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M. Bouchaud, toutes les questions auxquelles ce monument peut donner lieu.

Les Romains eurent-ils raifon d'adopter des Loix étrangères ?

Oui, ils durent autant s'applaudir d'avoir recueilli les Loix de la Grèce pour en former celle des Douze Tables, que d'avoir adopté dans la fuite les Loix Maritimes des Rhodiens, & en général d'avoir intoduit à Rome. tout ce qu'ils trouvèrent fagement établi chez les différens Peuples de la terre. Toute Loi ne convient pas fans doute à tout climat, à toute efpèce de Gouvernement, & on peut dire dans le fens moral comme dans le fens phyfique :

Non omnis fert omnia tellus.

Mais il fera toujours très-fage d'emprunter à nos voisins, à nos rivaux, à nos ennemis même, tout ce qui nous manque de bon & d'utile, & de perfectionner la Legislation Nationale par l'étude des Légiflations Etrangères.

Quelles furent les villes de la Grèce d'où les Romains empruntèrent la Loi des douze Tables?

Ce fut principalement Athènes, & des cinq fameux Légiflateurs de la Grèce, Lycurgue, Zaleucus, Charondas, Dracon, & Solon; ce dernier eft celui qui a le plus fourni d'idées pour la formation de la Loi des Douze Tables.

Pourroit-on faire remonter l'origine de

la Loi des Douze Tables jufqu'à celle de Mofe par les Loix Attiques?

On apperçoit fans doute quelque conformité entre les Loix Judaïques & les Loix Romaines; mais cette conformité n'eft, felon M. Bouchaud, ni affez générale, ni affez frappante, pour qu'on foit autorifé à donner à la Loi des Douze Tables cette origine facrée. Il ne nous refte plus de la Loi des Douze Tables qu'un centon, compofé de divers lambeaux, dont on peut dire, felon M. Bouchaud, ce que Dion Chryfoftome difoit de la Grèce, que rien n'atteftoit mieux fa grandeur paffée, que fes ruines mêmes: il n'eft pas trèsfacile de diftinguer les vrais fragmens de la Loi des Douze Tables, d'avec ceux qui lui font mal à propos attribués. Parmi les Savans, plufieurs s'y font trompés, les uns ont cru que toutes les Loix rapportées par Cicéron dans fon Traité de Legibus, furent empruntées de la Loi des Douze Tables; d'autres ont cru reconnoître dans les formulés inventées par les Jurifconfultes, des fragmens de cette même Loi; d'autres ont regardé comme autant de chefs de la Loi des Douze Tables, tous les articles dont il eft dit qu'ils furent ordonnés par cette loi, quoique ces articles foient feulement éinanés des premiers qui interprétèrent cette Loi, L'équivoque du mot Loi, par lequel plufieurs entendoient la Loi des Douze Tables comme étant la Loi par excellence, a encore induit en erreur une multitude de

Savans enfin la licence des conjectures tirées de quelques reffemblances de quelque analogie foit dans le fond, foit dans la forme de certaines difpofitions légales anciennes, a encore multiplié les erreurs à ce fujet; M. Bouchaud emploie une fection entière à démêler ces diverfes fources d'erreur. Ce morceau fait honneur à la critique autant qu'à fon érudition.

Les changemens confidérables qu'éprouva de bonne heure la Langue latine, font caufe que les anciens Auteurs, en rappor tant les différens chefs de la Loi des Douze Tables, n'ont pas pris à tâche de conferver les propres termes de la Loi, & qu'ils ne s'accordent pas même entre eux dans la manière d'énoncer chaque Loi: M. Bouchaud examine s'il eft poffible & s'il eft de quelque utilité de reftituer l'ancien langage de la Loi des Douze Tables; il fe décide pour l'affirmative, d'après des raifons & des exemples.

Son principal objet étant de juftifier le Droit Romain & la Loi des Douze Tables, il fait voir, toujours en joignant les raifonnemens & les exemples, que les Loix des Décemvirs, malgré Ferrème rigueur de quelques-unes de ces Loix, furent pour la plupart recommandables par leur fagelle & leur équité.

De ces Loix, la plus difficile à juftifier eft celle qui concerne les Débiteurs infolvables, fur-tout s'il faut prendre à la lettre

les termes de cette Loi, comme l'ont fait divers Auteurs, nommément Aulu-Gelle, qui nous a confervé ces propres termes. Le Créancier avoit droit d'emmener & de charger de fer le Débiteur infolvable. Le Débiteur ainfi emmené par fon Créancier, pouvoit prendre avec lui des arrangemens; s'il n'en prenoit pas, le Créancier le tenoit en charte privée pendant foixante jours. Dans cet intervalle on amenoit le Débiteur dans la place publique, trois différens jours de marché, le Crieur annonçoit à haute voix la fomme que cet homme devoit, pour voir fi quelque parent, quelque ami, ou feulement quelque fpectateur touché de pitié, confentoit à payer pour lui. S'il ne fe préfentoit perfonne, & fi le Débiteur ne parvenoit point à faire un accommodement avec for Créancier, celui-ci pouvoit ou le faire mourir, de capite addicti panas fumito, ou le vendre pour être payé fur le prix. S'il y avoit plufieurs Créanciers, alors fiebat fectio: mais comment cette fection fe faifoit-elle ? coupoit-on en effet ce malheureux en morceaux, pour que ces morceaux fuffent diftribués aux Créanciers? Tertullien, Quintilien, Aulu-Gelle, & plufieurs Modernes, l'ont cru ainfi, & cette opinion a été long-temps l'opinion reçue. Aulu-Gelle nie feulement qu'il y ait jamais eu d'exemple qu'un Débiteur ait fubi un fi cruel fupplice. Il croit que la Loi n'étoit que comminatoire, & qu'on n'avoit voulu

qu'infpirer de la terreur. D'autres Commentateurs obfervent que fectio fe prend quelquefois pour auctio, vente à l'encan; qu'on appeloit fectores ceux qui achetoient les biens mis à l'encan. Dans cette phrafe : de capite addicti panas fumito; ils entendent par caput le capital, & par panas les intérêts qui font la peine de n'avoir pas payé ce capital; Horace emploie caput dans ce fens:

Fufidius vappa famam timet ac nebulonis,
Dives agris, dives pofitis in fænore nummis.
Quinas hic capiti mercedes exfcat, atque
Quantò perditior quisque eft, tantò acriùs urget.

Ainfi, felon cux, le Débiteur qui n'a pas
payé le capital au terme marqué, eft con-
damné à payer des intérêts; s'il ne paye
ni intéret ni principal, il eft vendu à l'encan,
& le prix eft diftribue entre les Créanciers.
L'Auteur adopte cette explication comme
plus raifonnable, quoiqu'il y trouve encore
quelques difficultés : mais, dit-il, tombe-
til fous le fens qu'on ait permis à des
Créanciers de couper par morceaux le corps
de leurs Débiteurs qui pouvoit être allez
infenfé pour
pour ne pas préférer de tirer du
fervice de fon Débi eur, ou de le vendre «<?
qui auroit jamais voulu commetre une
atrocité pareille, dont il ne lui feroit revenu
aucun profit?

L'Auteur a évidemment raifon, & c'eft le cas de dire avec Horace :

B

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