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Académicien, qui foutient que l'enfant a bien répondu, & qui, pour le prouver, fe met à interpréter l'oracle. » Pour faire » connoître au Lecteur, dit M. Goldoni, jufqu'où peut aller la hardieffe & l'imagination d'un efprit italien, je vais rendre "compte de la queftion, de la réponse » & de l'interprétation dont je fus témoin. » Le demandeur, qui étoit un étranger, » comme moi, pria la Sibylle de vouloir » bien lui dire, pourquoi les femmes pleurent plus fouvent & plus facilement que les hommes. La Sibylle, pour toute réponse, » prononce le mot paille, & l'interprète adreffant la parole à l'auteur de la queftion, foutient que l'oracle ne pouvoit » être ni plus décifif, ni plus fatisfaisant. » Ce favant Académicien, qui étoit un » Abbé d'environ 40 ans, gros & gras

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ayant une voix fonore & agréable, parla. » pendant trois quarts-d'heure. Il fit l'analyfe » des plantes légères; il prouva que la paille furpaffoit les autres en fragilité; il paffa de la paille à la femme; il par» courut avec autant de vîteffe que de » clarté, une espèce d'effai anatomique du » corps humain. Il détailla la fource des. » larmes dans les deux fexes. Il prouva la » délicateffe des fibres dans l'un, la réfif»tance dans l'autre. Il finit par flatter les » dames qui étoient affiftantes, en donnant les prérogatives de la fenfibilité à la foibleffe; & il fe garda bien de parler des pleurs de commande.

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J'avoue, ajoute M. Goldoni, que cet homme me furprit. On ne peut pas employer plus de fcience, plus d'érudition, plus de précifion, dans une matière qui n'en étoit pas fufceptible. Ce font » des tours de force, fi vous voulez, c'est » dans le goût à peu près du chef-d'œuvre » d'un inconnu, mais il n'eft pas moins » vrai que ces talens rares font eftimables, » &c. "..

On trouve auffi dans ces Mémoires quelques Anecdotes gaies, & plaifamment racontées. De ce nombre eft une vifite que M. Goldoni.eut l'honneur de faire au Saint Père, à qui il fut préfenté par faveur dans fon cabinet de retraite..

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» Ce Pontife. Vénitien, que j'avois eu "l'honneur de connoître dans fa ville épifcopale de Padoue, & dont ma Muse » avoit chanté l'exaltation, me fit l'accueil » le plus gracieux, il m'entretint, pendant " trois quarts-d'heure, de fes neveux & de fes nièces, charmé des nouvelles que j'étois dans le cas de lui en donner.

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"Sa Sainteté toucha à la fonnette qui. » étoit fur la table; c'étoit pour moi le fignal de partir: je faifois, enm'en allant, des révérences, des remercimens.; le Saint »Père ne paroilloit pas fatisfair; il.remuoit fes pieds, fes bras, il touffoit, il me regardoit, & ne difoit rien. Quelle étour» derie de ma part! Enchanté, pénétré de l'honneur que je veneis de recevoir

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j'avois oublié de baifer les pieds du fuc»ceffeur de Saint Pierre : je reviens enfin » de ma diftraction, je me profterne; Clé"ment XIII me comble de bénédictions, » & je pars mortifié de ma bêtife & charmé » de fon indulgence «.»

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De ces trois volumes, le plus intéreffans pour nous, c'eft le dernier. C'eft là qu'on voit M. Goldoni arriver à Paris, où il avoit été appelé par les Comédiens Italiens, qui voyant leurs Pièces abandonnées, tandis qu'on couroit en foule aux Pièces à ariettes, fongeoient à enrichir leur répertoire de quelques nouveaux Ouvrages. Deux ans après, il fut choifi pour enfeigner l'italien à Mefdames; & enfin fon état, & des bienfaits de la Cour, l'ont fixé en France, où il coule depuis, dans un glorieux repos, la quatre-vingtième année de fon âge.

Ces Mémoires offrent l'analyfe des cent cinquante Comédies que M. Goldoni a publiées, & par la voie du théatre, & par celle de l'impreflion. Une telle facilité eft extrêmement rare; elle eft plus étonnante encore, lorfqu'on fonge que l'Auteur s'eft occupé avec fuccès, comme nous le verrons bientôt, du grand projet de réformer le théatre de fon pays. En effet, le talent qui veut s'ouvrir une nouvelle carrière, a bien. moins de temps pour produire, que celui qui ne veut fuivre qu'un fentier battus. Le génie réformateur a fans ceffe à difcuter,

à comparer, à multiplier les effais; & le temps qu'il emploie à méditer, doit être pris fur le nombre de fes productions.

La Comédie, en Italie, avec des conceptions vraiment dramatiques, employoit des formes, des moyens peu naturels ; c'eft ce qui rendoit févère, injufte même à fon égard, le connoiffeur qui cherche l'illufion au Théatre, & qui, fans la vérité, n'admet aucune illufion.

Ces moyens peu naturels font notamment ce qu'on appelle les quatre masques de la Comédie Italienne. On ne fera pas fâché d'entendre M. Goldoni lui - même, fur l'origine, l'emploi & les effets de ces quatre mafques.

» La Comédie, qui a été de tout temps »le fpectacle favori des Nations policées, avoit fubi le fort des Arts & des Sciences, » & avoit été engloutie dans les ruines de l'Empire, & dans la décadence des ..>> Lettres.

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» Le germe de la Comédie n'étoit pas cependant tout-à-fait éteint dans le fein fécond des Italiens. Les premiers qui travaillèrent pour le faire revivre, ne trouvant pas, dans un fiècle d'ignorance, des Ecrivains habiles, eurent la hardieffe de compofer des plans, de les partager en actes & en fcènes, & de débiter, à l'im-promptu, les propos, les penfées & » les plaifanteries qu'ils avoient concertées

→entre eux.

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» Ceux qui favoient lire ( & ce n'étoit pas les grands ni les riches), trouvèrent » que dans les Comédies de Plaute & de » Térence, il y avoit toujours des pères dupés, des fils débauchés, des filles amoureufes, des valets fripons, des fervantes »corrompues; & parcourant les différens » cantons de l'Italie, prirent les pères à » Venife & à Bologne, les valets à Ber"game, & les amoureux, les amoureufes " & les foubrettes dans les Etats de Rome » & de la Toscane.

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» Il ne faut pas s'attendre à des preuves » écrites, puifqu'il s'agit d'un temps où "l'on n'écrivoit point. Mais voici comme je prouve mon affertion : le Pantalon a » toujours été Vénitien, le Docteur a » toujours été Bolonois, le Brighella & l'Arlequin ont toujours été Bergamafques; "c'eft donc dans ces endroits que les Hif» trions prirent les perfonnages comiques » que l'on appelle les quatre mafques de la » Comédie Italienne.

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"Ce que je viens de dire n'eft pas tout"à-fait de mon imagination : j'ai un ma→ » nufcrit du quinzième fiècle, très - bien confervé, & relié en parchemin, con» tenant cent vingt fujets ou canevas de » Pièces Italiennes, que l'on appelle Co»médies de l'Art, & dont la base fonda» mentale du comique est toujours Pan» talon, Négociant de Venife; le Docteur, Jurifconfulte de Bologne; Brighella &

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