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Sauvages accordaient aux Missionnaires était un éternel sujet d'anxiété pour les directeurs de la Compagnie des Indes occidentales; on force les Jésuites à déserter leurs résidences du Mississipi. Quelques années s'écoulèrent ainsi; mais l'absence des Robes Noires causait de vifs regrets aux naturels. En 1725, le Père de Vitré rentre à la Nouvelle-Orléans avec une colonie de Jésuites, dirigée par Beaubois, de Ville et Le Petit. Leur sang devait fertiliser cette terre; le 28 novembre 1729, le Père du Poisson, qui évangélise les Akansas, pénètre chez les Natchez, sa tête tombe sous la hache d'un des chefs de cette tribu. Le 11 décembre de la même année, le Père Souel, qui a reproché à d'autres leurs crimes et leurs excès, périt par leurs mains dans un jour de colère.

Les Jésuites accompagnaient les Catéchumènes dans leurs guerres; ils se constituaient prisonniers pour escorter les vaincus dans la captivité; ils partageaient leurs bûchers afin de les aider à bien mourir. En 1736, le Père Sénat fut brûlé par les Chicachas, parce qu'il n'avait pas voulu cesser d'exhorter à la mort les victimes que le feu allait dévorer. La Louisiane arrosée du sang des Missionnaires ne tarda pas à devenir chrétienne. Les Jésuites étendirent leurs conquêtes pacifiques sur l'Ohio; peu à peu ils assouplirent au joug de la famille et des lois ces peuplades errantes. Ils les avaient trouvées sauvages, ils en firent des hommes.

De terribles, de glorieuses révolutions ont achevé leur œuvre. L'Angleterre d'un côté, les États-Unis d'Amérique de l'autre, ont changé la face du pays. Il n'y avait plus de Jésuites pour lutter à armes égales contre les diverses sectes qui envahissaient le Canada; le Catholicisme s'éteignit dans les coeurs. La guerre et la liberté,

l'absence des Missionnaires et l'action des Presbytériens, des Quakers et des Anabaptistes détruisirent la plupart de ces chrétientés; mais au fond des tribus dont le contact hérétique ne pouvait altérer la foi, le souvenir des Robes Noires survécut. Les voyageurs de tous les cultes et de tous les pays constatent cette reconnaissance; les actes officiels eux-mêmes en rendent témoignage, et les Ottawas, que les Jésuites émancipèrent au dix-septième siècle, viennent, cent cinquante années après, en demander au président de l'Union Américaine. En 1823, ils lui écrivent, par l'intermédiaire de leur chef Pinesinidjigo, l'Oiseau Noir1:

« Mon Père, c'est à présent que je désire que tu m'écoutes, moi et tous les enfants de cette contrée éloignée; ils tendent les bras pour te serrer la main; nous, les chefs, les pères de famille et autres Ottawas, résidant à l'Arbre Crochu, te prions instamment et te sup

1 Dans la même année, d'autres tribus précisaient encore mieux leur demande, et le Président des États-Unis recevait l'adresse suivante :

« Nous soussignés, capitaine, chefs de famille et autres de la tribu des Ottawas, demeurant à l'Arbre-Courbé, sur la rive orientale du lac Michigan, prenons cette voie pour communiquer à notre père, le Président des États-Unis, nos demandes et nos besoins. Nous remercions notre père et le congrès de tous les efforts qu'ils ont faits pour nous amener à la civilisation et à la connaissance de Jésus, rédempteur des hommes rouges et blancs. Nous confiant dans votre bouté paternelle, nous réclamons la liberté de conscience, et vous prions de nous accorder un maître, ou ministre de l'Évangile, qui appartienne à la même Société dont étaient les membres de la Compagnie catholique de saint Ignace, établie autrefois à Michillimackinac, à l'ArbreCourbé, par le Père Marquette et d'autres Missionnaires de l'Ordre des Jésuites. Ils résidèrent au milieu de nous pendant de longues années. Ils cultivèrent un champ sur notre territoire, pour nous apprendre les principes de l'agriculture et du Christianisme.

"

Depuis ce temps nous avons toujours désiré de semblables ministres; si vous daignez nous les accorder, nous les inviterons à venir s'établir sur le même terrain anciennement occupé par le Père Du Jauney, sur les rives du lac Michigan, proche de notre village, à l'Arbre-Courbé.

» Si vous accueillez cette humble demande de vos fils fidèles, ils en seront éternellement reconnaissants, et prieront le Grand-Esprit de répandre ses bénédictions sur les blancs.

» En foi de ceci, nous avons apposé nos signatures, ce 12 août 1823.

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Signé : ÉPERVIER, POISSON, CHENILLE, Grue, Aigle,

POISSON-VOLANT, OURS, CERF. »

plions, toi, notre respectable Père, de nous procurer une Robe Noire comme ceux qui instruisent les Indiens dans le voisinage de Montréal.

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Notre Père, sois charitable envers tes enfants; écoute-les. Nous désirons être instruits dans les mêmes principes de religion que professaient nos ancêtres quand la Mission de saint Ignace existait.

» Nous nous adressons à toi, le premier et principal chef des États-Unis; nous te prions de nous aider à élever une maison de prière.

» Nous donnerons de la terre à cultiver à ce ministre du Grand-Esprit que tu enverras pour nous instruire nous et nos enfants. Nous nous efforcerons de lui plaire et de suivre ses bons avis. Nous nous trouverons heu-reux, si tu veux bien nous envoyer un homme de Dieu, de la Religion catholique, de la même sorte que ceux qui ont instruit nos pères. Tel est le désir de tes enfants dévoués. Ils ont la confiance que toi, qui es leur Père, auras la bonté de les écouter. Voilà tout ce que tes enfants te demandent à présent.

>> Tous tes enfants, Père, te présentent la main et serrent la tienne avec toute l'affection de leur coeur.

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Signé MAGATI, PINESINIDJIGO. »

Une nouvelle forme de gouvernement a produit de nouvelles mœurs; la population primitive du Canada, dont une partie a refusé d'abandonner ses savanes, vit au fond des forêts. Là, s'arrangeant un bonheur à sa manière, elle invoque le concours du président des États-Unis, << pour être instruite dans les mêmes principes de religion que professaient ses ancêtres quand la Mission de saint Ignace existait. » Et ce souvenir des temps passés, qui frappe au coeur les peuples dont la

virginité n'a pas été souillée par les révolutions, ce n'est pas seulement chez les tribus canadiennes qu'il se réveille. Les Catholiques de l'Amérique méridionale font entendre le même vou; de la Louisiane à la NouvelleGrenade, il retentit. Dans un même sentiment de gratitude et d'espérance, tous demandent à l'Institut religieux qui civilisa leurs pères de venir apprendre à leurs enfants les devoirs du chrétien et du citoyen. Les monarques de l'Europe avaient, dans un jour de faiblesse que tant d'autres, plus coupables, suivirent, consommé la ruine de la Société de Jésus; ils brisaient ainsi la chaîne qui attachait le Nouveau-Monde à l'ancien, dont il était tributaire.

Le Nouveau-Monde, libre et républicain, n'accepte point les préjugés ou les haines de convention qui fermentent contre la Société de saint Ignace de Loyola. Il sait les services qu'elle a rendus à cet univers créé par ses travaux; il appelle les Jésuites pour qu'ils continuent à en rendre de semblables dans un autre ordre d'idées. Tous ces peuples, tirés de la barbarie par les Missionnaires, ont des intérêts différents, des passions et des vues opposées; mais, du haut des Montagnes Rocheuses à la mer des Caraïbes, de l'Inde au Paraguay, ils se confondent dans un même désir. Ils remontent tous le courant des révolutions, afin d'offrir à la jeunesse comme à l'âge mûr les guides spirituels dont leurs ancêtres éprouvèrent la foi, et dont eux veulent mettre à profit le zèle et la science.

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CHAPITRE III.

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Situation des esprits en Europe. · La Compagnie de Jésus en face des adversaires de l'ordre social. Tous ont pour premier but la destruction des Jésuites. - - Le marquis de Pombal à Lisbonne. - Son caractère. Il est protégé par les Jésuites. Il domine le faible Joseph I". Ses mesures et son arbitraire. Il règne sur le roi en lui faisant peur de complots chimériques. Pombal comprend que, pour rester seul maître de la position, il faut éloigner les Jésuites. — 11 cherche à détacher le roi des Pères de l'Institut. -Exil des Pères Ballister et Fonseca. Causes de cet exil. - Monopole administratif. Tremblement de terre de Lisbonne. Courage de Pombal et des Jésuites. Charité du Père Malagrida. Le roi revient de ses préventions contre la Société. Pombal sans intelligence avec la secte encyclopédique. Différence de leurs plans. Pombal rêve d'établir une espèce de religion anglicane en Portugal. — Il attaque la Compagnie de Jésus dans ses Missions. Traité d'échange entre l'Espagne et le Portugal. Les sept Réductions de l'Uruguay et la colonie del Santo - Sacramento. Motifs de cet échange. Les mines d'or des Jésuites. Les deux cours chargent les Pères de préparer les néophytes à l'émigration. - Les Pères Barreda et Neydorffert. Jésuites, au risque de perdre le Christianisme et leur popularité, obéissent à l'injonction. On les accuse de soulever les Indiens. Concessions qui deviennent funestes. - Leur obéissance les compromet dans les deux camps. Les néophytes se révoltent. - Proscription des Jésuites au Maragnon. Les Indiens sont vaincus parce qu'il n'y a pas eu accord entre eux. — Expulsion des Jésuites. On se met à la recherche des mines d'or. Il est démontré qu'il n'y en a jamais eu. Pombal pamphlétaire contre les Jésuites. Les rois d'Espagne Ferdinand VI et Charles III font brûler son ouvrage. Don Zevalos et Guttierez de la Huerta. Les Jésuites disculpés par les autorités espagnoles. Leur éloge des Réductions

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du Paraguay. La timidité des Jésuites enhardit Pombal. noît XIV un bref de réforme. Benoît XIV et le cardinal Passionei. Norbert protégé par Passionei. Le commerce des Jésuites au Paraguay et dans les Missions.- Ce que c'était que ce négoce. — Édit de Philippe V qui l'approuve. Pombal s'imagine que les Jésuites ont dévié de leur Institut. — Il prétend les y ramener. - Benoît XIV mourant se laisse forcer la main, et signe le bref de visite et de réforme. - Le Cardinal Saldanha et Pombal. Les Jésuites, confesseurs du Roi et des Infants, enlevés de la cour. - Le Provincial Henriquez et le Général de l'Ordre enjoignent de garder le silence et d'obéir.· Mort de Benoît XIV. - Saldanha exerce des pouvoirs périmés. - Il condamne les Jésuites conime convaincus de commerce illicite. Élection de Clément XIII. Son caractère. Le Général des Jésuites, Laurent Ricci, se plaint du cardinal Saldanha et des mesures prises sans contradicteurs. Exil des Pères Fonseca, Ferreira, Malagrida et Torrez. - Le Père Jacques Camera. - Attentat à la vie de Joseph Ier. Le marquis de Tavora accusé. - Après trois mois de silence, on l'arrête avec sa famille. Motifs secrets de la colère de Pombal contre les Tavora. Le tribunal de l'Inconfidence présidé par Pombal. Les Tavora à la question. - Le - Il accuse ses parents et les Supplices de ces familles. Arrestation de huit Jésuites. - Malagrida, Mattos et Jean-Alexandre condamnés à mort. — Les autres Manifeste de Joseph Ier aux évêques portugais. — Deux On enlève les Missionnaires

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