis étoit ( ajoute-t-il) quand >> ils ne fe pouvoient accorder, qu'ils s'entre-battoient, fe gourmoient, s'en» tre-bleffoient, & même s'entre-tuoient, &c. D'ailleurs, ce grand Roi >> François I, confidérant les bons fervices que fa Nobleffe lui faifoit or> dinairement, & ne la pouvant récompenfer de fon Domaine, il trouva » meilleur de récompenfer ceux qui l'avoient bien fervi, de quelque Eglife » ou Abbaye, que de les laiffer à des Moines clauftraux, gens inutiles, » difoit ce grand Roi, qui ne fervoient de rien qu'à boire & manger (a) Que réfulte-il du Concordat? Que François I, par une voie plus douce fans comparaifon que toute autre qu'il eût pû prendre, reprit infenfiblement la pratique de nos premiers Rois qui nommoient aux Bénéfices. J'ajoute que jamais il n'y a eu ni plus de mœurs ni plus de lumieres parmi les Pasteurs que depuis le Concordat. Dans aucun fiecle, avant le Concordat, l'Eglife de France ne compta tant de Miniftres habiles & vertueux parmi ses Evêques, qu'elle en a eu depuis dans chaque fiecle & qu'elle en a préfentement. Pour nos Rois, le Concordat, en les rendant maîtres abfolus de la nomination aux Evêchés & aux autres Bénéfices, les a rendus maîtres de leur Etat plus que toutes les Places qu'ils ont fortifiées, & que toutes les troupes qu'ils ont entretenues; & cela feul eft un grand bien pour le Public, dans une Monarchie dont il ne faut pas que la puiffance foit partagée. Si les difpofitions du Concordat font moins canoniques que celles de la Pragmatique, elles font plus utiles, & peut-être n'y auroit-il pas grande chofe à défirer fans la perte que l'Etat fait de l'argent qui en fort & qui paffe à Rome, par un abus manifefte dans la maniere d'entendre le Concordat, au fujet des annates. C'est ce que je vais prouver.

L'annate eft le revenu d'un an ou une taxe fur le revenu de la premiere année d'un Bénéfice vacant. C'est une exaction contre laquelle la Faculté de Théologie de Paris, toutes ou prefque toutes les Univerfités de France, les Parlemens de ce Royaume, & nos Rois eux-mêmes se font fouvent élevés (b).

C'est une opinion commune que les annates que le Pape exige en donnant les provifions des Bénéfices confiftoriaux, font fondées fur le Concordat, & qu'elles y font autorisées par un article exprès. Une Eulle du Pape Léon X, qui eft rapportée après le texte du Concordat, & qui commence par ces mots : Romanus Pontifex, à laquelle on a mis ce titre, de An

(a) Mémoires de Brantome, Tome I.

(6) On peut confulter le Traité qui a été imprimé fur cette matiere en 1718, in-douze. Tome XIII. Bbb

natis, a été le fondement de cette erreur. Il faut obferver que dans plufieurs éditions on a joint, au commencement & à la fin du texte du Concordat, plufieurs actes qui n'en font point partie, cette Bulle eft du nombre (a). Elle autorife les annates, mais elle eft poftérieure au Concordat, elle n'a point été regiftrée au Parlement de Paris, elle n'a point été reçue en France (b), elle n'a point été approuvée par le cinquieme Concile de Latran avec le texte du Concordat, elle n'a été faite que quelque-tems après. Suivant cette Bulle, tous ceux qui demandent en Cour de Rome d'être pourvûs des Bénéfices, font obligés d'exprimer la valeur des Bénéfices dont ils follicitent les provisions. La Bulle comprend généralement tous les Bénéfices qui font dans les pays fujets au Concordat, conformément au titre de mandatis Apoftolicis qui eft dans ce Traité, avec cette différence, que dans le titre de mandatis Apoftolicis, on veut obliger ceux qui demanderont des provifions, d'exprimer le revenu du Bénéfice, mais on n'y explique point l'obligation de payer l'annate comme dans la Bulle.

L'obligation d'exprimer la valeur du bénéfice pourroit avoir fon utilité, pour modérer celle des penfions qui font exceffives, & pour connoître fi la pluralité des bénéfices qui ont ce revenu, doit être permife à celui qui demande d'en être pourvu & qui en poffede d'autre; mais que cette foi ferve à lever une taxe fur les bénéfices en faveur de la Cour de Rome, c'eft une exaction dont l'Etat & l'Eglife gémiffent.

Le Parlement de Paris, dans fes remontrances contre la publication du Concordat, repréfente que l'expreffion de la valeur des bénéfices, tendoit à rétablir la levée des annates, & qu'il étoit aifé d'en prévoir des fuites très-mauvaises. Le Chancelier Duprat répond que dans le Concordat il n'eft point parlé des annates, que la fin de ce traité n'eft point de les rétablir; que l'intention qu'on a eue, en ordonnant l'expreffion de la valeur des bénéfices, a été qu'on pût voir fi ceux auxquels on les conféroit avoient un mérite fuffifant pour les pofféder; & que par ce moyen, plufieurs perfonnes fe font détournées d'aller à Rome, qui y feroient allées fi l'on pouvoit tromper impunément.

Il paroit, par ces obfervations, que ceux qui demandoient la publication du Concordat & ceux qui s'y oppofoient, convenoient que les annates ne font point établies dans ce traité. L'auteur du traité de la concorde du Sacerdoce & de l'Empire, obferve auffi que l'exaction des annates n'a point été autorisée dans le Concordat (c).

(a) Elle fait le quarante-troifieme titre dans la collection des Conciles des Peres Labbe & Coffart, & y eft rapportée comme faifant partie du Traité auquel on a mis pour titre: Texus integer Concordatorum, &c.

(b) Rebuffe l'a remarqué dans fon Traité intitulé: Praxis beneficiaria. Conftitutio ifta (dit cet Auteur) tanquam burfalis, non eft à regnicolis recepta.

(c) Nullum Decretum extat in Concordatis quo annatarum pro Epifcopatibus exactio confir metur, ita quoad annatas fummus Pontifex & Reges noftri nullo jure abftrin&ti funt & ad juris

[ocr errors]

Le Parlement de Paris, dans fes fecondes remontrances fur le cahier des Etats de Blois, fait le 6 de Juillet 1579, dit encore que les annates ne font point approuvées par le Concordat. En voici les termes, rapportés vers la fin de ce qui regarde l'Eglife dans fes remontrances. » Le Par»lement fupplie de vouloir abolir les annates, & ne permettre que de»niers foient portés à Rome pour provisions de bénéfices, parce que c'eft » contre les droits & conftitutions canoniques & ordonnances anciennes » même celles du Roi faint Louis, contre les faints conciles & décrets >> auxquels le Pape doit obéiffance & n'y peut contrevenir. Les annates » ne font approuvées par le Concordat fait entre le Pape & le Roi François I, bien y a bulle expédiée par le Pape Leon X, mais elle » n'eft contenue au Concordat ni paffée au Parlement, & ainfi seulement >> par une diffimulation qui coûte au Roi & à fes fujets une infinité de deniers par chacun an. «

Nous avons envoyé fans retour, à Rome, environ fix cents mille livres chaque année (a), depuis François I, & nous continuons d'y envoyer de l'argent tous les jours. Qu'on calcule, fi on le peut, ce que ces fommes prodigieufes euffent fait dans le commerce de ce Royaume, & qu'on juge par-là de la grandeur du mal. La ceffation de cet abus ne feroit-elle pas un grand fujet d'éloge pour le Prince à qui nous en aurions l'obligation? Que le Roi continue de nommer aux bénéfices, mais que ce foit la province eccléfiaftique, qui facrant les Prélats, donne les provifions, & qu'on ceffe d'envoyer chercher à Rome des bulles dont les premiers Evêques ne fubiffoient pas le joug.

Après que Charles VI eut fait publier fa fouftraction de l'obéiffance des prétendus Papes, ce Prince fit affembler l'Eglife de France en fon palais à Paris, afin de convenir des moyens qu'on prendroit pour le gouvernement eccléfiaftique pendant cette neutralité, caufée par le fchifme dont l'Eglife étoit alors affligée. On réfolut dans cette affemblée (b), que les Archevêques confirmeroient l'élection des Evêques de leurs métropoles; que l'élection du métropolitain feroit confirmée par l'ancien des Suffragans ou par le Concile Provincial, & que pour la collation & l'inftitution des autres bénéfices, on auroit recours à l'Evêque du lieu.

Lorfque le Pape Jules III fe fut déclaré contre la France, le Roi Henri II fit défenses à tous fes fujets d'envoyer à Rome de l'argent monnoyé ou à monnoyer, par quelque voie que ce pût être, pour difpenfes, provi

communis obfervationem redire possunt. Maria, L. 6, de Concord. Sacerd. & Imper. Cap. 11, S. 12, Tom. 11, pag. 117.

(a) La preuve de ce fait réfulte de ce que l'Eglife de S. Louis de Rome, à qui tous les François qui prennent des Bulles payent un pour cent de ce qu'ils donnent pour les Bulles, reçoit tous les ans environ fix mille livres de notre monnoie.

(b) Qui dura depuis le 11 d'Août 1408 jufqu'au de Novembre de la même année.

fions de bénéfices, ou pour quelque autre cause ou prétexte que ce pût être (a). Tant que les troubles durerent, on établit en France le moyen dont je viens de parler. Sur la nomination du Roi, les Evêques donnoient des provifions des abbayes qui étoient dans leurs diocefes (b). Il ne paroît pas qu'il y ait eu des inftitutions d'Evêques données par les métropolitains pendant ce différend; mais fi l'on crut que dans ces circonstances le Concordat ne devoit pas avoir lieu pour les provifions des abbayes, il n'y a aucun fujet de douter qu'on n'eût pris le même deffein pour l'inftitution des Evêques, au cas que les Papes euffent continué dans leurs divifions avec la France. Les inconvéniens de la longue vacance d'une abbaye ne font pas comparables à ceux d'une Eglife qui eft fans Evêque, pendant un temps confidérable; mais on avoit commencé par les provifions des abbayes, dans le deffein de ne porter pas ce changement plus loin, s'il étoit capable de faire ceffer les divifions; & cet ordre eft un témoignage de la modération de nos Rois.

Le remede à la perte que l'Etat fait journellement paroît facile; mais la prudence veut que le Roi ne l'applique qu'avec une grande circonfpection, & dans une conjoncture extrêmement favorable.

Sans mêler des vûes humaines aux intérêts de la religion, & fans parler de la perte des effets temporels, des gens de bien peuvent-ils ne pas gémir du défordre que les annates ont introduit dans l'Eglife!

Les premiers Papes étoient peu riches, & envoyoient des aumônes partout, les Papes modernes font auffi riches que les Princes, & mettent toutes les Eglifes fous contribution. C'est du défir immodéré d'acquérir des richeffes que font nées les annates. Ce ne fut que depuis que les Papes eurent fixé leur féjour à Avignon, qu'ils les leverent. Nos Rois eurent la charité de le permettre à des Papes qui étoient dans le befoin, parce qu'ils avoient été chaffés de l'Italie. Clément V s'appropria pendant deux ou trois tous les revenus des bénéfices qui vaqueroient en Angleterre (c). Jean XXII ordonna qu'on lui payeroit pendant trois ans la premiere année des revenus des bénéfices non électifs (d). Ce qui n'avoit été ordonné que pour un temps & fous prétexte de néceffités extraordinaires, devint bientôt une loi générale. Boniface IX à Rome (e). Clément VII à Avignon, (f)

ans,

(a) L'Edit eft du 3 de Septembre 1551, enregistré au Parlement de Paris le 7 du même mois.

(b) Le Cardinal de Givry, Evêque de Langres, donna une efpece de provifion ou commiffion pour le Gouvernement de l'Abbaye de Sept-Fontaines, Ordre de Prémontré. Elle eft du 22 Décembre 1551.

(c) Walfingham, pag. 498.

(d) Extravagant. commun. p. 236. Preuves de Bourgeois.

(e) Paulus Langius, pag. 847.

(Thomaffin, Part, 3, Lib. 3, C. 58, No. 6 & 12; Chron. Hift. T. 2, p. 306; Platine, pag. 241.

« السابقةمتابعة »