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les moyens d'apprécier, foit en les expliquant, foit en les niant, les prétendus prodiges dont les fauffes Religions s'appuient. Enfin le fage qui n'ignore pas que l'erreur a fes martyrs, remarque en même temps que l'avantage de la vérité doit fe réduire à en avoir un plus grand nombre; ainfi pour diftinguer ceux qui ont donné leur vie par conviction de ceux qui l'ont prodiguée par fanatifme, il ne peut établir d'autre regle que celle de compter les fuffrages. Sur ces différens objets le Philofophe fe contente d'établir les principes, & en laiffe aux Théologiens l'ufage & l'application; ce détail feroit étranger à des Elémens de Philofophie qui ne doivent contenir que des germes de vérités premieres, fans mélange & fans controverfe; les preuves de la Religion ont d'ailleurs été développées par un fi grand nombre d'Ecrivains, que les lumieres de la Philofophie femblent n'avoir plus rien à y ajouter, & que de nouveaux écrits fur ce fujet feroient plus louables que néceffaires.

Mais un objet qui intéreffe & qui regarde particuliérement le Philofophe, c'eft de diftinguer avec foin les vérités

de la Foi d'avec celles de la raifon, & de fixer les limites qui les féparent. Faute d'avoir fait cette diftinction fi néceffaire, d'un côté quelques grands génies font tombés dans l'erreur, de l'autre les défenfeurs de la Religion ont quelquefois fuppofé trop légérement qu'on lui portoit atteinte. Cette difcuffion nous écarteroit trop de notre fujet, & mérite par fon importance d'être la ma◄ tiere d'un écrit particulier (*).

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I V.

Méthode générale qu'on doit fuivre dans les Elémens de Philofophie.

No

[Ous n'avons fait jufqu'ici que fixer en général les différens objets qui appartiennent à des Elémens de Philofophie. Examinés plus en détail, ces objets peuvent fe réduire à quatre, l'ef pace, le temps, l'efprit & la matiere. La Géométrie fe rapporte à l'efpace, l'Aftronomie & l'Hiftoire au temps, la Méta

(*) Voyez l'Ecrit fur l'abus de la critique en matiere, de Religion, imprimé dans ce volume.

phyfique à l'efprit, la Phyfique à la matiere, la Méchanique à l'efpace, à la matiere & au tems; la Morale à l'efprit & à la matiere réunis, c'est-à-dire à l'homme; les Belles-Lettres & les Arts à fes goûts & à fes befoins. Mais quelque différentes que ces Sciences foient entr'elles, foit par leur étendue, foit par leur nature, il est néanmoins des vues générales qu'on doit fuivre dans la maniere d'en traiter les élémens; il eft enfuite des nuances différentes dans la maniere d'appliquer ces vues générales aux élémens de chaque Science particuliere; c'eft ce qu'il faut développer.

Tous les êtres, & par confequent tous les objets de nos connoiffances ont entr'eux une liaison qui nous échappe: nous ne devinons dans la grande énigme du monde que quelques fyllabes dont nous ne pouvons former un fens. Si les vérités préfentoient à notre efprit une fuite non interrompue, il n'y auroit point d'élémens à faire, tout fe réduiroit à une vérité unique dont les autres vérités ne feroient que des traductions différentes. Les Sciences feroient alors un labyrinthe immenfe, mais fans myftere, dont l'intelligence fuprême embrafferoit

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brafferoit les détours d'un coup d'oeil, & dont nous tiendrions le fil. Mais ce guide fi néceffaire nous manque; en mille endroits la chaîne des vérités eft rompue; ce n'eft qu'à force de foins, de tentatives, d'écarts même que nous pouvons en faifir les branches; quelques-unes font unies entr'elles, & forment comme différens rameaux qui aboutiffent à un même point; quelques autres ifolées, & comme flottantes, représentent les vérités qui ne tiennent à aucune.

Or quelles font les vérités qui do vent entrer dans des Elémens de Philofophie? Il y en a de deux fortes; celles qui forment la tête de chaque partie de la chaîne, & celles qui fe trouvent au point de réunion de plufieurs branches.

Les vérités du premier genre ont pour caractere diftinctif de ne dépendre d'aucune autre, & de n'avoir de preuves que dans elles-mêmes. Plufieurs Lecteurs croiront que nous voulons parler des axiomes, & ils fe tromperont; nous les renvoyons à ce que nous en avons dit ailleurs, (d) que ces fortes de

(d) Difcours préliminaire de l'Encyclopédie, p. 46, Tom. I. de ces Mélanges.

Tome IV

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principes ne nous apprennent rien à force d'être vrais, & que leur évidence palpable & groffiere fe réduit à exprimer la même idée par deux termes différens; l'efprit ne fait alors autre chose que tourner inutilement fur lui-même fans avancer d'un feul pas. Ainfi les axiomes, bien loin de tenir en Philofophie le premier rang, n'ont pas même befoin d'être énoncés. Que devons-nous donc penfer des Auteurs qui en ont donné des démonftrations en forme? Un Mathématicien moderne, célébré de fon vivant en Allemagne comme Philofophe, commence fes Elémens de Géométrie par ce théorême, que la partie eft plus petite que le tout, & le prouve par un raisonnement fi obfcur, qu'il ne tiendroit qu'au Lecteur d'en douter.

La ftérilité & une vérité puérile font le moindre défaut des axiomes; quelques-uns de ceux même dont on fait le plus d'ufage, ne préfentent pas toujours des notions juftes, & font capa→ bles d'induire en erreur par les fauffes applications qu'on en peut faire. Pour n'en citer qu'un feul exemple, que fignifie ce principe fi commun, qu'il faut exifter fimplement avant que d'exifter

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