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CHAPITRE VIII.

Les Jésuites s'occupent de l'éducation publique. Le système ancien et moderne d'instruction. La pratique avant le précepte. Avant de former des élèves, ils veulent former de bons professeurs. Le Général de l'Ordre recommande d'ouvrir des scolasticats. But de ces maisons. Ecoles normales de la Compagnie. - Lettres de Bzrozowski au Père de Clorivière Le Père Rozaven et les études philosophiques. Préparation au professorat. Demande de révision pour le Ratio studiorum. Manera, Loriquet, Garofalo, Gil et Van Hecke nommés commissaires. Leur travail. Retranchements et additions faits au Ratio.-Proæmium du Général de la Compagnie.- Les deux années de noviciat. Manière d'étudier des Jésuites. - Leur plan pour former les autres. De quelle manière ils envisagent l'éducation publique. Comparaison du système universitaire avec celui de la Compagnie. - Plan d'études des Pères de Brugelette introduit dans l'Université de France par M. Cousin. - La Gazette de l'Instruction publique et le College de Fribourg.. - Le Convitto dei Nobili à Naples. Etat de l'éducation dans les Deux-Siciles. Les Jésuites et l'Université de Naples.. Rapport au Ministre de l'instruction publique par Petit de Baroncourt.-Causes de la guerre que les Universités font aux Jésuites. -M. Thiers et le patriotisme. Les élèves des Jésuites accusés par M. Thiers de n'être pas aussi bons Français que lui. Protestation des élèves. Botta et Gioberti font un crime aux Jésuites d'arracher du cœur des enfants l'amour de la famille. Les Jésuites et leurs œuvres. Les théologiens et les ascètes. Perrone et Martin. Patrizi et Rozaven. Roothaan et WeninLes orateurs Maccarthy et Finetti. - Ravignan et Minini. Les philosophes. Buczinski et Rothenflue. - Dmowski et Liberatore. Vico et Taparelli. Les découvertes astronomiques du Père de Vico. - Secchi et Caraffa. Les Jésuites polémistes. - Robert Plowden et Rozaven. Kohlmann et Arillaga. -Les Jésuites archéologues, Travaux de Marchi. - Les Pères Cahier et Arthur Martin. Les Jésuites littérateurs. Vico et Bresciani. -Les grandes familles et la Compagnie de Jésus. Conclusion.

ger.

Au milieu des obstacles de toute nature qui surgissaient pour entraver la recomposition de la Société de Jésus, et qui glorifiaient son passé pour la tuer dans le présent ou dans l'avenir, elle avait su maîtriser les entraînements comme le découragement. Elle s'était résignée aux combats ainsi qu'à la persécution; la lutte ne l'effrayait pas plus que la calomnie. Ces inimitiés permanentes, dont le caractère, depuis trois cents ans, n'avait jamais varié, ne laissaient aucune incertitude aux Catholiques sur le but de tant de clameurs. Les révélations abondaient de tous les côtés; les indiscrétions de la victoire expliquaient des attaques pour ainsi dire périodiques. Les Jésuites n'étaient que le cri de ralliement donné aux passions irréligieuses, le mot d'ordre pour battre en brèche l'Église universelle et les principes de Foi. Nous avons dit comment l'Institut repoussa cette guerre, sans dignité et sans justice, que des Barbares auraient rougi d'entreprendre et de soutenir. Il faut maintenant voir quel fut le plan d'existence que les Jésuites se tracèrent dans l'intérieur de leurs Maisons.

En dehors de la prière et des œuvres de piété ou de charité, qui sont un secret entre Dieu et le Prêtre, les disciples de Loyola, à peine rendus à la vie religieuse, cherchèrent à offrir à l'éducation un puissant levier. Hommes de leur siècle par le savoir, ils comprirent, dès le premier jour du rétablissement de leur Ordre, qu'ils devaient populariser l'instruction. C'était un des trois grands buts que le fondateur leur assigna. Leurs devanciers l'avaient atteint; les nouveaux Pères de la Compagnie ne voulurent pas se trouver en arrière. Le mouvement des esprits, l'impulsion donnée aux connaissances humaines, les découvertes signalées dans les arts et dans les sciences, les brillantes théories enfantées par la liberté, tout leur faisait une loi d'étudier les innovations et de les appliquer dans ce qu'elles ont d'utile et de réalisable. La pratique chez eux vient toujours avant le précepte. Les Pères les plus versés dans l'enseignement s'étaient, durant plus de quinze années, consacrés à suivre pas à pas les améliorations que l'expérience leur conseillait d'adopter. Afin de former de bons élèves, ils furent unanimes pour déclarer qu'il importait avant tout de créer d'excellents professeurs. Ce fut de ce point que l'Institut partit. Cette base posée, il ne songea aux difficultés que pour les vaincre; il se mit à l'œuvre avec une patience qui est la plus féconde de toutes les activités.

Dès 1814, plusieurs royaumes, s'associant à la pensée de Pie VII, réclamaient les Jésuites comme les instituteurs des générations nouvelles. Les Jésuites répondirent au vœu des peuples catholiques. Le premier soin des chefs de l'Ordre fut de préparer dans le silence les maîtres qui plus tard apprendraient à la jeunesse à être chrétienne et studieuse. Le Père Bzrozowski, Général de la Compagnie, et les Supérieurs de Rome se font une occupation spéciale de ces labeurs de l'intelligence. La disette des régents est signalée dans beaucoup de Provinces; cela n'empêche pas Bzrozowski de recommander avec instance que les jeunes gens admis dans la Société subissent leurs deux années de noviciat avant d'être employés à l'enseignement. Il faut qu'ils soient façonnés aux vertus de leur état pour qu'ils puissent initier les autres à la science. Ce n'est pas assez de demander aux Novices vingt-quatre mois de ré

flexion et de solitude. Lorsque ce temps de probation est écoulé, les chefs de la Compagnie exigent que le Scolastique se renferme dans une maison d'études, et que là il travaille à la littérature, aux mathématiques, à la théologie, à la philosophie et à la physique. Ces maisons d'études sont fort rares encore. Bzrozowski presse les Provinciaux d'en ouvrir sur les points les plus favorables; il veut même qu'on sacrifie des établissements déjà fondés à ce besoin de l'avenir. « Les établissements, mande-t-il de Polotsk le 7 septembre 1817 au Père de Clorivière, font grand bien, je n'en doute pas, mais je crains que le bien que nous faisons à présent ne nous mette hors d'état d'en faire par la suite. Il n'est pas d'homme si pressé par la famine qui ne sacrifie une partie de son grain pour ensemencer ses terres dans la vue de l'avenir. Mais, comment entretenir une maison d'études sans avoir de fonds assurés? C'est là, je le vois, la plus grande difficulté. Je répondrai cependant que, toute grande qu'elle est, elle ne doit pas nous arrêter, puisqu'il s'agit d'une œuvre qui tend évidemment à la gloire de Dieu. Notre Compagnie n'a point d'autre dessein; tâchons de nous rendre dignes des soins de la divine Providence, et elle ne nous manquera pas.

Le 18 juin 1817, le Général, écrivant au Provincial de France, faisait une condition obligatoire pour les jeunes Jésuites du travail et d'une solide instruction. « Nous ne devons pas perdre de vue, lui mandait-il, que nous voulons former des Jésuites, et que dans un Jésuite la science est absolument nécessaire, presque aussi nécessaire que la piété même. Je voudrais donc qu'avant de penser à de nouveaux établissements, on s'occupât efficacement à créer une maison d'études, où nos jeunes gens pussent successivement acquérir le savoir que demandent nos Constitutions. Nous devons travailler solidement et penser à l'avenir... Notre Saint-Père a jugé devoir, dans les circonstances où nous nous trouvons, rétablir la Compagnie; et ce n'a pas été sans une direction particulière du Saint-Esprit, nous devons le présumer d'un si saint Pontife. C'est donc à nous à coopérer à ses desseins en faisant tous nos efforts pour rétablir effectivement la Compagnie de Jésus, c'est-à-dire une Compagnie de saints et savant ouvriers évangéliques. Mais, pour join

dre la science à la sainteté, il faut nécessairement que nos jeunes gens aient le temps et le moyen de faire de bonnes et solides études. Ce point est décisif et fondamental. »

Du fond de la Russie-Blanche, le Général de l'Institut s'est rendu compte des besoins de la société moderne: il désire que ses frères d'Europe puissent les satisfaire. Il presse donc ses subordonnés de créer une école normale dans chaque royaume, afin d'avoir une pépinière de professeurs distingués. C'est le vœu le plus ardent de Bzrozowski; le Père Rozaven, Assistant de France, n'est pas moins explicite. Rozaven sait par expérience que dans sa patrie toutes les idées ont été faussées, et qu'il est plus urgent que jamais de faire pénétrer quelque déduction logique dans ces têtes incandescentes. Le 29 décembre 1831, il écrivit au Père Richardot, Provincial :

« Sans doute qu'il est important d'avoir de bons professeurs de théologie; mais, à mon avis, la première nécessité en ce genre est d'avoir un bon professeur de logique, et je vous avoue que, si je n'avais qu'un sujet également propre à enseigner la théologie et la logique, je n'hésiterais pas un seul instant à lui faire enseigner la logique. Une bonne logique est le fondement nécessaire de toutes les sciences supérieures, et sans ce fondement elles ne peuvent avoir aucune solidité. Un jeune homme qui a fait une bonne logique pourra bien faire sa théorie sous un professeur très-médiocre, et même sans professeur; mais celui qui n'a pas ce fondement ne sera jamais un grand théologien, eût-il pour professeur Suarès et saint Thomas. Il pourra acquérir des connaissances, de l'érudition; mais il n'aura jamais ce jugement sûr et cette exactitude de principe et d'expression qui sont indispensables à un théologien... »

Rozaven conclut ainsi : « Il faut faire en sorte que les jeunes gens ne soient envoyés dans les petits Séminaires, soit pour régenter, soit pour surveiller, qu'après avoir fait leur philosophie. La régence faite avant la philosophie ne leur sera jamais aussi avantageuse que s'ils la faisaient après. Dans ces commencements tout cela est difficile, mais il faut y tendre persévéramment, et aux dépens même de quelques inconvénients, car, autant que j'en puis juger, la science du gouvernement ne consiste pas seulement à éviter les inconvénients, mais

aussi à les permettre à propos dans la vue d'un plus grand bien. »

Tel était le plan des Jésuites pour les professeurs que la Compagnie allait former dans son sein. Ce plan ne manquait ni de prévoyance ni d'étendue; il fut accepté et suivi partout. On créa dans la plupart des capitales, centres de hautes études, des maisons pour préparer les scolastiques à l'enseignement. On voulut qu'ils assistassent à tous les cours des hommes célèbres dans les lettres ou dans les sciences. A Paris, l'on fonda même une maison où les jeunes Jésuites, sous la direction du Père Dumouchel, se livrèrent spécialement aux mathématiques et à la physique. Binet, Leroy, Cauchy, Ampère, Haüyet Querret devinrent, avec Cuvier, leurs maîtres de prédilection. Ces jeunes gens n'étaient distraits de leurs travaux intellectuels que par la pratique des bonnes œuvres. Ils se récréaient en visitant les hôpitaux et les malades, en instruisant les prisonniers ou, pendant les vacances, en s'initiant aux labeurs de l'Apostolat.

L'Ordre de Jésus avait demandé des professeurs dignes de continuer ceux qui avaient, dans l'éducation des siècles précédents, élevé si haut le nom de la Compagnie; les Scolastiques d'Italie, d'Allemagne et de France se présentèrent. Mais depuis long-temps chacun exprimait le désir de voir le système des études acquérir de l'uniformité dans les colléges. Tous souhaitaient qu'on fit concorder les règles tracées par les Constitutions de saint Ignace et le Ratio studiorum avec les besoins modernes. Les deux Congrégations générales tenues de

La plupart de ces savants connaissaient les auditeurs que la Société de Jésus envoyait à leurs cours. Ces savants voulurent donner à l'Institut de Loyola une preuve de leur estime et de leur dévouement. Ils offrirent donc des leçons particulières aux jeunes gens qui plus tard devaient propager le goût des sciences, et c'est à cette proposi ion que l'abbé Hany avait faite que répond une lettre du Père Richardot en date du 17 novembre 1821:

"Monsieur l'abbé, j'ai appris pár M. Dumouchel votre extrême bonté pour lui et pour les élèves que je lui ai confiés. Il est de mon devoir de vous témoigner ma vive reconnaissance pour une offre aussi bienveillante. Je n'avais jamais eu la pensée hartie de porter mes vues si haut, quoique je connusse déjà votre zèle pour l'honneur de la Religion et votre désir de voir le Clergé ressaisir la considération que les sciences lui avaient autrefois procurée. Mais le zèle ne vieillit pas, et la charité de Jésus-Christ vous presse. Croyez, monsieur, que je sais apprécier une marque d'affection aussi distinguée, et que ma gratitude est sans bornes. Ces jeunes gens, que je destine à professer les sciences dans la suite, pénétrés eux-mêmes de ce sentiment, le perpétueront parmi leurs élèves, et votre nom, si célèbre dans le monde savant, sera révéré parmi nous d'une manière particulière. "

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