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Sous des habits divers s'y promène à toute heure
L'art, avide étranger, qui, défertant fes bords,
Vient chercher le génie & d'antiques tréfors.
La main de Raphaël en embellit l'enceinte :
Il trempa fes pinceaux dans une fource fainte;
Et fes tableaux, tracés fur fes murs immortels,
A la postérité demandent des autels.

Tandis que la fortune, aveugle fouveraine,
Fixe toujours fur toi fa balance incertaine,
Tranquille, tu languis dans le fond d'un palais ;
Fais circuler au loin fes rapides bienfaits:
Avec moi, fur les bords de l'antique Aufonie
Entends gémir la voix du Dieu de l'harmonic.
C'est-là que, fur un trône élevé par fes mains,
L'architecture en foule appelle les humains.
Vois chez l'Anglois, jaloux d'agrandir le nom
d'homme ?

L'augufte liberté, jadis mère de Rome,
Du fein des factions vengereffe des loix,
Se placer toute armée à côté de fes Rois :
L'Afie, efclave encor de la force & du crime,
Ouvrir un large fein au tyran qui l'opprime.
Peuple jadis Héros! ô Roi de l'Univers!

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Tes mains d'un Jannisfaire ont donc reçu des fers!
Pour ne point voir tes pleurs, remontons vers l'Afrique:
Là, le noir habitant, courbé sous le tropique,
Au rang des animaux fervilement rangé,
Sourit à l'ignorance, & d'un vil préjugé

N'ofant brifer encore la groffière enveloppe,
Achette au poids de l'or les talens de l'Europe.
L'Égypte, plus pompeufe, étale avec fierté
Les merveilleux tréfors de fa fécondité,
Les fept canaux du Nil & les beautés fauvages
Dont ce fleuve orgueilleux a paré fes rivages.
Sur ce globe infici, de climats en climats
Le génie égaré le promène à grands pas.
L'Univers, eft le livre où le fage doit lire:
Il marit fa raifon, il étend fon empire;
Et s'armant du flambeau de la réflexion,
Il defcend dans le cœur de chaque nation.
Que ce fpectacle eft grand! quelle étude profonde
De combattre l'erreur & de juger le monde !
Mais bien loin d'imiter ces hardis voyageurs
De leur pays fi cher infâmes déserteurs,
Qui, traînant avec foi l'orgueil & l'esclavage,
Aux Dieux de leurs voifins confacrent leur hommage,
On ne le verra point dégrader par mépris
Ces monumens facrés dont s'honore Paris,
Ce périftile où l'art s'arrête avec furprife,
Où l'admiration veille toujours, aflife,
Pour bâtir un palais égal à ceux des Rois,
Sur l'étranger furpris faffe tomber fon choix,.
Et de Rome à grands frais appelant la science,
Du fruit de fes tréfors déshériter la France.
Mais quoi ! ton œil laffé de chaffer le repos
Se ferme appefanti fur ces vaftes tableaux,

Et ta main défaillante, ô lâche Sybarite,

Entraîne lentement la molleffe à ta fuite!
Vas, fuis, l'amour des Arts, ces élans, ces tranfports
Qui de l'âme ébranlée agitent les refforts,

Ne font pas fait pour l'homme engourdi par le vice,
Et la gloire pour lui fut toujours un fupplice.
Douce philofophie! au fem de la grandeur
Tu n'as jamais placé le fiège du bonheur;
On te vit rarement entrer chez l'opulence,
Du riche dédaigneux careffer l'in olence,
Superbe, & le vifage enluminé de fard,
La nuit fur le duvet, & lé jour dans un char;
Tu méprifes des biens arrachés par la brigue,
Et ne vends point ton cœur & ta voix à l'intrigue,
Conferve ta nobleffe & ta fimplicité,

Et laiffe murmurer le vulgaire hébêté,

Qui, n'adorant les Dieux qu'armés de leur tonnerre,
Baife en tremblant leur main follement fanguinaire.
Ton empire eft plus doux. Tu vis à ton afpect-
Voltaire, foixante ans faifi d'un faint refpect,
Avec toi de Ferney cherchant l'ombre tranquille,
A la Cour de vingt Rois préférer ton asyle.
Je te ferai fidèle, & j'en fais le ferment.
Oui, malgré le destin qui fur nous fourdement
Balance tous les jours quelque nouvel orage,
Je veux en expirant embraffer ton image.

(Par M. le Chevalier du Puy-des-1ftets
Chevau-Léger de la Garde du Roi,)

RÉFLEXIONS fur le caractère du Docteur Goldfmith, & fur quelques-uns de fes, Écrits.

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LA Morale eft fans contredit, de toutes les

études la plus néceffaire à notre bonheur. A mesure qu'un peuple s'eft avancé vers l'état de civilifation fa morale s'eft perfectionnée, & des hommes fages en ont établi les principes, & donné les leçons ; mais ces généreux Inftituteurs des Nations n'ont pas tou jours fuivi la même route. Chez les Anciens comme chez les Modernes, les uns fe font bornés à dicter des Loix, & les autres ont fu faire fenur, par des exem ples intéreffans, l'avantage de lears préceptes., En nous amufaut ils nous rendent meilleurs. Aufli cette méthode l'emporte de beaucoup fur la première, & une fable d Ésope ou de La Fontaine eft souvent plus confolante & plus ut le que les fages raisonne: mens d'Epictère & de sénèque.

Ce font ces vues de la Morale qui donnent tant de prix & tant de charmes à quelques-uns de nos Ro mans, & qui, fur tout chez les Anglois, ont annobli le genre qu'ils nomment sentimental.

Plufieurs de leurs grands Écrivains en ont fait leur plus beau titre de gloire, & de ce nombre eft le Docteur Olivier Goldtmith, Aureur du Vicaire de Wakefield; qui, après Tom-Jones, eft, je crois, le meilleur de tous les Romans Anglois,

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Le Vicaire de Wakefield a même un ton de fimplicité & de bonhommie fublime qui re fe dément jamais, & qui étoit peut-être plus difficile à foutenir, que l'oppofition des caractères de Tom Jones.

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Qui peut dédaigner, après avoir lu Goldsmith, e qu'il nomme les délices d'un coin de feu de campa gne? Qui n'aime pas à voir le bon Vicaire, fans re? gret pour fa fortune perdue, affis autour de fon foyer, ayant d'un côté fa femme & fon fils Mosès, de l'ausre fes charmantes filles, & tenant far fes genoux fes deux beaux enfans de fix ou fept ans, dont l'un chante une antique ballade, pendant que l'aimable, la fenfible Sophie l'accompagne de la guittare? Qui ne s'attendrit point avec ce père défolé, lorfqu'un vil féducteur lui a ravi la tendre & crédule Olivia ? Pour moi j'avoue que dans l'endroit où ce vertueux vieillard, après avoir en vain cherché la victime égarée, s'en retourne triftement vers fa ruftique ha bitation, entre pour paffer la nuit dans un cabaretde campagne, entend les cris plaintifs d'une malheu-reafe fille que l'hôteffe tient par les cheveux, & veutPouffer hors de fa maifon à onze heures du foir Farce qu'elle n'a pas de quoi payer fon coucher; qu'à travers les fanglots de l'infortunée il reconnoît la voix de fon Olivia; qu'il court à elle, qu'il la prend dans fes bras, l'accable de tendres careffes au-lieu de lai faire des reproches, la confole, la raffure, & lui: dit que malgré la faute qu'elle a commife, il ne peutjamais ceffer d'être un bon père: j'avone, dis-je, qu'alors je me fuis furpris inondé de mes larmes, & baifant vingt fois avec tranfport le Livre qui me faifoit pleurer fi délicieufement.

Mais un tableau plus fublime encore, c'eft celui où le Vicaire, ruiné par les injuftices du perfide Thornill, & malade dans un obscur cachot, où il attend la mort, parvient à convertir les fcélérats avec 1fquels on l'a renfermé. Ils commencent tous par fe moquer de fes leçons ; mais bientôt ils fe foumettent à l'honnêteté & au travail. Jamais l'empire de la vertu ne fe fit peut être auffi bien fentir. Le vieillard. Anglois paroît alors plus grand que Socrate. Socrate,

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