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DE

LA LIBERTÉ

DE

LA MUSIQUE.

I.

Ly a chez toutes les Nations * deux chofes qu'on doit refpecter, la Religion & le Gouvernement; en France on y en ajoute une troifieme, la Mufique du pays. M. Rouffeau a ofé pourtant en médire, dans cette Lettre fameuse, tant combattue & fi peu réfutée; mais les vérités qu'il a eu le courage d'imprimer fur ce grand fujet, lui ont fait plus d'ennemis que tous fes paradoxes; on l'a traité de perturbateur du repos public, qualification d'autant mieux mé̟

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ritée, que la Mufique Françoife laiffe fort en repos ceux qui l'écoutent. Quelques mauvais plaifans prétendoient néanmoins que M. Rouffeau eût été mieux nommé perturbateur du bruit public, attendu que la Mufique Françoise en fait beaucoup.

I I.

Dans les matieres les plus férieufes il eft permis à nos Ecrivains de faire la fatyre de la Nation; on eft bien reçu à nous prouver, que fur le commerce, fur le droit public, fur les grands principes de la légiflation, nous ne fommes encore que des enfans; mais c'est un crime de nous dire que nous ne faifons que balbutier en Mufique. La plupart des Lecteurs du Citoyen de Geneve opinoient à le traiter comme cet Artiste de la Grece, que de féveres Magiftrats chafferent pour avoir voulu ajouter une corde à la lyre. Aurions-nous adopté ce principe de Platon, que tout changement dans la Mufique annonce un changement dans les moeurs? Si c'eft là le fujet de nos craintes, nous pouvons être tranquilles ; nos mœurs font à un point de perfection où le changement n'a rien à leur faire perdre.

III. Des

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I I I.

Des Bouffons arrivés d'Italie il y a huit ans, & qu'on eut l'imprudence de montrer au public fur le théâtre de l'Opéra, ont été la funefte caufe de la Lettre de M. Rouffeau, & d'une guerre civile très-vive qu'elle a excitée parmi nous. Cette guerre fuffiroit pour truire l'opinion commune, que les François, trop inconftans & trop légers ne font pas capables de s'occuper longtems d'un même objet. Durant une année & plus, nos entretiens & nos ouvrages ont épuifé la matiere; notre parterre divifé préfentoit l'image de deux armées en présence, prêtes à en venir aux mains; & cet espace d'une année, employé à differter bien out mal fur la Mufique, eft fans doute un tems fort honnête pour un pays où l'on ne parle que deux jours d'une bataille perdue, & où l'on emploie même le fecond à chanfonner le Général. Auffi notre querelle musicale avoit été préparée infenfiblement & de longue main, comme les grands événemens qui doivent agiter les Etats. Des mouvemens qui d'abord paroiffoient légers, s'éten Tome IV.

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dant & fe fortifiant peu à peu, ont enfin produit une fermentation violente. En voici l'origine & le progrès. Il y a environ quarante ans que les Directeurs de l'Opéra firent la même faute qu'en 1753; ils appellerent fur leur théâtre des Bouffons d'Italie. Les oreilles françoifes, quoiqu'accoutumées à la pfalmodie de Lully & de fes difciples, la feule efpecé de chant qu'elles connuffent encore, accueillirent plus qu'on ne l'avoit efpéré la nouvelle Mufique qu'on leur faifoit entendre ; déjà elle acquéroit des partifans, & la mauvaise doctrine gagnoit du terrein; il fallut pour détruire le mal le couper par la racine; les Bouffons furent renvoyés, & la paix revint à l'Opéra avec l'ennui. Cepen-. dant quelques Muficiens furent frappés de l'effet qu'avoit produit fur les Auditeurs François cette Mufique Italienne, moins uniforme, moins languiflante, & moins pauvre que celle dont on nous avoit allaités jufqu'alors. Ces Muficiens eflayerent donc de nous donner,comme à des enfans qu'on fevre ture un peu plus forte. Mouret s'écartant le premier de la route battue, mais s'en écartant peu, ( car il ne vouloit ni

une nourri

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