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passer et tromper les saisons du déclin. Nous aurions, si nous voulions bien, à énumérer encore: il publia en 1837, dans la collection des Documents historiques, le poëme provençal sur la guerre des Albigeois; l'Académie des inscriptions et belles-lettres l'avait nommé en novembre 1836 pour succéder à Petit-Radel, et il eut bientôt une place dans la commission de l'Histoire littéraire : le xxe volume de cette collection reçut de lui l'article sur Brunetto Latini, et le xxre doit en contenir plusieurs autres. Mais tous ces développements de l'érudit et ces applications, en quelque sorte officielles, trouveront ailleurs des biographes attentifs. Pour nous, nous aurons assez atteint notre objet, si nous avons réussi à montrer l'homme et l'esprit même. Durant la seconde moitié de sa vie et après le coup qui, en 1822, en avait brisé la première part, l'amitié avait peu à peu réparé les vides et comme refait cercle autour de lui c'était l'amitié encore telle qu'il la concevait et la réclamait, une assiduité pleine de douceur dans les choses de l'intelligence et de l'affection, et, comme l'a dit le poëte,

:

Le jour semblable au jour, lié par l'habitude.

Ainsi, des nuances de joie, tenant aux satisfactions du cœur, se mêlèrent pour lui jusqu'au bout aux applications de l'esprit, et il s'acheminait, sans trop la sentir, dans l'inévitable tristesse des ans. Il mourut presque subitement des suites d'une opération qu'on n'aurait pas crue si grave, le 15 juillet 1844. Sa pensée vivra, et rien du moins n'en sera perdu. Ses manuscrits,

transmis en des mains fidèles, seront publiés avec un choix éclairé (1). Sous une forme ou sous une autre, toutes les idées qu'avait conçues ce rare esprit sont sorties ou sortiront; sa renommée après lui se trouvera mieux soignée que par lui. De premiers et dignes hommages lui ont été payés sur sa tombe par M. Guigniaut au nom de l'Institut, par M. Victor Le Clerc au nom de la Faculté des Lettres; d'autres éloges viendront en leur lieu. M. Piccolos, dans le journal grec l'Espérance (Athènes, 28 août 1844), s'est fait l'organe des témoignages bien dus par ses compatriotes à la mémoire du plus modeste et du plus effectif des écrivains philhellènes. La France ne lui doit pas moins; le xixe siècle surtout serait ingrat d'oublier son nom, car on peut apprécier désormais avec certitude quelle place il a tenue dans ses origines, quel rôle unique il y a rempli, et quelle part lui revient à bon droit dans les fondations de l'édifice auquel d'autres ont mis la façade, et pas encore le couronnement.

Mai-juin 1845.

(1) Ils ont été légués par l'auteur à Mlle Clarke, à l'amie la plus dévouée et la plus attentive à s'acquitter de tous les soins que peut inspirer la piété du souvenir.

POST-SCRIPTUM.

Ce n'est pas une conclusion qu'un tel recueil comporte, et nous ne prétendons en effet ni conclure ni clore. Nous ferons certainement d'autres portraits contemporains, nous en avons déjà fait, en bon nombre, qui n'ont pu entrer dans les présents volumes, et, au moment même où nous achevons cette espèce de série, nous mettons sous presse un volume destiné à la compléter et à la poursuivre. Ainsi point de conclusion; nous aimons notre métier de critique et de portraitiste, nous le continuerons selon l'occasion et le moment, suivant que le cœur et la fantaisie nous le diront, et en tâchant de ménager de notre mieux les convenances diverses. Et à ce propos si quelqu'un s'étonnait que, malgré la dignité académique qui nous a été conférée depuis, nous persistions dans cette voie pratique, nous donnerons une fois pour toutes une explication très-nette et très-franche: en ambitionnant et en obtenant cette dignité, la plus honorable à laquelle puisse aspirer un homme de lettres, nous n'avons jamais considéré qu'elle dût nous empêcher d'être ce que nous étions devant, ni de faire à très-peu près les

mêmes choses que nous nous sommes de tout temps permises. Si donc quelques-uns de nos confrères les critiques croient trouver qu'il serait de meilleur goût à nous de leur laisser le champ libre désormais et de nous taire, nous continuerons (ne leur en déplaise, et qu'ils nous le pardonnent!) de nous imaginer qu'il y a quelque honneur encore pour nous à rester leur confrère.

Il nous a semblé de plus que si cette circonstance nouvelle, si précieuse à nos yeux, en venant certainement compliquer pour nous les difficultés et multiplier les convenances, devait avoir un effet rétroactif et allait jusqu'à nous obliger à rétracter, à modifier les jugements du passé, il n'y aurait ni fond ni base solide à notre travail critique : nous n'avons donc pas hésité à maintenir dans presque tous les cas ce qui est écrit.

Que si maintenant, nous relisant nous-même comme nous venons forcément de le faire, nous avions à confesser notre propre impression et à faire entendre un aveu, nous dirions que, dans la suite de ces articles critiques et dans leur mode de justice distributive (s'il nous est permis d'employer un tel mot), il est certains manques de proportions et de gradations que nous regrettons de n'avoir pu mieux rajuster. En commençant cette réimpression, nous pouvions craindre d'avoir trop penché pour l'enthousiasme; en la terminant, un scrupule contraire nous vient, et nous aurions voulu, dans plus d'un cas, avoir mieux su tempérer l'éloge, de manière à ne jamais paraître le retirer et à n'avoir point

à enregistrer les retours dé nos jugements après les écarts. C'est surtout là où nous nous étions trop avancé d'abord qu'il nous a fallu revenir ensuite et dégager notre première fougue d'enthousiasme, pour la réduire à ce qui nous a semblé plus tard justesse et vérité. Il se trouve de la sorte que les poëtes, certains poëtes, et de ceux qui avaient le plus enlevé nos premières amours, peuvent sembler moins bien traités en définitive que des critiques, des historiens, des hommes que nous estimons et que nous admirons sans doute, mais dont tous pourtant ne sont pas à beaucoup près placés au même degré que les premiers dans notre évaluation des talents. Oh! que du moins les poëtes le sachent: quels que soient les ravissements et les prudences de l'âge mûr, c'est d'eux encore que nous nous préoccupons le plus. Les inégalités mêmes et les brusqueries du retour ne sont pas au fond une preuve d'indifférence. Ces graves études d'historiens, ces portraits aux teintes plus sombres qui ont insensiblement succédé aux premières et poétiques couleurs, en attachant sévèrement notre attention, ne suffisent pas toujours à satisfaire en nous ce qui s'y remue encore du passé. Quand nous relisons et récitons, de Lamartine, son Lac immortel, de Victor Hugo, sa passionnée Tristesse d'Olympio le souvenir sacré renaît vite en nous, et tout cet ordre de notre laborieuse sagesse d'hier est ébranlé. Et même dans de moindres élans, dans des notes plus simples, si elles sont vives, mélodieuses et sincères, il nous arrive d'hésiter. Nous donnerions toujours bien des choses, et (qui sait?) la critique elle

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