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nesse, il est employé. Les Jésuites interviennent, et la paix se rétablit. La guerre de plume précédait et suivait les insurrections. La Société de Jésus fut alors en butte à des attaques dont le grand Conseil ne prévoyait peut-être pas la portée. Les étudiants s'élancèrent encore dans l'arène. Libres ou déjà pères de famille, ils étaient les meilleurs juges de la question : ils la tranchèrent en combattant par des écrits publics les imputations dont on chargeait l'Institut. Dans le Valais, le gouvernement, prenant en considération la pauvreté des Jésuites et admettant que tous leurs voyages ont un but d'utilité publique, ordonne qu'à partir de l'année 1834 les messageries de l'État les recevront gratuitement.

A la même époque, les magistrats de Schwytz les introduisent dans leurs vallées. Le Père Drach, Recteur du Collège de Fribourg, et le Provincial Ignace Brocard essaient en vain de faire différer ce projet; les désirs de Philippe de Angelis, Nonce du Pape, les prières de la population et la voix du Souverain Ponlife triomphent de cette résistance. Les Jésuites pénétraient pour la première fois dans ce pays célèbre par son amour de l'indépendance et de la liberté. Ils devenaient le boulevard que le Catholicisme avançait de la Suisse occidentale à la Suisse o:ientale. Comme pour démontrer que leur prise de possession a un but moral et littéraire, ils transforment en Collége leur Noviciat d'Estavayer, et en 1842, afin de s'associer aux vœux du pays, Grégoire XVI adresse à l'Évêque de Coire un bref ainsi conçu :

«Ayant appris il y a quelques années qu'à Schwytz, dans votre diocèse, les principaux habitants voulaient bâtir un Collége afin que les jeunes gens y fussent formés à la piété et aux lettres par les Pères de la Compagnie de Jésus, nous avons approuvé, comme il convenait, leur pieux dessein, et nous l'avons secondé avec plaisir.

>> Nous félicitons cet illustre canton et Votre Fraternité, nous nous félicitons nous-même de ce que bientôt après les Religieux de la susdite Compagnie y ont été appelés aux acclamations unanimes du peuple et du Clergé; de ce qu'ils y ont ouvert leurs écoles pour le bien de la jeunesse, et que peu à peu, par les aumônes des Fidèles et par les largesses de quelques princes

étrangers, ils ont construit une maison assez vaste pour servir de College.

» Et déjà, par les heureux succès qu'obtinrent ces écoles naissantes, on peut présager de quelle utilité, Dieu aidant, ce College sera pour la Religion catholique et pour la République. »

CHAPITRE III.

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- Ori

La restauration des Bourbons et la France de 1814.- Le prince de Talleyrand conseille à Louis XVIII de rétablir les Jésuites, Hésitation du Roi. Mesures que prend le Ministre disgracié. Situation des Fères de la Compagnie en France. Le Père Varin et les Pères de la Foi. Les Jésuites en présence de la Charte constitutionnelle. Leur existence est elle légale? - Le Père Varin fonde l'Institut des Dames du Sacré-Cœur, de la Sainte-Famille et de Notre-Dame. - But de cette triple fondation. Le Père Delpuits crée la Congrégation. - Ses commencements et son but. — Les premiers Congréganistes. Décret qui la dissout. - L'abbé Legris-Duval en prend la direction. Les Jésuites restent volontairement en dehors du mouvement politique. gine du libéralisme. Ses premiers apôtres. Les Jésuites dispersés en 1815. -Les Evêques de l'Eglise gallicane font appel aux Jésuites pour leurs petits séminaires. Fondation de huit maisons. - Le cardinal de Bausset et les Pères de la Compagnie. Mauvais terrain sur lequel ils se placent. -La presse constitutionnelle se fait l'adversaire de l'Institut et de la royauté.-Mort du Père de Clorivière, provincial de France. - -Simpson lui succède. Sa lettre aux supérieurs sous ses ordres. Les véritables monita secreta des Jésuites. Leur politique mise à nu. Commencement des Missions. - Les Evêques forcent les Jésuites à devenir Missionnaires. -Les Pères se résignent à l'impopularité pour obéir aux ordres des Prélats. - Mission de Brest. L'émeute et la liberté. Les principaux Missionnaires de la Compagnie. -Le Père Guyon. -Effet produit par ses Missions.-L'abbé de La Mennais avec les Jésuites. Lettre du Père Rozaven au Père Richardot sur la neutralité à garder envers le système de M. de La Mennais. Conférence de Rozaven et de La Mennais. Le Père Godinot et l'auteur de l'Essai sur l'indifference. -Leur correspondance-Mécontentement de La Mennais.-Le Père Bzrozowski partisan de ses doctrines. La Mennais appelle les Jésuites à marcher sous son drapeau. M. Louis de Carné blâme les Jésuites. Les partis extrêmes invoquent ou flétrissent les Pères Influence qu'on leur suppose. Le Père Ronsin à la tête de la Congrégation. -Euvres de la Congrégation. - La Chapelle des Missions étrangères. Exercices des Congréganistes. - Fondations pieuses. - La Société des Bonnes-Euvres.-Les petits Savoyards. La Société de saint François Régis. - Le Clergé et les laïques dans la Congrégation. Colère du Libéralisme contre la Congrégation. - But de ces fureurs. On préte au Père Ronsin un pouvoir extraordinaire. Reproches et calomnies adressés aux Congréganistes. La Congrégation domine la France. - - Frayeurs de l'opposition anticatholique.-La Congrégation a-t-elle régné ? - Effets des terreurs libérales. Le duc de Rohan et l'abbé Mathieu remplacent le Père Ronsin. - Congrégation militaire. - Le Libéralisme parvient à la faire dissoudre.

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Une révolution aussi décisive dans les idées que dans les mœurs venait de s'accomplir en France. Cette révolution, dont le foyer permanent était à Paris, réagissait à toutes les extrémités du monde. Malgré les désastres militaires et la chute de l'Empire, la France, trahie par la victoire, régnait encore

moralement sur l'Europe. Le retour des Bourbons, l'enthousiasme universel qui les accueillit, les principes de religion, de monarchie et d'ordre que Napoléon avait su remettre en vigueur, tout tendait à persuader qu'il serait possible un jour de dominer les instincts démagogiques. Il n'y avait qu'à suivre la ligne tracée par l'Empereur avec une si prudente énergie. Il ne fallait restaurer du passé que ce qui était bon et acceptable en soi, qu'ouvrir aux idées nouvelles un lit dont la mesure devait se combiner avec tous les intérêts. Les événements furent plus grands que les hommes : les Bourbons succombèrent sous la tâche que la Providence leur imposait.

Après les premiers élans d'une joie dont les témoignages éclatèrent avec unanimité, la France, de monarchique que Bonaparte l'avait faite, se vit tout à coup ramenée à ses errements révolutionnaires. Il la laissait religieuse : les Bourbons allaient permettre qu'on corrompît sa Foi. Lorsqu'en 1815, après la bataille de Waterloo, le prince de Talleyrand, président du Conseil, voulut s'entendre avec Louis XVIII sur les moyens à employer pour pacifier les esprits et consolider le trône, l'ancien Évêque d'Autun ne craignit pas de dévoiler au Roi sa pensée : « Sire, lui dit-il, Votre Majesté espère se maintenir aux Tuileries: il importe donc de prendre ses précautions. Une sage et forte éducation peut seule préparer les générations nouvelles à ce calme intérieur, dont chacun proclame le besoin. Le remède le plus efficace pour y arriver sans secousse, c'est la reconstitution légale de la Compagnie de Jésus. » Louis XVIII en était encore aux arrêts des Parlements. Il déplorait les effets de la vaste conspiration qui avait renversé le trône, et il ne s'apercevait pas que ce complot était le premier-né de celui qui réalisa la destruction des Jésuites. Il s'étonna de voir un des membres les plus influents de l'Assemblée nationale, un Évêque parjure, lui soumettre un pareil projet. Talleyraud ne s'effraie point des railleries philosophiques du Monarque: il affirme avec plus d'autorité que les Jésuites sont seuls capables de relier le passé au présent en s'emparant de l'avenir. Louis XVIII demande quelques semaines de réflexion. Dans cet intervalle, Talleyrand perd le pouvoir, et de ce jour date la guerre incessante dont la Société de saint Ignace va se trouver l'objet. Le

Ministre n'avait pu convaincre le Roi de la sagesse de ses conseils l'homme d'opposition comprend qu'il importe à ses plans de priver les héritiers de son portefeuille d'un concours par lui regardé comme indispensable. On ne lui accordait pas les Jésuites pour les mettre en France à la tête de l'éducation il les fit attaquer pour les rendre impossibles.

Sans s'en douter, les Jésuites avaient sur les bras un adversaire qui ne demandait pas mieux que d'être leur ami sous les conditions imposées par lui. Ces conditions, le prince de Talleyrand, qui n'avait pas toutes les vertus de ses vices, les eût plutôt cherchées dans les besoins du moment que dans les nécessités sociales et religieuses. Ce n'était pas en effet un diplomate à transiger avec son égoïsme au profit de l'idée chrétienne ou morale. Louis XVIII venait cependant de commettre une faute en négligeant l'avis du Président de son Conseil : le Ministre disgracié la fit expier aux Jésuites.

Ils n'avaient qu'une existence précaire : c'était tout au plus même si leur image vivait dans le cœur de quelques vieillards. Le Clergé se rappelait par tradition les services que la Compagnie de Jésus rendit à l'Église et au royaume. Il n'avait pas oublié les luttes soutenues contre les Pères de l'Institut par l'Université, par les Parlements et par les Philosophes. Les derniers Jésuites qu'il apercevait à l'œuvre lui offraient le modèle de toutes les vertus : ils ravivaient ce sentiment de reconnaissance. Le Clergé les entourait de respect, il se montrait heureux de marcher à l'ombre de leur zèle ; mais peu à peu la mort avait tellement éclairci leurs rangs, qui ne se renouvelaient plus, que, dans un espace assez rapproché, la Compagnie ne devait être qu'un souvenir. Les Pères de la Foi, dont l'abbé Varin était supérieur, et qui n'avaient pas suivi l'exemple de leurs associés allant se réunir à la Compagnie de Jésus, ressuscitée en Russie, commençaient à voir se réaliser le plus cher de leurs vœux. Ils s'étaient dévoués à l'Institut de saint Ignace lorsque tout lui semblait hostile. Ils avaient espéré qu'ils seraient comme les pierres d'attente destinées à la reconstruction de l'édifice. Ils demandaient à y être agrégés au moment où l'Europe faisait servir le succès de ses armes à la restauration des idées d'ordre.

L'intention de l'abbé Varin se manifestait par les œuvres. Les Pères de la Foi avaient, ainsi que les anciens Jésuites, partagé et adouci les maux de l'Église. Ils s'étaient vus proscrits par Napoléon: ils sollicitaient l'honneur d'être proscrits encore. Parmi ces Pères, qui ont déjà fourni à la Société de Jésus des hommes tels que Rozaven, de Grivel, Kohlmann, Sinéo, Mutti et Godinot, on remarque Germain Dumouchel, Éloi du Temps, Edmond Cahier, Nicolas Jennesseaux, Augustin Coulon, Antoine Thomas, Pierre Cuenet, Leblanc, Gloriot, de Brosse, Sellier, Barat, Roger, Gury, Ronsin, Loriquet, Joubert, Boissard, Bequet, Vrindts et Ladevière. Ces Prêtres sont connus à Paris et dans les provinces par leur zèle éclairé et par une charité qui sait se rendre aimable. Le Père de Clorivière a été pendant ce temps investi des pouvoirs nécessaires, afin de rétablir la Société en France et d'accueillir individuellement dans son sein les Pères de la Foi, don les services passés furent acceptés comme un Noviciat anticipé. Ils ont combattu, ils ont enseigné : ils possèdent donc des amis et des élèves. Quelques jeunes Ecclésiastiques, les Laïques même se proposent pour renforcer les rangs des vieux Jésuites. Ils se présentaient dans les conditions exigées par saint Ignace ils sont reçus, car, dans ce moment de transition, l'Ordre sent de quelle importance il est pour lui de s'offrir à l'Église aussi nombreux que possible. Les choses en étaient là lorsque Pie VII publia la bulle qui rétablissait la Société. Les Jésuites de France comprenaient les difficultés de leur position et celles que le gouvernement de Louis XVIII se suscitait comme à plaisir. Ils ne voulurent pas user du droit de liberté que la Charte conférait à tous les Français. Ils se voyaient désirés par les Évêques ; les Conseils municipaux de plusieurs villes importantes invoquaient leur concours. Les Jésuites, à peine nés à la vie publique, ne demandèrent pas au Roi et aux pouvoirs législatifs un permis d'existence qu'ils trouvaient dans la loi; ils se contentèrent de marcher sans bruit vers le but qui leur était assigné.

Cette situation, ne tendant jamais à se régulariser, soulevait de graves questions constitutionnelles. De quelque manière que ces questions allassent être résolues, elles froisseraient ou la liberté de conscience ou les acrimonieux scrupules de ces terribles

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