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mule prescrite par Clément XI ils signaient la ruine de la nouvelle Église: ils ne reculèrent pas devant ce sacrifice. Ils furent héroïques d'obéissance après avoir épuisé tous les palliatifs. Mais, à une semblable distance, le Saint-Siége désirait se rendre un compte exact de la position: Ambroise de Mezzabarba fut nommé Légat dans le Céleste-Empire. Ce titre et cette mission devaient inquiéter Kang-Hi. Personne n'osait ouvrir à l'envoyé pontifical la route de Péking; le Père Lauréati, visiteur de la Chine, prend sur lui d'affronter la colère impériale. A force d'adresse, il obtint des mandarins de Canton de laisser passer Mezzabarba. Il le recommande au Père Joseph Pereyra, et le Nonce arrive dans la capitale. A cette nouvelle, Kang-Hi fait jeter dans . les fers Lauréati et les mandarins qu'il a séduits. Mais le Légat demandait son audience: il fallait la lui accorder: ce fut Joseph Pereyra qui le présenta à l'Empereur. Le 30 mars 1721 Lauréati écrivait au Pape, et ce document cst d'un haut intérêt dans la question. Le Jésuite s'exprime ainsi : « J'ose paraître une seconde fois prosterné aux pieds de Votre Sainteté pour lui rendre compte de l'accomplissement de mes devoirs et de l'état actuel des Missions dans ce pays, compte dont Votre Sainteté est peut-être déjà instruite par le Père Gianpriamo, que l'Empereur a envoyé à Votre Sainteté par la voie de Russie.

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Après beaucoup de sollicitations de ma part, les mandarius permirent à M" le Légat apostolique de partir de Canton et d'avancer vers Peking sans attendre le consentement de l'Empereur et n'ayant été interrogé que fort superficiellement sur le but de son voyage. C'est par un effet de la divine Providence que les choses se sont passées ainsi; car, si les questions et les réponses

qui ont été faites à Peking eussent été faites à Canton, tout le monde convient que Mr le Légat n'aurait jamais obtenu la permission d'entrer à Peking, et que les Missionnaires auraient reçu ordre de se retirer.

» Votre Légat, ayant été retenu auprès de Peking, n'oublia rien pour obtenir la permission de faire mettre à exécution les ordonnances apostoliques. Il fit les prières les plus instantes, il gémit beaucoup, il eut aus: i beaucoup à souffrir, et il ne put rien obtenir, pas même par sa présence. Ses prières furent regardées comme un crime, ses larmes comme une injure et un mépris pour les lois et l'Empereur. S'il eût persévéré encore un jour à faire les mêmes demandes, ce jour aurait été le dernier pour la Mission. Nos Pères de Peking prièrent alors M. l'abbé Ripa de se joindre à eux pour aller tous ensemble chez l'Empereur, et le prier de concert de pe:mettre que l'ordonnance de Votre Sainteté fût exécutée. M. l'abbé Ripa répondit, comme aurait répondu tout homme qui aurait connu le génie de cette cour, que cette démarche serait déplacée et ne convenait en aucune façon, parce qu'il ne la croyait propre qu'à irriter l'Empereur de plus en plus. Outre cela, Sa Majesté avait absolument défendu à nos Pères de se mêler de cette affaire, prétendant qu'elle ne pouvait être terminée que par elle-même et Votre Sainteté.

Ms votre Légat, voyant enfin l'état déplorable des affaires, qu'une ruine entière et très-prochaine menaçait, se servit d'un expédient très-prudent: il commença par exposer devant l'Empereur les articles que Votre Sainteté avait la bonté de permettre, en l'assurant que tout ce qu'il pouvait faire de plus, c'était de retourner ve:s Votre Sainteté pour lui rendre compte de ce que Sa Majesté voudrait lui dire touchant la véritable signi–

fication des rits et ce qu'il avait vu lui-même de la ferme résolution où était Sa Majesté de les soutenir, promettant de revenir ensuite en Chine avec les dernières réponses de Votre Sainteté.

» Ce moyen, employé à propos par M le Légat, fit changer tout à coup la face des affaires, et on rendit alors tant d'honneurs à Votre Sainteté et à M le Légat qu'on en fut étonné à la cour et dans l'empire. La modestie ne me permet pas de parler des mouvements que les Jésuites se donnèrent pour procurer ces grands hon

neurs.

» M2 le Légat et les Missionnaires de sa suite se sont convaincus qu'il n'était pas vrai, comme ils l'avaient cru, que l'Empereur ne prenait aucun intérêt aux rits du pays. Ils l'ont entendu parler sur ce sujet de la manière la plus claire et la plus précise, d'un ton et dans des termes si forts et si absolus qu'il paraissait être dans une espèce de frémissement de tout le corps, disposition, pour ce prince, absolument opposée à cette gravité qu'on voit toujours en lui, et qui lui est naturelle. Ils ont connu qu'il n'était point vrai que les Chrétiens pussent vivre tranquillement dans la Chine sans se conformer aux rits du pays. Ils savent que cet obstacle arrête tout. Il y a actuellement neuf personnes du sang royal et plusieurs centaines d'hommes dans Peking qui désirent ardemment de recevoir le baptême, et un bien plus grand nombre encore qui voudraient s'approcher des Sacrements de Pénitence et d'Eucharistie; et ils n'osent le faire ni les uns ni les autres, parce qu'il leur est impossible, disent-ils, de mettre en pratique l'ordonnance de Votre Sainteté. Ils ont connu que tous les Pères de la Société ne peuvent rien dans cette affaire, parce que l'empire peut se passer d'eux, mais ne peut pas

également se passer de ses lois fondamentales. Ils attestent que tant s'en faut que l'Empereur soit athée comme on a osé l'assurer par la plus imprudente des calomnies; ils l'ont entendu raisonner d'une manière très-juste et très-exacte sur l'immortalité de l'âme, stir l'existence des Anges et sur l'essence et l'unité du véritable Dieu. Ils avoueront qu'ils lui ont entendu dire qu'il adorait avec le plus profond respect le même Diëti qu'on adore en Europe, et que c'était de ce même Dieu qu'il avait reçu le trône sur lequel il était assis. Ils ont connu ses pieuses dispositions à l'égard du bois sacré de la Croix, qu'il a demandé à M le Légat; et ils savent que, voulant rendre à ce précieux trésor, qu'il a obtenu, le respect qui lui est dû, il désire de tout son cœur d'être instruit du culte précis dont il faut honorer cet instrument de notre salut.

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» Qu'il me soit cependant permis de foriner ici, avec toute la modestie possible, quelques plaintes contre cet excellent Prélat. A quoi ont abouti toutes les connaissances qu'il avait acquises, et dont je viens de parler, puisqu'il a refusé d'appliquer aux maux qu'il connaissait le souverain remède qui était absolument nécessaire ? İl a promis d'aller à Rome, d'y rapporter fidèlement ce qu'il avait vu et entendu; máis, en temporisant ainsi, les affaires dépérissent. Il demeure néanmoins, mais l'Empereur fait de nouvelles défenses, plus préssantes que les premières, d'exercer les fonctions apostoliques; les oppositions de la part des mandarins sont toujours les mêmes; la haine des Gentils contre les Missionnaires se fortifie de plus en plus, et les difficultés de la part des Chrétiens ne font que se multiplier. Plusieurs d'entre eux retournent en arrière; il ne s'en fait que très-peu de nouveaux, et on peut dire que la Mission est entre ies

bras de la mort, abandonnée aux prises avec elle. Mr le Légat craint, il dit qu'il a les mains liées; il assure qu'il mettrait la Mission en état de remplir ses fonctions s'il croyait pouvoir le faire. Ce n'est donc que, de Votre Sainteté, très-Saint-Père, que nous devons attendre notre salut; car ce serait inutilement qu'on l'attendrait de tout autre que de ceux qui tiennent la place du Sauveur

même.

Me le Légat priait l'Empereur d'avoir pitié des Missionnaires. Et pourquoi êtes-vous sans compassion vous-même pour mes sujets chinois? lui répondit l'Empereur. Cette réponse de Sa Majesté fit couler les larmes de bien des gens; mais ces larmes furent inutiles et sans fruit. Mais celles que Votre Sainteté répandra, qui seront l'expression de votre tendresse et de votre compassion, auront plus d'effet. Semblables à celles que Jésus-Christ répandit pour ressusciter le Lazare, elles produiront la vie et le salut. »

La mission pacificatrice de Mezzabarba, les concessions que, sur les lieux, il avait cru devoir faire en dehors du décret pontifical, concessions que, par la bulle Ex quo singulari, Benoît XIV annula en 1742, tout tendait à raviver les querelles. Le Légat autorisait ce que le Pape avait prohibé; on se retrancha derrière ce rempart inespéré; les Missionnaires reprirent les hostilités et leur apostolat. Le 20 décembre 1722, Kang-Hi mourut; le premier soin de Yong-Tching, son héritier, fut de proscrire de tout l'empire les lois et le culte de l'Église catholique. Les Pères Parrenin, Gaubil, Maillac, Bouvet, Jartoux, Régis, du Tartre, Henderer, Domange, d'Entrecolles, Jacques Suarez, Koegler, Magailhens, Slavischek, de Rezende, Contancin, Chalier, Hervieu, Prémare, Staidlin et Porquet, qui, comme les autres

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