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Gênes et à Tarnopol, ils ne déviaient jamais de la voie tracée. Cette apparence d'immobilité, qui devient pour les enfants une force attractive à laquelle ils n'osent se soustraire, n'empêcha jamais l'Institut de prendre l'initiative des améliorations. Les disciples de Loyola fournirent même à l'Université de France des préceptes que le philosophe Cousin, alors ministre de l'instruction publique, s'empressa d'adopter, tout en cachant aux yeux profanes la source où il puisait ces modèles. Les Jésuites appliquaient sans bruit les innovations que leur expérience jugeait utiles. Ils n'en tiraient parti que pour le bien de la jeunesse ; d'autres exploitèrent leurs idées pour la glorification d'un amour-propre ministériel.

Ainsi, en 1838, les Pères du Collège de Brugelette en Belgique formulaient un nouveau plan d'études; ils le publiaient en 1839. Le voici dans toute sa simplicité :

« L'enseignement se divise en trois cours principaux:

» Le cours préparatoire, qui comprend les éléments de grammaire française, d'histoire, de géographie, d'arithmétique et les premiers principes de la langue latine. Il dure le temps nécessaire pour s'assurer que l'enfant sait écrire sa langue correctement, et que son intelligence assez développée est capable de l'étude des lettres. Les jeunes élèves de ce cours suivent

un règlement approprié à leur âge.

» Le cours des lettres, qui comprend la grammaire, la poésie et l'éloquence. La grammaire occupe l'élève pendant trois ou quatre années, selon sa capacité et ses progrès. Il apprend alors les langues française, latine et grecque. Les deux années suivantes sont consacrées à la poésie et à l'éloquence. On enseigne l'arithmétique dans les classes de grammaire, les éléments d'algèbre et de géométrie dans celles d'humanités, l'histoire et la géographie dans toute la durée du cours. Des maîtres de langues modernes sont donnés à ceux qui, désirant se livrer à cette étude, sont jugés en état de le faire avec fruit.

» Le cours des sciences, qui est de deux ans. Il comprend des cours de philosophie, de mathématiques, de physique, de chimie, d'histoire naturelle, particuliers à chaque année, et des conférences sur la Religion, l'histoire et la littérature, communes aux deux années.

» Un cabinet de physique, un laboratoire de chimie, des collections de minéralogie, de conchyliologie, de zoologie, offrent aux élèves le moyen d'étudier avec autant d'intérêt que de fruit les sciences physiques et naturelles.

>> S'il se présentait un nombre suffisant de jeunes gens pour former une troisième année de philosophie, on leur ferait suivre des cours spéciaux, tels qu'ils sont indiqués dans le programme général du Cours d'études du Collège. »

M. Cousin, grand-maître de l'Université, était l'antagoniste systématique des Jésuites; mais ce plan, si sagement conçu et présenté d'une manière si lucide, frappa son esprit ; il résolut de le cacher sous des mots plus sonores. Il l'avait donné comme étant son œuvre. M. Villemain, qui lui succéda à l'instruction publique, n'eut rien de plus pressé que de briser l'édifice dont son prédécesseur avait emprunté l'idée-mère et les détails aux disciples de Loyola. Le 27 août 1840, M. Cousin adressa aux Recteurs des Académies une circulaire par laquelle il fait connaître le nouveau règlement des études dans les colléges royaux et dans les colléges communaux de plein exercice. Cette circulaire, paraphrase affaiblie du plan des Jésuites de Brugelette, est ainsi conçue :

<< Monsieur le recteur, je viens appeler toute votre attention sur les modifications apportées au règlement des études des Colléges par l'arrêté que je vous communique.

>> Il est incontestable que l'éducation n'est ni vraie ni complète si elle n'embrasse pas, avec les études classiques proprement dites, de suffisantes connaissances de mathématiques, de physique, de chimie et d'histoire naturelle. Mais comment l'enseignement scientifique doit-il être combiné avec l'enseignement littéraire dans l'économie du Collége? C'est un problème souvent agité et diversement résolu. Voici la pratique actuelle :

» Dans les Colléges de Paris, l'histoire naturelle est placée en sixième et en cinquième; dans les Colléges de département en troisième. L'arithmétique est enseignée à Paris en quatrième, et en troisième dans les départements; la géométrie en troisième et en seconde à Paris, en seconde seulement dans les départements; la chimie en seconde à Paris seulement; la cos

mographie en rhétorique, dans tous les Colléges. Enfin partout l'enseignement de la physique est renvoyé dans l'année de philosophie car il ne vous échappera point, monsieur le recteur, que les classes de mathématiques élémentaires et de mathématiques transcendantes sont particulièrement réservées aux élèves qui se destinent aux Écoles spéciales, et sont plutôt annexées qu'intimement unies au Collége. A la rigueur, il ne faut donc pas les compter dans le cadre ordinaire des études, dont la fin commune est le baccalauréat ès-lettres. Or, il est évident, même en théorie, que cette combinaison des études scientifiques et des études classiques est entièrement défectueuse. La chimie enseignée deux années avant la physique est une véritable anomalie. L'histoire en sixième est au moins inutile, et elle est oubliée quand on arrive à la physique et à la philosophie. L'enseignement de l'arithmétique et de la géométrie en troisième et en seconde surcharge les études si variées de grec, de latin, de français, d'histoire et de langues vivantes, auxquelles ces deux classes suffisent à peine. Enfin, après la seconde, tout enseignement de mathématiques cesse au moment même où l'âge des élèves et les forces croissantes de leur esprit leur rendraient cet enseignement convenable et utile.

>> Telles sont les objections solides que fait la théorie à la combinaison actuelle; et l'expérience de bien des années confirme ces objections. Deux points sont aujourd'hui mis hors de doute par les rapports de MM. les inspecteurs généraux et par ceux de MM. les proviseurs: 1° Les portions d'enseignement scientifiques réparties depuis la sixième jusqu'à la rhétorique inclusivement ne produisent aucun bon résultat; 2° cet enseignement accessoire, infructueux en lui-même, nuit considérablement aux études classiques. Il a donc fallu, monsieur le recteur, chercher une autre combinaison.

>> C'est un principe reconnu que les études doivent être proportionnées à l'âge des élèves. C'est un autre principe également reconnu que, dans un même âge, toutes les études doivent être analogues pour produire une impression forte et durable. Voilà pourquoi l'expérience générale a placé d'abord les études classiques, si bien appelées humanités, parce qu'elles forment l'homme et cultivent à la fois la mémoire, l'imagination, l'esprit

et le cœur. La philosophie, les mathématiques, les sciences physiques et naturelles doivent venir après : elles s'adressent à la réflexion naissante. Tel m'a paru le plan vrai et régulier des études du Collége. Je n'ai donc point hésité à supprimer tous les accessoires scientifiques répartis depuis la sixième jusqu'à la rhétorique, afin de fortifier par là l'enseignement classique, et j'ai rassemblé dans l'année de philosophie tout l'enseignement scientifique, qui alors devient lui-même plus important et plus sérieux. Les mathématiques auront trois classes par semaine; la chimie est annexée à la physique, ainsi que l'histoire naturelle, et ces divers enseignements, joints à celui de la philosophie, se prêteront un mutuel appui et prépareront directement au baccalauréat.

» Ce plan, monsieur le recteur, serait achevé et définitif s'il instituait deux années de philosophie, au lieu d'une seule. Alors les divers enseignements rassemblés dans cette seule année se développeraient mieux et pourraient devenir obligatoires pour tous les élèves. Cette addition d'une année pourrait être utilement compensée par le retranchement d'une de ces classes élémentaires, dans lesquelles on apprend peut-être le latin de trop bonne heure. Il me paraît que six années d'études, depuis la sixième jusqu'à la rhétorique, avec la classe préparatoire de septième, sont parfaitement suffisantes. Les classes qu'on a établies dans plusieurs Colléges sous le nom de huitième, de neuvième même, doivent être complétement dégagées de toute étude latine, offrir une instruction primaire d'un ordre élevé pour les familles qui ne veulent pas envoyer leurs enfants aux écoles primaires ordinaires. >>

Entre ces deux plans d'éducation il n'existe qu'une différence, et elle n'est pas à l'avantage de M. Cousin, mettant son éclectisme à la suite des idées de quelques obscurs disciples de saint Ignace. Au lieu de supprimer totalement les leçons de mathématiques, de physique, de chimie et d'histoire naturelle dans les classes inférieures et de les renvoyer à la philosophie, les Pères de Brugelette veulent qu'on donne aux enfants des notions élémentaires d'arithmétique usuelle et de géographie, notions indispensables à tout âge. A part ce léger changement, qui fut peut-être un calcul, le projet de M. Cousin est servile

ment celui des Jésuites; et, s'il n'y a pas eu contrefaçon, il faut au moins avouer que les Pères de la Compagnie ne sont pas si arriérés en fait d'éducation, puisqu'ils précèdent même dans cette voie de progrès le grand-maître de l'Université et l'éloquent traducteur de Platon, leur adversaire.

Le ministre de l'instruction publique en France rend aux Jésuites un hommage tacite. Dans le mois de mars 1845, la Gazette de l'Instruction publique ne craignit pas d'avoir son jour de franchise. En examinant le cours d'études du Collége et du pensionnat de Fribourg, elle osa dire: « On verra qu'il ne manque ni d'étendue ni de variété. Si, d'un côté, les ouvrages théoriques adoptés pour l'enseignement des langues sont peu connus et ne sont point suivis dans nos Colléges, d'un autre côté, il faut reconnaître que ce cours d'études offre dans son ensemble quelques bonnes améliorations et qu'il remplit plusieurs lacunes de notre enseignement universitaire.

» Ainsi, on peut voir quelle attention les Révérends Pères apportent à l'enseignement de la langue et à l'étude de la littérature française. Dans toutes les classes, ils ne cessent d'exercer les élèves sur l'orthographe, l'analyse logique et grammaticale, et les divers genres de composition française; ils ne bornent pas leur enseignement aux stricts préceptes de la grammaire et de la rhétorique. Dès la troisième, les élèves apprennent les règles du genre épistolaire, et y sont façonnés par des exercices fréquents. En seconde, ils reçoivent des notions complètes de littérature, et on leur fait passer en revue ces différents genres en prose et poésie. En rhétorique, ils étudient avec étendue les préceptes de l'art oratoire, et en particulier l'éloquence de la chaire, du barreau et de la tribune. Des talents trop négligés et dont les résultats peuvent être précieux pour l'avenir des jeunes gens, la lecture à haute voix et la déclamamation, sont l'objet d'études spéciales dans chaque classe. Les principes d'après lesquels l'histoire est enseignée sont indiqués par les livres mêmes portés au programme.

» Le cours de la philosophie de l'histoire, dit le prospectus, en présentant les événements historiques dans leur enchaînement moral et providentiel, donne une connaissance approfondie d'après les vrais principes.

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