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fi vafte fe refferre beaucoup, fi on réduit ces connoiffances à ce qu'elles ont d'abfolument néceffaire.

A l'égard des connoiffances fimplement curieufes, il faut en diftinguer de deux efpeces. Quelques-unes tiennent au moins indirectement aux connoiffances utiles. Il doit donc être permis, il est même avantageux que ces Sciences foient cultivées avec quelque foin, furtout fi elles dirigent leurs recherches vers les objets d'utilité.

Mais que dirons-nous des connoiffances de pure fpéculation, de celles qui ont pour unique but le plaifir ou l'oftentation de favoir? Il femble que l'on ne doit s'appliquer à ces fortes de Sciences que faute de pouvoir être plus utile à fa nation. D'où il résulte qu'elles doivent être peu en honneur dans les Républiques, où chaque citoyen faifant une partie réelle & indifpenfable de l'État, eft plus obligé de s'occuper d'objets utiles à l'État. Ces études font donc réfervées aux citoyens d'une Monarchie, que la conftitution du gouvernement oblige d'y refter inutiles, & de chercher à adoucir leur oifiveté par des occupations fans conféquence.

Nous ne parlons encore ici que des Sciences purement fpéculatives, qui renfermées dans un objet abftrait & difficile, ne fauroient être l'occupation ou l'amufement que d'un très-petit nombre de perfonnes. Il n'en eft pas tout-àfait de même des connoiffances de pur agrément. Si leur culture ne peut être l'ouvrage que du talent & du génie, les fruits qui en naiffent doivent être partagés & goûtés par la multitude. Ces connoiffances pouvant contribuer à l'agrément de la fociété, font fans doute préférables à cet égard aux connoiffances de fpéculation aride; mais cet avantage eft compenfé par un inconvénient confidérable. En multipliant les plaifirs, elles en infpirent ou en entretiennent le goût, & ce goût eft proche de l'excès & de la licence; il eft plus facile de le réprimer que de le régler. Il feroit donc peut-être plus à propos les hommes fe fuffent interdit les arts d'agrément que de s'y être livrés(i). Néanmoins ces arts d'agrément étant

que

(i) La plupart des arts, dit Xenophon, livre V. des Dits mémorables, corrompent le corps de ceux qui les exercent; ils obligent de s'affeoir à l'ombre & auprès du feu; on n'a de temps ni pour fes amis ni pour la République,

une fois connus, ils peuvent, dans cer. tains Etats, occuper un grand nombre de fujets oififs, & les empêcher de rendre leur oifiveté nuifible. Nous pafferions les bornes de cet effai, fi nous entrions dans un plus grand détail. Mais en confidérant ainfi fous différens chefs la queftion propofée, & en la divifant en différentes branches, on pourra examiner, ce me femble, avec quelque précifion, l'influence que la culture des Sciences & des Beaux-Arts peut avoir fur la Morale des Etats & fur celle du citoyen.

X I I.

Morale du Philofophe.

VE

Enons à la Morale du Philofophe. Elle a pour but, ainfi que nous l'avons dit, la maniere dont nous devons penfer pour nous rendre heureux indépendamment des autres. Cette maniere de penfer fe réduit à deux principes, au détachement des richeffes & à celui des honneurs. Le premier entre dans la Morale de l'homme, & nous

en avons parlé; le fecond paroît tenir moins à cette Morale, parce que les honneurs ne font partie ni de notre véritable bien être physique, ni même de l'existence morale à laquelle tous les citoyens ont un droit égal. Mais si le défintéreffement fur les honneurs n'eft pas d'obligation morale par rapport à la fociété, il n'eft pas moins néceffaire à noire bonheur que le défintéreffement fur les richeffes. La raifon permet fans doute d'être flatté des honneurs, mais fans les exiger ni les attendre; leur jouiffance peut augmenter notre bonheur, leur privation ne doit point l'altérer. C'eft en cela que confifte la vraie Philofophie, & non dans l'affectation à méprifer ce qu'on fouhaite. C'eft mettre un trop grand prix aux honneurs que de les fuir avec empreffement ou de les rechercher avec avidité; le même excès de vanité produit ces deux effets

contraires.

D'après ces principes la Morale établit & détermine jufqu'où il eft permis de porter l'ambition. Cette paffion le plus grand mobile des actions & même des vertus des hommes, & que par cettę raison il feroit dangereux de

vouloir éteindre, a cela de fingulier, que lorsqu'elle est modérée, c'est un fentiment eftimable, la fuite & la preuve de l'élévation de l'ame, & que portée à l'excès, elle eft le plus odieux & le plus funefte de tous les vices. En effet elle eft le feul qui ne refpecte rien, ni fang, ni liaisons, ni devoirs. L'avare eft quelquefois généreux pour fon ami, l'amant lui facrifie quelquefois fa maîtreffe, l'ambitieux facrifie tout à l'objet qu'il veut atteindre ou qu'il poffede. Auffi de tous les maux que les paffions des hommes leur caufent, les malheurs que l'ambition leur fait éprouver font ceux qui excitent le moins la compasfion du fage.

Pour réprimer plus efficacement l'ambition, la Morale nous fait fur-tout envifager les excès qui en font la fuite. C'est parce que l'ambition exceffive eft une paffion fi détestable , que l'envie en eft une fi honteufe. Ces deux paffions ont leur fource dans le même principe; l'ambition a feulement quelque chofe de moins vil, en ce qu'elle fe montre pour l'ordinaire à découvert, au lieu que l'envie agit en fe cachant; elle fuppofe en effet, ou la connoiffance fecrette de

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