صور الصفحة
PDF
النشر الإلكتروني

99

[ocr errors]

vienne nous dire que les richeffes rurales, & les fermiers qui les poffedent, foient le fléau de la culture & de la population! Je crois le contraire évidemment démontré. Dans le fyftême de l'obfervateur, qui ,, veut mettre les pauvres à la tête de la culture, je ne vois que de la mifere qui enfante & perpétue la mifere. Dans le mien, au contraire, je vois la richeffe, la profpérité, une heureufe population, d'autant plus affurée que l'augmentation progreffive des richelles eft toujours bafée fur le bon emploi des richeffes mêmes, & du bénéfice avec lequel la nature rembourse & accroît celles qu'on lui confie. J'ai dit : & je pense avoir répondu à la plupart des chapitres de l'Auteur. "

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

"

[ocr errors]

Notre bon Fermier a cependant jetté fur les marges du livre en queftion, beaucoup d'autres remarques fort intéreffantes, dont nous pourrons. faire ufage en plufieurs occafions pour la difcuffion de plufieurs points d'éConomie champêtres intimément liés avec de grands objets d'économie politique. Il est vrai qu'on ne peut pas compter fur l'extenfion de la culture à moins qu'elle ne foit un bon métier, profitable à ceux qui l'exécurent, & à ceux qui emploient des richeffes pour falarier les travaux qu'elle exige & qui confacrent leur intelligence & leurs peines à les diriger. L'expérience à fait voir que par-tout où le régime des réglemens prohibitifs étoit adopté, & les impofitions indirectes & arbitraires multipliées, la cu!ture alloit perpétuellement en fe dégradant. Mais il fe fera beaucoup de défrichemens & encore plus d'améliorations, lorfque la fageffe du Gouvernement fe portera par une légiflation, conforme à l'équité naturelle à affurer aux Cultivateurs & aux Propriétaires une plus libre difpofition des récoltes que leurs foins, leurs avances & leurs travaux tirent des terres qui leur appartiennent. Si une légiflation toute oppofée pouvoit être ftable, il n'y auroit nulle efpérance de tirer aucun produit des communes, & celui des autres terres diminueroit chaque jour. Si au contraire les lumieres de l'administration se fixent à des inftitutions vraiment fociales; fi la liberté du commerce s'établit; fi l'impôt eft débarraffé des formes onéreusement compliquées qui le rendent fi fouvent exceffif, arbitraire imprévu, incalculable; fi par des arrangemens fimples & clairs la fource des vexations fans nombre fous lefquelles les campagnes gémiffent quelquefois fe trouve tarie; les Cultivateurs au lieu de fuir dans les villes, étendront leurs entreprises qui leur deviendront plus avantageuses. Beaucoup de Citadins même verferont des richeffes fur la terre en avances foncieres & primitives; ils repeupleront nos campagnes parce qu'ils ne craindront plus d'y perdre leur aifance & leur liberté. Ils y viendront chercher la fanté, la tranquillité, l'innocence, l'amour véritable, fidele & robufte; la paternité fans inquiétude, n'ayant que des foins paisibles & touchans; le plaifir & l'honneur de traiter directement avec la nature toujours bienfaifante, avec les éléments qui ne font ni fins, ni faux, ni traitres; le bonheur enfin de gouverner à la fois avec indépendance & fans

defpotifme, de régner par la raison, par des contrats libres, par le droit des bienfaits; d'augmenter perpétuellement leurs richeffes & leur félicité, en les répandant fans ceffe, en les faifant partager à tout ce qui les environne. Alors les terres prendront de la valeur alors on fe difputera leur poffeffion & leur culture, alors mille particuliers ambitionneront vivement la propriété & l'exploitation des Communes. Alors enfin les Communautés qui en font propriétaires, pourront en tirer un parti très-avantageux par diverfes conventions fur lefquelles il ne faudra qu'éclairer leur intelligence & leur laiffer enfuite la liberté d'agir.

Les Communes font une propriété des Communautés que perfonne n'a le droit de leur ravir non plus qu'aucune autre propriété.

Les Communes ne peuvent être mifes en valeur par les Communautés mêmes, parce qu'aucun de leurs membres ne voudroit y faire ni avances foncières, ni avances primitives, tant que la récolte feroit en

commun.

Le véritable intérêt des Communautés, non plus que celui de la Société & de l'efpece humaine, n'est pas que les terres communales foient partagées entre tous ceux qui y ont droit. Car ces terres alors ne feroient pas mises en valeur, puifque la plupart de ceux qui y ont droit n'en ont aucunement les moyens. Et d'un autre côté, dans la vue de ne pas porter d'atteinte au droit de la Communauté, la propriété des co-partageants pourroit fe trouver foumife à des reftrictions qui nuiroient à la bonne exploitation de chaque part.

Les Communes ne peuvent pas être fimplement affermées au profit des Communautés; car de fimples Fermiers n'auroient pas un affez grand intérêt à y faire des avances foncieres, & faute d'avances foncieres fuffifanla culture en feroit toujours plus difpendieufe & moins productive. Le premier befoin de la terre à mettre en culture, eft d'avoir un Propriétaire.

Elles ne peuvent pas être affermées; parce que fi le produit du fermage étoit adminiftré par une efpece d'Officiers municipaux, ces Officiers pourroient être expofés à des tentations, ou du moins à des foupçons qui troubleroient ou la propriété, ou la tranquillité publiques; & que fi le produit fe partageoit tous les ans entre chacun des membres de la Communauté, il deviendroit pour eux comme une efpece d'aumône gratuite qui les accoutumeroit à l'oifiveté, d'où le pas à la mendicité eft fort court.

Les Communes ne peuvent pas être vendues pour une fomme d'argent, au profit des membres des Communautés, dans le moment actuel, parcequ'elles ont peu ou point de valeur; au futur, parce que les membres de la Communauté n'ont pas le droit d'en dépofféder leurs fucccffeurs, & encore parce que cette fomme inattendue par les pauvres travailleurs de la Communauté feroit pour la plupart d'entre eux l'effet d'un lot à la lo

terie

terie qui amene prefque toujours parmi le peuple, la débauche pour tout fruit.

Que pourra-t-on donc en faire juftement & profitablement lorfque des loix favorables auront donné de la valeur aux terres? Un ufage fort naturel & pour ainfi dire prefcrit par le titre de leur propriété.

Les Communes font un bien public des Communautés, lequel leur eft dans l'état actuel très-peu profitable. Mais les Communautés ont auffi des befoins publics auxquels dans l'état actuel elles ne pourvoient que par des moyens très-onéreux. Ces befoins publics font les chemins, les aqueducs, & les autres ouvrages naturellement communs qui doivent contribuer aux débouchés & à l'amélioration de leur territoire. Si les terres avoient de la valeur, les Communautés pourroient très-bien concéder celles qui leur aptiennent en commun, à condition que l'acquéreur qui en deviendroit pleinement propriétaire, ainfi que fes hoirs, feroient tenus de faire & d'entretenir telle portion d'ouvrages publics à la décharge de la Communauté.

De cette maniere la propriété réelle des biens communaux feroit à perpétuité confervée par les membres de la Communauté qui jouiroient des ouvrages publics dont la confection ou l'entretien en feroit le prix.

De cette maniere encore, les terres communales demeurant conftamment & en toute propriété à un Poffeffeur incommutable, pourroient être par lui portées à leur plus grande valeur.

De cette maniere encore, les ouvrages publics feroient toujours bien entretenus, parce que la Communauté n'ayant d'autre travail à faire pour fes chemins, &c. que celui d'infpecter s'ils font en bon état, y mettroit naturellement beaucoup de vigilance, & que l'aliénataire craindroit les grandes réparations, d'autant qu'il feroit toujours dans le cas de voir faifir fes revenus pour y fubvenir s'il négligeoit l'entretien.

De cette maniere enfin, les ouvrages publics feroient entretenus avec la plus grande économie poffible, parce que le Propriétaire qui en auroit l'entreprise perpétuelle, s'arrangeroit & prendroit les temps & les moyens les plus convenables pour fe pourvoir de matériaux & d'inftrumens, & en déterminer l'emploi.

Peut-être dans un Royaume riche feroit-il poffible que tous les ouvrages publics fuffent ainfi fieffés à perpétuité & pour des Domaines, de forte que le Gouvernement feroit débarraffé d'une grande & pénible adminiftration, & le fervice public rempli cependant avec une grande exactitude.

Nous devons à un Seigneur très-éclairé, & qui fe trouve à-peu-près dans un cas pareil à celui que nous fuppofons vis-à-vis d'une grande Province, cette idée qui nous a paru lumineufe, que nous croyons conforme aux meilleurs principes d'économie politique, & fur laquelle nous aurons foin de revenir ailleurs pour la développer.

Tome XIII,

Rr

Mais en terminant cet article, nous ne pouvons trop répéter qu'il eft impossible de rendre les Communes utiles dans un pays où la légiflation ne feroit pas tellement favorable à la culture, que les propriétés particulieres commenceroient à étre généralement mifes en valeur. Jufqu'alors, & dans tout pays où la culture languira fous le faix des impofitions indirectes & arbitraires, & des prohibitions de commerce, un traité fur les moyens de cultiver les Communes, fût-il fupérieurement bien fait, ne fera jamais qu'un ouvrage prématuré.

COMMUNAUTÉ, f. f. Droit par lequel une chofe appartient également à plufieurs, à Texclufion de tous les autres.

N prend auffi ce terme, pour ce droit primitif & indéterminé que tous les hommes ont originairement de fe fervir des biens que la terre leur préfente, tant que perfonne ne s'en eft encore emparé.

Puffendorf, en parlant de la Communauté, prend ce terme suivant la premiere fignification, pour la Communauté pofitive; & la Communauté négative eft celle qu'on vient d'expliquer en fecond lieu. Les chofes qui appartiennent à la Communauté négative, font cenfées n'être à perfonne dans un fens négatif plutôt que dans un fens pofitif; c'eft-à-dire, qu'elles n'ont encore été affignées en propre à qui que ce foit, & non pas qu'elles ne puiffent l'être jamais on dit encore qu'elles font à tout venant, ou au premier occupant: res in medio quibufvis expofita. Mais les choses communes en un fens pofitif ne different des propres, qu'en ce que celles-ci appartiennent à une feule perfonne, au lieu que les premieres appartiennent également à plusieurs.

C'eft de ces différens droits, que vient la diftinction que font les jurifconfultes des chofes qui en font l'objet, en propres communes, & celles qui ne font à perfonne, mais qui peuvent appartenir au premier occupant.

Mais la propriété des biens qui a détruit la Communauté primitive eftelle avantageufe au genre humain, n'auroit-il pas mieux valu pour les hommes qu'ils demeuraffent dans la Communauté primitive? Je réponds, que depuis la multiplication du genre humain, l'établiffement de la propriété des biens étoit abfolument néceffaire au bonheur des particuliers, au repos & à la tranquillité publique. Car 19. une Communauté universelle des biens qui auroit pu avoir lieu entre des hommes parfaitement équitables & libres de toute paffion déréglée, ne fauroit être qu'injufte, chimérique & pleine d'inconvéniens entre des hommes faits comme ils le font. 2o. Dans une Communauté de toutes chofes, chacun étant obligé de rapporter à la maffe commune tout le fruit de fon induftrie & de fon travail, y auroit des difputes fans nombre fur l'égalité du travail, & de ce que

il

chacun confumeroit pour fon ufage. 3° Si chacun pouvoit trouver dans le fond commun ce qu'il lui faut pour fa fubfiftance, la plupart des hommes comptant fur le travail d'autrui, fe livreroient à la pareffe & à l'oisiveté ; & ainfi on manqueroit bientôt du néceffaire & de l'utile. 4°. Si tout étoit commun, il n'y auroit plus de befoins; & s'il n'y a plus de besoins, il n'y aura plus d'arts, plus de fciences, plus d'inventions. 5. Supposez au contraire la propriété, chacun prend foin de ce qui lui appartient; tous font excités au travail, & les avantages que chacun retire de fon application & de fon industrie donnent la naiffance aux arts, aux fciences, aux inventions les plus utiles & les plus commodes. 6o. Enfin la Communauté produifant une égalité de poffeffions & de richeffes, elle établit aussi une égalité entiere dans les conditions. Mais cela banniroit toute fubordination, réduiroit les hommes à fe fervir eux-mêmes, & à ne pouvoir être fecou→ rus les uns des autres. Ainfi tariroit la principale fource du commerce mutuel d'offices & de fervices, & les hommes fe trouveroient dans une telle indépendance les uns des autres, qu'il n'y auroit prefque plus de fociété

entr'eux.

Rien n'étoit donc plus conforme à la droite raison, & par conféquent au droit naturel, que l'établiffement de la propriété des biens, puifque fans cela il auroit été impoffible que les hommes vécuffent dans une fociété paifible, commode & agréable. Voyez PROPRIÉTÉ.

Malgré toutes ces raifons, Platon, Thomas Morus, & Thomas Campanelle ont voulu introduire la Communauté des biens: quoiqu'ils penfaffent à une communauté pofitive le premier dans fa République; le fecond dans fon Utopie; & le troifieme dans fa République du Soleil. Mais il eft facile d'imaginer & de fuppofer des hommes parfaits: la question eft d'en trouver de tels qui exiftent réellement. On a beau dire que le mien & le tien font la caufe de toutes les guerres; il eft certain au contraire, que le mien & le tien ont été introduits pour éviter les conteftations. D'où vient que Platon lui-même l'appelle la pierre qui marque les limites du champ, une chofe facrée qui fépare l'amitié & l'inimitié. Mais ce qui donne lieu à une infinité de querelles & de divifions, c'eft l'avarice & l'avidité des hommes qui les porte à franchir fans retenue les bornes du mien & du tien, réglées ou par des conventions particulieres, ou par des loix.

Quant à la Communauté des femmes que quelques législateurs ont adop tée, c'eft un des plus grands défordres qui puiffent arriver dans la fociété. Dès le moment que cette Communauté eft établie foit par l'autorifation des loix, foit par la corruption des mœurs, il n'y a plus de vertus diftinctes de fociabilité; tout eft confondu : l'empire du tendre amour diminue fans ceffe; l'amitié conjugale devient froide & fufpete; l'amour paternel s'altere; enfin tous les fentimens de bienveillance, d'affection d'humanité fe corrompent & vont fe perdre fans retour dans des accef

« السابقةمتابعة »