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& développant les refforts du cœur hu main, joignit à une élégance & une vérité continues quelques traits de fuBlime. DESPRÉAUX dans fon Art poétique fe rendit l'égal d'Horace en l'imitant. MOLIERE, par la peinture fine des ridicules & des mœurs de fon tems, laiffa bien loin derriere lui la Comédieancienne. LA FONTAINE fit presque oublier Efope & Phedre, & Bos SUET alla fe placer à côté de Démofthene.

Les Beaux-Arts font tellement unis avec les Belles-Lettres, que le même goût qui cultive les unes, porte auffi à perfectionner les autres. Dans le même tems que notre littérature s'enrichiffoit: par tant de beaux Ouvrages, POUSSIN faifoit fes tableaux,& PUGET fes ftatues; LE SUEUR peignoit le cloître des Chartreux, & LE BRUN les batailles d'Alexandre; enfin QUINAULT, Créa teur d'un nouveau genre, s'affuroit Kimmortalité par fes Poemes Lyriques, & LULLI donnoit à notre Mufique naiffante fes premiers traits.

Il faut avouer pourtant que la renaiffance de la Peinture & de la Sculpture avoit été beaucoup plus rapide que cellede la Poéfié & de la Mufique; & la.

raifon n'en est pas difficile à apperce→ voir. Dès qu'on commença à étudier les Ouvrages des Anciens en tout genre, les chefs-d'œuvre antiques qui avoient échappé en affez grand nombre à la fuperftition & à la barbarie, frapperent bientôt les yeux des Artistes éclai-rés; on ne pouvoit imiter les Praxi-tele & les Phidias, qu'en faifant exac-tement comme eux; & le talent n'avoit befoin que de bien voir: auffi RAPHAEL & MICHEL ANGE ne furent pas long-tems fans porter leur art à un point deperfection, qu'on n'a point encore paffé depuis. En général, l'objet de la Pein-ture & de la Sculpture étant plus du reffort des fens, ces Arts ne pouvoient manquer de précéder la Poéfie, parce que les fens ont dû être plus promptement affectés des beautés fenfibles & palpables des ftatues anciennes, que l'imagination n'a dû appercevoir les beautés intellectuelles & fugitives des>> anciens Ecrivains. D'ailleurs, quand elle a commencé à les découvrir, l'imitation de ces mêmes beautés imparfaite par fa fervitude & par la Langue étrangere dont elle fe fervoit, n'a pu manquer de nuire aux progrès de l'ima

gination même. Qu'on fuppofe pour un moment nos Peintres & nos Sculpteurs privés de l'avantage qu'ils avoient de mettre en œuvre la même matiere que les Anciens: s'ils euffent, comme nos Littérateurs, perdu beaucoup de' tems à rechercher & à imiter mal cette matiere, au lieu de fonger à en employer une autre, pour imiter les ouvrages mêmes qui faifoient l'objet de leur admiration; ils auroient fait fans doute un chemin beaucoup moins rapide, & en feroient encore à trouver le marbre..

A l'égard de la Mufique, elle a dû arriver beaucoup plus tard à un certain degré de perfection, parce que c'eft un art que les Modernes ont été obligés de créer. Le tems a détruit tous les modeles que les Anciens avoient pu nous laiffer en ce genre, & leurs Ecrivains, du moins ceux qui nous reftent, ne nousont tranfmis fur ce fujet que des con-noiffances très-obfcures, ou des histoires plus propres à nous étonner qu'à nous inftruire. Auffi plufieurs de nos Sçavans, pouffés peut-être par une efpece d'amour de propriété, ont prétendu que nous avons porté cet art

beaucoup plus loin que les Grecs; prétention que le défaut de monumens rend auffi difficile à appuyer qu'à détruire, & qui ne peut être qu'affez foiblement combattue par les prodiges vrais ou fuppofés de la Mufique ancienne. Peut-être feroit-il permis de conjecturer avec quelque vraisemblance, que cette Mufique étoit tout-à-fait différente de la nôtre; & que fi l'ancienne étoit fupérieure par la mélodie, l'harmonie donne à la moderne des avantages.

Nous ferions injuftes fi, à l'occasion du détail où nous venons d'entrer nous ne reconnoiffions point ce que nous devons à l'Italie; c'eft d'elle que nous avons reçu les Sciences, qui depuis ont fructifié fi abondamment dans toute l'Europe, c'eft à elle fur-tout que nous devons les Beaux-Arts & le bon goût, dont elle nous a fourni un grand nombre de modeles inimitables.

Pendant que les Arts & les BellesLettres étoient en honneur, il s'en falJoit beaucoup que la Philofophie fît le même progrès, du moins dans chaque nation prile en corps; elle n'a paru que beaucoup plus tard. Ce n'eft pas

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qu'au fond il foit plus aifé d'exceller dans les Belles-Lettres que dans la Philofophie; la fupériorité en tout genre eft également difficile à atteindre. Mais la lecture des Anciens devoit contribuer plus promptement à l'avancement des Belles-Lettres & du bon goût, qu'à celui des Sciences naturelles. Les beautés littéraires n'ont pas befoin d'être vues long-tems pour être fenties; & comme les hommes fentent avant que de penfer, ils doivent par la même raifon juger ce qu'ils fentent avant que de juger ce qu'ils penfent. D'ailleurs, les Anciens n'étoient pas à beaucoup près auffi parfaits comme Philofophes que comme Ecrivains. En effet, quoique dans l'ordre de nos idées les premieres. opérations de la raifon précédent les premiers efforts de l'imagination, celleci, quand elle a fait les premiers pas, va beaucoup plus vite que l'autre : elle a l'avantage de travailler fur des objets qu'elle enfante; au lieu que la raifon forcée de fe borner à ceux qu'elle a devant elle, & s'arrêter & s'arrêter à chaque inftant, ne s'épuife que trop fouvent en recherches infructueufes. L'univers & les réflexions font le premier livre des

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