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DISCOURS

PRÉLIMINAIRE DES ÉDITEUrs

DE L'ENCYCLOPEDIE.

L'E

'ENCYCLOPÉDIE que nous préfen tons au Public, eft, comme fon titre l'annonce, l'Ouvrage d'une fociété de Gens de Lettres. Nous croirions pou voir affûrer, fi nous n'étions pas du , nombre, qu'ils font tous avantageufement connus, ou dignes de l'être. Mais fans vouloir prévenir un jugement qu'il n'appartient qu'aux Savans de porter,' il eft au moins de notre devoir d'écarter avant toutes chofes l'objection la plus capable de nuire au fuccès d'une fi grande entreprise. Nous déclarons donc que nous n'avons point eu la témérité de nous charger feuls d'un poids fi fupérieur à nos forces, & que notre foncTome I. A

tion d'Editeurs confifte principalement à mettre en ordre des matériaux dont la partie la plus confidérable nous a été entierement fournie. Nous avions fait expreffément la même déclaration dans le corps du Profpectus*; mais elle auroit peut-être dû fe trouver à la tête. Par cette précaution, nous euffions apparemment répondu d'avance à une foule de gens du monde, & même à quelques Gens de Lettres, qui nous ont demandé comment deux perfonnes pouvoient traiter de toutes les Sciences & de tous les Arts, & qui néanmoins avoient jetté fans doute les yeux fur le Profpectus, puifqu'ils ont bien voulu l'honorer de leurs éloges. Ainfi le feul moyen d'empêcher fans retour leur objection de reparoître, c'eft d'employer, comme nous faifons ici, les premieres lignes de notre Ouvrage à la détruire. Ce début eft donc uniquement destiné à ceux de nos Lecteurs qui ne jugeront pas à propos d'aller plus loin : nous devons aux autres un détail beaucoup plus étendu fur l'exécution de L'ENCYCLOPÉDIE: ils le trouveront dans

* Ce Prospectus a été publié au mois de Novembre 1750

la fuite de ce Difcours; mais ce détail fi important par fa nature & par sa mafa tiere, demande à être précédé de quelques réflexions philofophiques.

L'OUVRAGE que nous commençons (& que nous espérons finir) a deux objets: comme Encyclopédie, il doit expofer autant qu'il eft poffible, l'ordre & l'enchaînement des connoiffances humaines comme Dictionnaire raisonné des Sciences, des Arts & des Métiers. il doit contenir fur chaque Science & fur chaque Art, foit libéral, foit méchanique, les principes généraux qui en font la base, & les détails les plus effentiels, qui en font le corps & la fubftance. Ces deux points de vûe d'Encyclopédie & de Dictionnaire raifonné, formeront donc le plan & la divifion de notre Difcours préliminaire. Nous allons les envifager, les fuivre l'un après l'autre, & rendre compte des moyens par lefquels on a tâché de fatisfaire à ce double objet.

Pour peu qu'on ait réfléchi fur la liaifon que les découvertes ont entre elles, il est facile de s'appercevoir que les Sciences & les Arts fe prêtent mu

tuellement des fecours, & qu'il y a par conféquent une chaîne qui les unit. Mais s'il eft fouvent difficile de réduire à un petit nombre de regles ou de notions générales, chaque Science ou chaque Art en particulier, il ne l'eft pas moins de renfermer en un systême qui foit un, les branches infiniment variées de la fcience humaine.

Le premier pas que nous ayons à faire dans cette recherche, eft d'examiner, qu'on nous permette ce terme, la généalogie & la filiation de nos connoiffances, les eaufes qui ont dû les faire naître, & les caracteres qui les diftinguent; en un mot, de remonter jufqu'à l'origine & à la génération de nos idées. Indépendamment des fecours que nous tirerons de cet examen pour l'énumération encyclopédique des fciences & des arts, il ne fauroit être déplacé à la tête d'un Dictionnaire raifonné des connoiffances humaines.

On peut divifer toutes nos connoiffances en directes & en réfléchies. Les directes font celles que nous recevons immédiatement fans aucune opération de notre volonté ; qui trouvant ouvertes, fi on peut parler ainfi, toutes les

portes de notre ame, y entrent fans réfiftance & fans effort. Les connoiffances réfléchies font celles que l'efprit acquiert en opérant fur les directes, en les uniffant & en les combinant.

par

Toutes nos connoiffances directes fe réduisent à celles que nous recevons les fens; d'où il s'enfuit que c'est à nos fenfations que nous devons toutes nos idées. Ce principe des premiers Philofophes a été long-tems regardé comme un axiome par les Scholaftiques; pour qu'ils lui fiffent cet honneur, il fuffifoit qu'il fût ancien, & ils auroient défendu avec la même chaleur les formes fubftantielles ou les qualités occultes. Auffi cette vérité fut-elle traitée à la renaiffance de la Philofophie, comme les opinions abfurdes dont on auroit dû la diftinguer; on la profcrivit avec elles, parce que rien n'eft fi dangereux pour le vrai, & ne l'expose tant à être méconnu , que l'alliage ou le voifinage de l'erreur. Le fyftème des idées innées, féduifant à plufieurs égards, & plus frappant peutêtre parce qu'il étoit moins connu, a fuccédé à l'axiome des Scholastiques; & après avoir long-tems régné, il con

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